<strong>Par M. Etienne GIROS</strong>
Président délégué du Conseil français des Investisseurs en Afrique (CIAN)
Depuis plusieurs années maintenant, l’Éthiopie est considérée par les entreprises comme un marché à fort potentiel et un pays où il faut être présent. Véritable moteur de la région d’Afrique de l’Est et du continent, ce pays de 105 millions d’habitants enregistre des indicateurs qui traduisent une économie en plein essor. La croissance économique continue de caracoler aux alentours de 8% par an, malgré une inflation proche de 10%. Certes, la balance commerciale demeure lourdement déséquilibrée mais le déficit du compte courant et le déficit fiscal restent néanmoins contenus.
Cette situation économique somme toute encourageante, soutenue par une forte population, est amplifiée par le contexte politique du pays. Les troubles, protestataires ou ethniques, qui ont touché l’Éthiopie ces dernières semaines, ne peuvent ni faire oublier ni faire disparaître l’évolution politique favorable des dernières années. Le point d’orgue en a été l’élection en 2018 du nouveau Premier Ministre Abiy Ahmed, âgé de 42 ans, premier Oromo, ethnie majoritaire en Éthiopie, à arriver au pouvoir depuis 1991. En un an le nouveau Premier Ministre s’est attelé à la pacification extérieure et intérieure, et a déployé un agenda économique réformateur : privatisations, partenariat public-privé, ouverture de corridors de transport, infrastructures, lