Rester un trait d’union stratégique entre Orient et Occident

Paru dans La Lettre Diplomatique n°126 2ème trimestre 2019

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© Présidence de la République du Kazakhstan

Entretien avec M. Roman VASSILENKO
Vice-Ministre kazakhstanais des Affaires étrangères

À deux ans du 30ème anniversaire de l’indépendance du Kazakhstan, l’ancien Président, « leader de la Nation » (Elbasy, selon son titre officiel) Noursoultan Nazarbaïev a pris le 20 mars 2019 la décision historique de démissionner. Son successeur, l’ancien Président du Sénat, M. Kassym-Jomart Tokayev, élu le 9 juin dernier, hérite d’un État prospère, au cœur des enjeux stratégiques internationaux. Revenant sur les accomplissements d’une décennie de partenariat stratégique avec la France, le Vice-Ministre kazakhstanais des Affaires étrangères, M. Roman Vassilenko, nous explique les défis de la politique étrangère de son pays, de l’accent mis sur la diplomatie économique aux enjeux de l’intégration régionale et du renforcement du dialogue multilatéral.

La Lettre Diplomatique : Monsieur le Ministre, le 11 juin 2018 le Kazakhstan et la France ont célébré le 10ème anniversaire de leur partenariat stratégique. Selon vous, quels sont les apports mutuels de cette collaboration de haut niveau ? Dans quels domaines clés souhaiteriez-vous que les relations entre les deux pays accélèrent leur développement ?

M. Roman VASSILENKO : Tout d’abord, il convient de noter que le Kazakhstan et la France entretiennent un niveau de collaboration très élevé dans les domaines les plus divers. La France est d’ailleurs devenue le premier État de l’Union européenne (UE) à établir un partenariat stratégique avec notre pays, et le Kazakhstan est, à ce jour, le seul partenaire stratégique de la République française en Asie centrale.
Ce statut s’appuie sur une coopération substantielle dans tous les domaines, allant des projets économiques aux liens culturels et humanitaires. Aujourd’hui, la France figure dans le top 5 des principaux partenaires du Kazakhstan en matière d’échanges commerciaux et d’investissement. Au cours des dix dernières années, nos échanges commerciaux mutuels ont atteint plus de 50 milliards de dollars.
En outre, plusieurs grands projets d’investissement communs ont été mis en œuvre par nos deux pays, entre autres, dans les secteurs du pétrole et du gaz, des transports, des matériaux de construction, des produits alimentaires, dans le domaine de la production d’uranium et de titane, ce qui a permis d’attirer plus de 11 milliards de dollars d’investissements français.
En tout, plus de 130 sociétés à participation française opèrent au Kazakhstan, y compris les grandes multinationales telles que Total, Orano, Alstom, Danone, Vicat, etc. Il est intéressant de noter qu’un avion Airbus sur cinq a été construit avec du titane kazakhstanais, et que les raffineries et centrales nucléaires en France utilisent respectivement du pétrole et de l’uranium produits dans notre pays.
À notre avis, malgré ces solides résultats, il existe un potentiel considérable pour élargir et approfondir le partenariat bilatéral dans le domaine économique. L’agriculture et l’agro-alimentaire, le numérique et les énergies renouvelables ont été définis comme axes prioritaires dans cette nouvelle phase de notre partenariat, dans le cadre duquel nous pouvons identifier d’incontestables perspectives de synergies, en tenant compte des besoins du Kazakhstan et des capacités de la France. Le développement de la coopération décentralisée offre également un grand potentiel.
En mars 2019, avec le soutien de l’Ambassade du Kazakhstan en France, s’est tenu le forum franco-kazakhstanais sur le numérique et les énergies renouvelables, qui a rassemblé plus de 120 représentants des autorités et du secteur privé des deux pays. En outre, un forum bilatéral sur l’agriculture à Rennes est prévu pour septembre 2019, ce qui constituera également une excellente plateforme pour renforcer les contacts commerciaux.

L.L.D. : Lors du 53ème Salon international de l’aéronautique et de l’espace du Bourget, votre pays a négocié la construction d’un nouveau satellite de communication avec des entreprises françaises, le KazSat-2P. Comment qualifieriez-vous les progrès accomplis par la coopération franco-kazakhstanaise dans le secteur aérospatial ? Au-delà, comment définiriez-vous la vocation du futur Centre de satellites, en cours de construction au Kazakhstan sous l’égide du groupe Garysh Sapary, en matière de défense, de cybersécurité et numérique ?

R.V. : Le secteur spatial est l’un des secteurs prometteurs du développement technologique du Kazakhstan qui fait l’objet d’efforts communs.
Aujourd’hui, la société nationale Kazakhstan Gharysh Sapary et son partenaire stratégique Airbus Defence and Space mettent en œuvre le projet de création d’un complexe satellitaire via la co-entreprise Ghalam.
Ghalam a été créée en tant que co-entreprise entre Airbus DS et Kazakhstan Gharysh Sapary dans le cadre d’un accord de partenariat conclu en 2010 entre le Kazakhstan et la France. Plus globalement, elle est la preuve de la coopération bilatérale réussie dans le domaine aérospatial entre les deux pays.
Dans le cadre de la mise en œuvre d’une chaîne de montage et de test des engins spatiaux, notre pays a accédé à des technologies de pointe dans ce domaine, y compris de satellites. Cela permettra de moderniser les technologies informatiques, de renforcer les systèmes de cyberdéfense et de contribuer à la transformation numérique de notre pays.
Depuis 2015, le système spatial kazakhstanais d’observation de la Terre comprend deux satellites, KazEOSat-1 et KazEOSat-2 (résolution spatiale moyenne et élevée), ainsi qu’un segment terrestre de données d’observation.
Le centre terrestre est destiné à la réception, au traitement et à la distribution des images satellitaires, ainsi qu’à l’élaboration des missions de vol des engins spatiaux, conformément aux demandes des clients en matière d’imagerie satellitaire de la surface de la Terre.
Tout cela est mis en œuvre en collaboration avec le leader français Airbus Defence and Space. Comme vous pouvez le constater, la France fait partie intégrante de nos efforts dans le domaine aérospatial et nous avons l’intention de renforcer cet aspect de nos relations.

L.L.D. : À l’image du forum agro-industriel franco-kazakhstanais qui doit se dérouler à Rennes en septembre prochain, les échanges commerciaux entre la France et le Kazakhstan se caractérisent par leur dynamisme et leur diversité. Comment en décririez-vous leur potentiel d’expansion ? Comment les autorités régionales des deux pays peuvent-elles contribuer à leur concrétisation ?

R.V. : Comme je l’ai déjà évoqué, le potentiel de croissance des échanges commerciaux entre nos deux pays est très important. S’ils atteignent, pour l’heure, 4 milliards de dollars, leurs marges de croissance pourraient atteindre un taux de 30 à 40% supplémentaire dans les années qui viennent.
La coopération décentralisée entre nos pays joue également un rôle important à cet égard. À titre d’exemple, des synergies pourraient être créées en lien avec le coton : il s’agit, en effet, d’une culture traditionnelle dans la région kazakhstanaise du Turkestan à partir de laquelle des entreprises basées dans la région française de Normandie produisent des articles d’hygiène pour l’industrie cosmétique à base de fibres de coton. Il pourrait s’agir de créer des co-entreprises au Kazakhstan et de concevoir des produits destinés à l’exportation vers des pays tiers. La Chine pourrait bien devenir un marché à cet égard, parmi maints autres exemples similaires.
Nous espérons que le forum agroalimentaire qui se tiendra à Rennes contribuera au développement des relations entre les entreprises concernées de nos deux pays.
En matière d’innovation et d’énergies renouvelables, qui constituaient les sujets centraux du forum organisé à Cannes le 8 mars 2019, on peut citer une petite société française, Urbasolar, qui investit dans la construction d’une centrale solaire dans la région du Turkestan. Lors du prochain forum, il est prévu d’ailleurs de signer un protocole de coopération entre les entreprises françaises et l’Alliance du Kazakhstan pour les énergies solaires.
Ces initiatives sont le fruit d’une coopération décentralisée, qui contribue à accroître les échanges commerciaux entre nos deux pays et ouvre la voie à de futurs projets.

L.L.D. : Le premier forum franco-kazakhstanais d’investissement, organisé à Paris en mai 2018, s’est tenu dans le cadre d’un vaste programme de privatisation lancé en 2016 pour réduire la part de l’État dans l’économie de votre pays. Comment évolue ce programme ? Dans quelle mesure contribue-t-il à la stratégie du Kazakhstan visant à diversifier ses sources de croissance en dehors de ses industries extractives ? Quel rôle jouent les entreprises françaises dans ce domaine ?

R.V. : Le programme de privatisation conduit par le Kazakhstan est très important pour améliorer l’efficacité de la gestion des entreprises et pour renforcer l’initiative privée dans le développement de divers secteurs de l’économie. Le travail d’information et de sensibilisation des investisseurs potentiels dans ce contexte joue un rôle essentiel. Je peux affirmer que la tenue du Forum franco-kazakhstanais à Paris en mai 2018 a servi ces objectifs.
L’un des résultats concrets de ce forum a été la décision prise par la société d’innovation grenobloise, ECM Technologies, de participer à la privatisation d’Astana Solar. Aujourd’hui, cette société, en consortium avec des investisseurs chinois, participe à des projets d’énergie solaire à travers le Kazakhstan. Les entreprises françaises s’intéressent également à d’autres entités susceptibles d’être privatisées. La privatisation de la compagnie aérienne Air Astana et du groupe ferroviaire Kazakhstan Temir Zholy SpA est, par exemple, vivement anticipée.

L.L.D. : Suite à des changements intervenus au sein du gouvernement kazakhstanais en décembre 2018, votre Ministère des Affaires étrangères s’est vu confier de nombreuses missions pour attirer davantage d’investisseurs étrangers. Selon vous, quels sont les outils pour y parvenir ? Comment percevez-vous les nouvelles opportunités ouvertes par l’Accord de partenariat et de coopération renforcé entre l’UE et le Kazakhstan ?

© Présidence de la République du Kazakhstan Après avoir quitté ses fonctions, l’ancien Président du Sénat Kassym-Jomart Tokayev a pris, le 20 mars 2019, les fonctions de Président par intérim du Kazakhstan. Le scrutin présidentiel organisé le 9 juin 2019 l’a officiellement confirmé comme successeur du premier Président Noursoultan Nazarbaïev, qui porte désormais le titre d’Elbasy, « leader de la nation ».

R.V. : Le transfert de la responsabilité en matière de politique d’investissement au Ministère kazakhstanais des Affaires étrangères avait pour principale raison la modification de la structure du travail. Il vise à attirer davantage d’investissements étrangers.
Pour l’année 2019, nous avons fixé des objectifs consistant à améliorer l’environnement des investissements et à mettre en pratique une approche proactive pour attirer les investissements en utilisant les capacités dont disposent les différentes représentations de la République du Kazakhstan à l’étranger.
Aujourd’hui, la liste des pays prioritaires en matière d’investissement au sein de l’économie kazakhstanaise a été élargie. Des responsables des représentations du Kazakhstan auprès des pays cibles ont spécialement été désignés à cet égard pour travailler avec des investisseurs potentiels.
Au-delà des relations avec les investisseurs, les membres des représentations du Kazakhstan à travers le monde devront participer aux activités des commissions intergouvernementales, des conseils des affaires et d’autres structures institutionnelles participant à la concertation avec les organismes publics et les agences concernées du pays hôte. Ces mesures ont pour but d’intensifier les efforts pour attirer les investissements étrangers.

L.L.D. : Nur-Sultan, la capitale du Kazakhstan, qui a célébré son 20ème anniversaire en 2018, est une vitrine symbolique de la modernisation de votre pays. Quel est selon vous la portée de l’inauguration du Centre financier international Astana le 5 juillet 2018 et de la réforme constitutionnelle du 10 mars 2017 visant à garantir son développement sur le long terme ?

R.V. : Le Centre financier international « Astana » (CFIA) constitue un projet unique. Son objectif est de créer et de développer une infrastructure financière innovante pour attirer des capitaux non seulement au Kazakhstan, mais également dans l’espace couvert par les pays d’Eurasie centrale. Il s’agit d’un secteur totalement nouveau conçu pour devenir un moteur pour l’économie de l’ensemble de la région dont fait partie notre pays.
La création du CFIA est le fruit de la mise en œuvre concrète des idées du premier Président du Kazakhstan, Elbasy Noursoultan Nazarbaïev, visant à créer un climat économique et des investissements compétitifs dans notre pays.
Nous nous attendons à ce que le CFIA soit beaucoup plus important que le marché financier traditionnel. Il devrait s’agir d’un pôle financier d’une nouvelle génération, qui deviendra une rampe de lancement pour l’introduction et le développement de solutions technologiques modernes : financement des technologies vertes, fintech, marché de la crypto-monnaie, technologie « blockchain » etc.
Afin de donner un statut spécial et d’assurer le fonctionnement efficace du CFIA des modifications ont été apportées le 10 mars 2017 à la Constitution kazakhstanaise. Selon ces amendements, « un régime juridique spécial dans le domaine financier peut être établi conformément au droit constitutionnel dans la ville de Nur-Sultan. »
De nos jours, la question du développement du CFIA revêt une importance stratégique pour notre pays. Son activité devrait faire de Nur-Sultan une capitale financière d’envergure régionale. Dans ce but, le Ministère kazakhstanais des Affaires étrangères appuie le développement et la promotion du CFIA.
Afin de systématiser la coopération entre le Ministère kazakhstanais des Affaires étrangères et le CFIA, une feuille de route pour le développement et la promotion de ce dernier a été adoptée. Le document prévoit l’organisation d’événements d’information et de communication à l’étranger et la mise en place d’une coopération entre le CFIA et les organisations financières internationales en vue de son développement ultérieur, en utilisant tous les outils du Ministère.

L.L.D. : Possédant d’importantes réserves d’hydrocarbures, d’uranium et de charbon, le Kazakhstan est un acteur clé sur le marché mondial de l’énergie. Comment évaluez-vous l’impact de la volatilité des prix des hydrocarbures sur la stabilité du budget kazakhstanais ? Quel bilan pouvez-vous dresser de l’exposition internationale organisée en 2017 au Kazakhstan sur le thème « L’énergie du futur » ? Comment cet événement a-t-il contribué au développement des technologies vertes ?

R.V. : En effet, grâce aux réserves stratégiques de différentes ressources énergétiques dont il dispose, le Kazakhstan constitue un acteur majeur sur le marché mondial de l’énergie. Dans le même temps, en termes économiques, nous cherchons à ne pas dépendre uniquement de l’exportation d’hydrocarbures. C’est pourquoi, depuis le début des années 2000, nous avons créé le Fonds national, au sein duquel est affectée la plus grande part de nos recettes pétrolières. Par ailleurs, nous nous efforçons de conserver notre rôle sur le marché international de l’approvisionnement énergétique, en tenant compte des changements révolutionnaires en cours et des nouveaux développements technologiques.
C’est exactement la raison pour laquelle le développement de sources d’énergies alternatives constitue un objectif important pour notre pays. Le Kazakhstan encourage la coopération interrégionale en vue de favoriser l’essor d’une « économie  » dans le cadre de la mise en œuvre du programme de partenariat « Green Bridge » entre les pays d’Europe et ceux de la région Asie-Pacifique, ainsi qu’entre les secteurs public et privé, les ONG et les organisations internationales.
Cette idée de coopération interrégionale avait été lancée par le premier Président du Kazakhstan Noursoultan Nazarbaïev en septembre 2011, lors de la 66ème session de l’Assemblée générale des Nations unies. Par la suite, elle avait été formulée au sein du texte de l’initiative « Pont vert » d’Astana.
Dans le cadre de la mission formulée par le dirigeant kazakhstanais pour développer davantage le potentiel existant, un « Centre international pour les technologies vertes et les projets d’investissement » a été inauguré en juin 2018. Il peut devenir une plateforme prometteuse en matière de recherche dans le domaine des énergies renouvelables et de l’efficacité énergétique.
Ce centre constitue l’un des héritages de l’Exposition internationale 2017, dont le but est d’appuyer la mise en œuvre concrète de la transition vers une économie « verte » en soutenant la création d’une base solide, nécessaire au développement de domaines tels que les énergies renouvelables, les technologies propres et le développement durable.

L.L.D. : Moteur économique de l’Asie centrale, le Kazakhstan cherche à s’affirmer comme une plateforme logistique et de transport d’envergure internationale. Tenant compte du dynamisme de la zone économique spéciale Khorgos-Eastern Gate, quelles pourraient être les retombées pour votre pays du projet chinois de Nouvelles Routes de la Soie ? Dans quelle mesure son lancement par le Président Xi Jinping à l’Université de Nazarbaïev en 2013 illustre-t-il le rôle clé du Kazakhstan dans son architecture ? Plus globalement, comment décririez-vous les liens stratégiques entre Nur-Sultan et Pékin ?

© Présidence de la République du Kazakhstan Alors que l’année 2018 a été marquée par le 10ème anniversaire de l’accord de partenariat stratégique entre le Kazakhstan et la France, l’ancien Président kazakhstanais Noursoultan Nazarbaïev et le Président français Emmanuel Macron se sont rencontrés lors de la cérémonie d’ouverture du Sommet Asie-Europe (ASEM) du 18 octobre 2018, à Bruxelles.

R.V. : La volonté du Kazakhstan de devenir un pôle majeur de transport et de logistique repose sur plusieurs facteurs.
Premièrement, nous sommes géographiquement situés au cœur de l’Eurasie, entre l’Est et l’Ouest. Nous avons accès aux marchés de l’Union économique eurasiatique et de l’UE, de la région de la mer Caspienne et du Caucase, du Moyen-Orient, de la Chine et de l’Asie du Sud-Est, de l’Asie centrale et de l’Asie du Sud. Il s’agit donc d’un avantage comparatif majeur.
Deuxièmement, nous avons développé une politique étrangère constructive et équilibrée, grâce à laquelle nous entretenons des relations amicales et de partenariat avec tous les pays du monde. Cela nous permet d’établir facilement des interactions entre différents pays, ce qui est avantageux pour le trafic international et pratique pour les entreprises.
Par ailleurs, la capitale du Kazakhstan est devenue la capitale informelle de la renaissance de la Route de la soie. C’est en 2013 que le Président de la République populaire de Chine, Xi Jinping, a exprimé l’idée de créer la Ceinture économique de la Route de la soie, qui est devenue un élément important de l’initiative « One Belt, One Road ».
Aujourd’hui, nous pouvons dire que la Route de la soie du XXIème siècle constitue, d’une manière générale, une réussite et que la coopération économique du Kazakhstan avec la Chine porte des fruits très réels.
Le Kazakhstan est devenu le premier pays qui a soutenu l’initiative chinoise. Depuis 2014, notre pays applique avec succès la nouvelle politique économique « Nurly Zhol », grâce à laquelle un réseau d’infrastructures de transport et de logistique modernes et compétitives a été créé sur son territoire. Il est ainsi devenu un élément important de la Route de la Soie.
Dans le même temps, la Grande Route de la Soie moderne a commencé à jouer un rôle économique plus important dans la vie des peuples des pays participant à l’initiative « One Belt, One Road », sous la forme de vastes infrastructures, de voies de transport et de projets financiers déjà mis en œuvre.
Dans le cadre de son partenariat avec la Chine, notre pays a eu accès au port de Lianyungang et à l’océan Pacifique. Ainsi, nous avons rompu l’isolement continental de notre pays et créé de nouvelles opportunités pour accéder aux nouveaux marchés d’exportation. Grâce à cela, notre coopération avec le Japon et la Corée du Sud a été renouvelée. Depuis deux ans, nous vendons également des céréales kazakhstanaises au Vietnam.
En raison de la réduction des obstacles administratifs et du développement du secteur des transports, le Kazakhstan a considérablement réduit les délais de transit des trains de fret en provenance d’Asie vers des dizaines de villes européennes. Aujourd’hui, environ 80% du trafic commercial s’inscrivant dans le cadre de l’initiative « One Belt, One Road » traverse notre pays. Ce qui représente environ 2 000 trains par an.
Il convient, en outre, de porter une attention particulière au fait que la coopération entre le Kazakhstan et la Chine dans ce cadre ne se limite pas au secteur des transports.
Un modèle de coopération nouveau au plan qualitatif entre nos deux pays a été mis au point dans le domaine du développement des capacités de production. Ce modèle associe un dialogue politique étroit et la prise en compte des besoins de production spécifiques des deux parties. À l’heure actuelle, 55 projets conjoints, d’un montant total de 27,4 milliards de dollars, sont mis en œuvre et devraient créer environ 20 000 nouveaux emplois dans 16 régions du Kazakhstan.
Les principaux axes de la coopération kazakhstano-chinoise comprennent les domaines suivants : automobile, agriculture, chimie, exploitation minière, pétrole et gaz, construction métallurgie, industrie légère, production d’engrais minéraux, énergie, transport et logistique, et nouvelles technologies.
Cela répond pleinement aux priorités nationales du Kazakhstan en matière de diversification et d’industrialisation de l’économie. De plus, la participation à l’initiative « One Belt, One Road » générera, selon les experts, une croissance annuelle supplémentaire du PIB kazakhstanais allant jusqu’à 1 point de pourcentage d’ici 2021. En outre, elle devrait permettre de créer 200 000 nouveaux emplois supplémentaires et d’attirer plus de 7 milliards de dollars d’investissements.
Pour résumer la nature de nos liens de coopération, on peut dire en quelques mots que la Chine est notre voisin et que, grâce aux liens séculaires existant entre nos peuples, la coopération entre le Kazakhstan et la Chine est entrée dans une nouvelle phase de partenariat stratégique global.

L.L.D. : Initiateur de l’Union économique eurasiatique (UEE), le Kazakhstan est devenu le pivot de l’Asie centrale. Tenant compte de son appartenance à l’Organisation du traité de sécurité collective (OTSC) et à l’Organisation de coopération de Shanghai (OCS), comment votre pays perçoit-il son positionnement dans le processus d’intégration régionale ? Comment peut-il contribuer au maintien de l’équilibre politique dans le contexte de la lutte contre l’enclavement dans la région ?

R.V. : Le Kazakhstan est bien entendu intéressé par un développement stable au plan politique, durable au plan économique et sans danger pour l’Asie centrale.
Notre région est entrée dans une nouvelle période de son histoire porteuse à la fois de
nouveaux défis et de nouvelles opportunités.
Conscient de sa responsabilité dans le développement de la région, le Kazakhstan estime que la coopération intrarégionale constitue le meilleur moyen de minimiser les risques possibles à l’extérieur comme à l’intérieur de l’Asie centrale.
Comme vous le savez, Nur-Sultan est devenue, en mars 2018, un lieu de rencontre pour les dirigeants des pays de notre région. Au cours de ces négociations, nous avons défini les priorités de base de la coopération à cinq et présenté des plans pour l’avenir.
L’examen de ces questions s’est poursuivi dans le cadre du sommet du Fonds international pour la sauvegarde de la Mer d’Aral au Turkménistan qui s’est tenu le 24 août 2018 et du Conseil des pays turcophones qui s’est déroulé le 3 septembre 2018 au Kirghizistan.
La signature, le 12 août 2018, de la Convention sur le statut juridique de la mer Caspienne qui, après de nombreuses années de négociations persistantes, a contribué de manière concrète au développement et à la sécurité de la région, conféré au réservoir le statut unique de zone de paix et de coopération mutuellement bénéfique.
Dans le même temps, il n’y a aucune raison d’affirmer que l’espace centrasiatique soit en quelque sorte isolé.
Politiquement, le Kazakhstan représente les intérêts de l’Asie centrale au Conseil de sécurité des Nations unies. Nous avons pleinement utilisé cette plateforme pour promouvoir nos intérêts communs dans les domaines de la sécurité des frontières, des migrations illégales, de la lutte contre le terrorisme et l’extrémisme, de la drogue
et du crime organisé, etc.
Fort du rôle crucial de l’ONU pour le développement de l’Asie centrale, le Kazakhstan a lancé une initiative visant à créer un Centre régional des Nations unies à Almaty. Il complétera les travaux du Centre des Nations unies pour la diplomatie préventive en Asie centrale d’Achgabat (Turkménistan), en accordant une attention particulière aux questions d’aide humanitaire et de développement. La présence de ces deux organes régionaux des Nations unies couvrira un large éventail de problèmes auxquels sont confrontés les pays de cette vaste région, y compris l’Afghanistan.
Dans le domaine économique, Nur-Sultan, qui est un centre d’attraction géo-économique dans la région, poursuit ses efforts pour développer les infrastructures de transport régional, économique et interrégional, qui constitueront la base d’une coopération à long terme entre l’Asie et l’Europe.
Je voudrais mettre l’accent particulier sur le domaine des transports et des communications. Aujourd’hui, tout le monde comprend que la création d’un réseau d’autoroutes modernes reliant les terres et les ports à la Chine, à l’Europe, à l’Eurasie centrale et au Moyen-Orient, permettra un transit continental et transcontinental sur les axes Nord-Sud et Ouest-Est. Les avantages de la mise en œuvre de projets dans ce domaine sont indiscutables : il s’agit à la fois de l’attraction d’investissements et du développement de corridors de transport transcontinentaux, dont les retombées sont perçues par toutes les parties concernées.
De manière générale, le Kazakhstan cherche à harmoniser tous les intérêts de la région et utilise l’activité de ses partenaires mondiaux pour établir un système de relations bénéfique à tous les participants, et en premier lieu aux pays de la région eux-mêmes.

L.L.D. : Comment qualifieriez-vous les retombées de la coopération entre votre pays et l’OTAN ?

© Ambassade du Kazakhstan En visite officielle à Paris, les 9 et 10 avril 2018, le Vice-Ministre kazakhstanais des Affaires étrangères Roman Vassilenko s’est entretenu avec le Secrétaire d’État français aux Affaires étrangères Jean-Baptiste Lemoyne.

R.V. : Le Kazakhstan considère que l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) est un partenaire important pour la sécurité internationale et régionale. Nous partageons des défis réels communs qui incluent le terrorisme, le trafic de drogue et la prolifération des armes de destruction massive et de leurs vecteurs. Il s’agit également de divers conflits et crises, de catastrophes naturelles ou d’origine humaine. Et, bien entendu, de l’ensemble des problèmes liés à l’Afghanistan.
La coopération entre le Kazakhstan et l’OTAN se développe de manière planifiée et ciblée dans le cadre du programme « Partenariat pour la paix », signé en 1994.
L’Alliance met en œuvre les objectifs, les buts et les idées du « Partenariat pour la paix » dans le cadre de ses principaux programmes : Plan d’action du partenariat individuel, Processus de planification et d’analyse, Menu Coopération en partenariat, Concept de potentiel opérationnel.
La coopération avec l’OTAN passe par le Ministère kazakhstanais de la Défense. Des cours de formation, des conférences, des séminaires, des réunions, des visites, des colloques et des exercices militaires sont notamment organisés.
Les programmes s’appuient sur les meilleures pratiques de l’OTAN qui contribuent au renforcement des capacités nationales dans les domaines de la sécurité, de la défense, de la lutte contre les menaces à la stabilité régionale, de la coopération scientifique pour la paix et la sécurité, y compris la protection de l’environnement, et de la planification civile d’urgence.
Afin de poursuivre la coopération avec l’OTAN, le plan d’action de partenariat individuel de la République du Kazakhstan avec l’OTAN pour 2019-2020 est actuellement en cours de coordination avec le secrétariat de l’Alliance.
L’un des domaines importants de la coopération avec l’OTAN est la création et le fonctionnement efficace du Centre de formation du Kazakhstan Kazcent (Centre de partenariat pour la paix) depuis 2008, son aide à la formation de contingents militaires à des fins de maintien de la paix et la participation du Kazakhstan à la reconstruction de l’Afghanistan.
Nous pensons que Kazcent a le potentiel nécessaire pour contribuer à la sécurité régionale, tout d’abord, non seulement par la formation des forces armées des pays de la région et par le renforcement du potentiel de maintien de la paix de l’armée mais aussi de la police kazakhstanaise, ce qui correspond à l’initiative d’Elbasy en date du 5 octobre 2018.

L.L.D. : En tant que pays médiateur dans la recherche de compromis dans de nombreux conflits politiques, tels que le programme nucléaire iranien, l’Afghanistan et, plus récemment, la Syrie, le Kazakhstan s’est engagé dans une diplomatie active et « multi-vectorielle ». Pouvez-vous nous expliquer son rôle dans la conclusion de l’accord historique sur le statut de la mer Caspienne le 12 août 2018 à Aktaou ? Quelles en sont les retombées pour le développement économique de ses ressources ? Quel nouvel élan cet accord peut donner à la place de l’Iran dans la région ?

R.V. : Contrairement à la question que vous mentionnez concernant le processus de négociation sur le statut de la mer Caspienne et qui est à l’ordre du jour international, le Kazakhstan a agi en tant que pays médiateur et concerné au premier plan puisqu’il est un pays côtier de cet espace maritime.
Je pense que la signature de la Convention sur le statut juridique de la mer Caspienne est un succès bien mérité de la « diplomatie caspienne », grâce aux efforts conjoints qui ont permis d’élaborer un accord international bien pensé qui définit le statut unique de la Mer Caspienne dans le respect des intérêts de toutes les parties.
Cette Convention offre de larges possibilités d’utilisation de la Mer Caspienne, notamment de ses eaux, de son fond, de son sous-sol, de ses ressources naturelles et de son espace aérien.
Le règlement du statut juridique de la Mer Caspienne crée toutes les conditions nécessaires à la coopération entre les pays du littoral caspien dans tous les domaines à un niveau qualitativement nouveau.
Je suis convaincu que la solution des problèmes juridiques aura un effet positif non seulement pour l’interaction entre les États côtiers, mais qu’elle créera également des conditions favorables pour attirer les investissements et développer les relations commerciales et économiques des cinq pays caspiens à l’international. Elle contribuera également au développement des infrastructures de transport et au potentiel de transit dans la région.

L.L.D. : Occupant une position stratégique, l’Asie centrale affiche aujourd’hui un développement économique dynamique, fort d’un vaste potentiel humain et économique caractérisé notamment par la richesse de ses ressources naturelles et industrielles. Comment appréhendez-vous les perspectives d’approfondissement du processus d’intégration régional ?

© Ministère des Affaires étrangères du Kazakhstan Le Ministre kazakhstanais des Affaires étrangères Beïbut Atamkulov (à gauche) aux côtés du Ministre des Affaires étrangères chinois WANG Yi lors de la visite officielle qu’il a accompli à Pékin, le 29 mars 2019.

R.V. : Dans le contexte de la mondialisation, une interaction étroite, des relations prévisibles et stables entre les pays d’Asie centrale sont la seule possibilité de favoriser un développement progressif et durable, de créer un climat de compréhension mutuelle et de coopération dans la région pour coordonner les efforts conjoints visant à résoudre les problèmes communs à régler à court terme.
La réunion de travail (consultative) des chefs d’État d’Asie centrale, qui s’est tenue le 15 mars 2018 à Nur-Sultan – et qui a marqué le premier sommet régional depuis de nombreuses années – a représenté un aboutissement global important en Asie centrale. Au cours de cette rencontre, il a été affirmé que la solution de l’ensemble des problèmes intra-régionaux en Asie centrale peut et doit être mise en œuvre par les États de la région eux-mêmes. Dans le même temps, il a été noté qu’il n’y avait pas de « mentalité de bloc », que la région était opposée aux facteurs extérieurs et que les aspirations communes des pays d’Asie centrale étaient tournées vers les problèmes internes de ces régions.
À l’issue de ce forum, il a été convenu de tenir ces réunions au plus haut niveau chaque année à la veille de la fête de Navruz.
La nouvelle dynamique de coopération dans la région porte déjà ses fruits. En Asie centrale, le chiffre d’affaires a considérablement augmenté, de nouvelles liaisons aériennes, routières et ferroviaires sont ouvertes, des postes de contrôle sont modernisés et de nouveaux projets d’infrastructure sont en cours d’exécution. Par exemple, le volume des échanges commerciaux du Kazakhstan avec les pays d’Asie centrale a augmenté de 18,4% en 2018, pour atteindre 4,3 milliards de dollars.
Conformément à la décision des chefs d’État, une réunion du Groupe de travail au niveau des vice-premiers ministres des pays de la région s’est tenue à Tachkent le 15 mars 2019 et le premier Forum économique d’Asie centrale a été organisé avec succès.
Les perspectives pour notre région sont prometteuses et nous devons donc continuer à travailler ensemble pour renforcer une coopération mutuellement bénéfique dans les domaines les plus prometteurs comme les échanges commerciaux, le transit, l’agriculture, le tourisme, la numérisation, les soins de santé et bien plus encore. Nous entendons accorder une attention particulière au développement de la coopération interrégionale en tant que moteur supplémentaire de l’approfondissement des liens commerciaux et économiques entre les régions de nos pays, ainsi qu’à la poursuite de la coopération dans le domaine culturel et humanitaire.
Depuis 1993, le Fonds international pour le sauvetage de la mer d’Aral (IFAS) a accompli un travail considérable pour résoudre les problèmes urgents du bassin de la mer d’Aral et demeure la seule plateforme institutionnelle dans le cadre de laquelle les cinq pays d’Asie centrale sont représentés.
Au cours de cette période, l’IFAS a garanti le respect des engagements pris par les pays en matière de coopération sur les eaux transfrontalières, ce qui est noté dans presque tous les rapports, déclarations et programmes communs pour aider les pays du bassin de la Mer d’Aral (ASBP).
En 2018, l’IFAS a célébré son 25ème anniversaire. Le 24 août 2018, pour la première fois
depuis 2009, le Sommet des chefs d’État des États fondateurs de l’IFAS s’est tenu à Turkmenbashi (Turkménistan) avec la participation des dirigeants des cinq pays d’Asie centrale. Lors de cette réunion, les chefs d’État ont adopté un communiqué commun, selon lequel d’importants programmes, projets et activités seront élaborés et mis en œuvre, des mesures seront prises pour l’utilisation rationnelle des ressources en eau, l’automatisation de la gestion de l’eau et la protection environnementale.
En outre, le concept du Programme d’action sur l’assistance aux pays du bassin de la Mer d’Aral (ASBP-4), élaboré par des experts nationaux des pays d’Asie centrale avec la participation de partenaires internationaux, a été examiné et approuvé lors de cette réunion.
L’objectif de l’ASBP-4 est de mettre en œuvre des actions conjointes et des programmes à long terme pour surmonter la crise de la Mer d’Aral et pour renforcer la coopération par des actions ciblées aux niveaux national, régional et international visant à améliorer la situation environnementale et socio-économique, le développement durable et le bien-être humain dans l’espace couvert par son bassin.
Des investisseurs internationaux tels que l’UE, le PNUD, le PNUE, le Centre régional des Nations unies pour la diplomatie préventive en Asie centrale, la Banque mondiale, la FAO, l’USAID, la Direction du développement et de la coopération de la Suisse, ou encore l’Agence allemande de coopération internationale (GIZ) se sont déclarés prêts à soutenir le développement de l’ASBP-4 et à y contribuer, conformément à leur mandat et à leurs capacités financières.
En 2018, nous avons renforcé le cadre stratégique international de nos initiatives en matière d’eau et d’environnement. La résolution de l’Assemblée générale des Nations unies portant sur la Décennie internationale d’action « L’eau au service du développement durable 2018-2028 » de 2016 a, en particulier, été complétée par les résolutions de l’Assemblée générale intitulées « la coopération entre l’ONU et IFAS » et « Renforcer la coopération régionale et internationale pour assurer la paix, la stabilité et le développement durable dans la région Asie centrale ».
Ces résolutions offrent l’occasion de discuter une fois par an au sein de l’ONU des questions relatives à la contribution des donateurs des États chefs de file et des structures de l’ONU et des organisations internationales, pour la mise en œuvre de projets dans la région de la Mer d’Aral. Elles confirment en outre l’appui international de haut niveau aux pays d’Asie centrale pour combattre les conséquences de la catastrophe dans cet espace maritime.
Dans ses discours, l’ancien Président Noursoultan Nazarbaïev a souligné à maintes reprises que les ressources transfrontalières en eau constituent un patrimoine commun et un avantage pour tous les peuples de la région.
Nous avons pour objectif de construire des relations interétatiques civilisées dans le domaine de l’eau sur la base des normes généralement acceptées du droit international, et nous nous y tenons toujours. C’est dans cet esprit que notre pays a construit son action dans l’ensemble du bassin de la Mer d’Aral, et au sein de l’IFAS en particulier.

© Akimat Nur-Sultan Capitale du Kazakhstan depuis 1997, Astana, rebaptisée Nur-Sultan le 20 mars 2019 en hommage au premier chef de l’État kazakhstanais, abrite plus de 860 000 habitants.

L.L.D. : Le 31 décembre 2018, le Kazakhstan a achevé avec succès son mandat de membre non permanent du Conseil de sécurité de l’ONU. Quels enseignements tirez-vous de cette expérience ?

R.V. : Notre adhésion à cet organe de la plus haute autorité a été précédée d’un travail systématique visant à promouvoir la candidature du Kazakhstan. Toutefois, l’élection du Kazakhstan au Conseil de sécurité en juin 2016 n’a pas encore témoigné du plein succès de la diplomatie kazakhstanaise, qui a accompli un travail ardu et diligent pour respecter toutes les priorités qui lui ont été attribuées et pour assurer la présidence du Conseil de sécurité de l’ONU, en janvier 2018.
Dans un laps de temps relativement court, les diplomates kazakhstanais ont pris part aux débats de la plupart des conflits actuels et, dans certains cas, ont joué avec succès le rôle de médiateurs. Nous avons pleinement contribué aux efforts visant à rétablir et à développer le dialogue en Asie, en Afrique et au Moyen-Orient, ainsi qu’à instaurer et à renforcer la confiance entre tous les États membres des Nations unies et, surtout, entre les membres permanents du Conseil de sécurité.
Notre principale aspiration à cet égard était de faire comprendre aux États membres du Conseil de sécurité de l’ONU l’importance de créer un modèle d’interrelations entre les États, au sein duquel se forge la responsabilité de l’ensemble de la communauté internationale en vue de résoudre les problèmes régionaux et à travers le monde.
Au cours des deux dernières années, nous avons été en mesure d’apporter une contribution significative à la mise en œuvre des tâches inscrites à l’agenda du Conseil de sécurité et de prendre des mesures significatives pour renforcer le partenariat mondial. Dans le même temps, nous avons agi de manière objective et impartiale, en partant de l’importance primordiale de préserver la paix et la sécurité. La réputation d’un médiateur honnête est devenue l’une des caractéristiques de la diplomatie kazakhstanaise.
Le travail au sein du principal organe de l’ONU sur les questions de paix et de sécurité nous a donné une occasion unique de renforcer le rôle du Kazakhstan sur la scène internationale, ainsi que l’image du pays, et de devenir un pays qui construit des ponts.
L’augmentation du nombre de foyers de conflits dans diverses parties du monde et l’intensification des sanctions et des guerres commerciales aggravent actuellement les tensions internationales. Comme l’Histoire nous l’a appris, seul un dialogue constructif est garant de la stabilité et de la sécurité mondiales. Malheureusement, à ce stade, la communauté internationale n’est pas en mesure de parvenir à un tel dialogue et à un tel niveau de compréhension. En tant que grandes puissances, les États-Unis, la Russie, la Chine et l’UE devraient être conscients de leur responsabilité envers l’humanité et chercher des solutions mutuellement acceptables aux conflits internationaux.
De toute évidence, la résolution des conflits émergents est une question complexe. Dans le même temps, nous pensons que les États-Unis, la Russie, la Chine et l’UE devraient trouver de nouvelles formes de dialogue pour discuter des problèmes les plus urgents auxquels la communauté internationale est confrontée. C’est dans cet esprit qu’Elbasy, lors de son discours au Forum de l’ASEM à Bruxelles en octobre 2018, a proposé d’organiser une réunion des dirigeants des quatre pays pour discuter des questions économiques, politiques et de sécurité. Si nécessaire, nous sommes disposés à proposer Nur-Sultan comme alternative pour accueillir cette réunion ou des réunions préparatoires au niveau des experts, si un tel format est soutenu par toutes les parties prenantes au processus.

© UN Photo/Manuel Elias Pour la première fois depuis son indépendance, le Kazakhstan a occupé un siège de membre non-permanent au Conseil de sécurité des Nations unies pour la période 2017-2018.

L.L.D. : Créé à l’initiative de l’ancien Président kazakhstanais Noursoultan Nazarbaïev, le Congrès des dirigeants des religions mondiales et traditionnelles s’est tenu pour sa 6ème édition à Nur-Sultan en octobre 2018. Comment analysez-vous l’impact de cette initiative en faveur de l’intensification du dialogue interculturel ?

R.V. : Des représentants de 17 organisations religieuses de 13 pays du monde avaient participé aux travaux du premier Congrès des dirigeants des religions mondiales et traditionnelles. Mais lors du 6ème Congrès, jusqu’à 82 délégations de 45 pays y ont participé, dont des représentants du Vietnam, de Singapour, de l’Ouzbékistan et de l’Afrique du Sud pour la première fois dans son histoire.
Cette progression témoigne non seulement de l’expansion géographique des frontières du Congrès, mais aussi de l’appui de la communauté internationale à l’initiative du Kazakhstan en faveur du dialogue interreligieux et de ses valeurs.
Grâce à cette initiative internationale du Kazakhstan, notre pays est l’un des principaux défenseurs du droit international et participe au développement du dialogue entre les religions et confessions traditionnelles et mondiales. La Déclaration adoptée à l’issue du 6ème Congrès a été distribuée à l’Assemblée générale des Nations unies, à l’OSCE, etc.
Le Kazakhstan démontre ainsi, par son propre exemple, que le dialogue entre les différentes confessions et croyances est possible.
L’efficacité du dialogue interreligieux et interculturel dépend du soutien des acteurs gouvernementaux et non-gouvernementaux, ainsi que de la communauté internationale tout entière.
La civilisation humaine est en crise persistante de valeurs morales. Au XXIème siècle, la modernisation, qui était auparavant perçue comme une adhésion aux valeurs occidentales, exige une perception différente des traditions nationales et religieuses dans les nouvelles réalités géopolitiques, en tenant compte de la situation politique spécifique dans le monde.
L’essence du dialogue interreligieux a été clairement formulée par le Premier Président du Kazakhstan lors du 1er Congrès des dirigeants des religions mondiales et traditionnelles : « Nous n’avons pas besoin, et nous ne pouvons pas fixer d’objectifs ultimes. Il est impossible de créer un espace religieux unique. Il est impossible de surmonter les différences existantes jusqu’à la fin, d’autant plus qu’elles affectent parfois les fondements des grandes religions. Cependant, la valeur d’un dialogue constant est que, malgré les différences existantes, le sens même et le processus de recherche d’un certain demi-ton demeurent. Le plus important, c’est que le dialogue crée un territoire de paix et de concorde, un temps d’harmonie et de clarté. »
La diversité des croyances et des pratiques religieuses ne doit pas conduire à la suspicion mutuelle, à la discrimination et à la destruction, mais plutôt à la perception mutuelle et à l’harmonie, démontrant le caractère unique de chaque religion et culture. Les religions devraient s’efforcer de coopérer davantage, en reconnaissant que la tolérance et la compréhension mutuelle sont des outils essentiels à la coexistence pacifique de tous les peuples.
Le Kazakhstan est déterminé à promouvoir davantage le dialogue interculturel et intercivilisationnel non seulement au Congrès, mais aussi dans des organisations telles que l’ONU, l’UNESCO, l’OSCE et d’autres instances internationales de références.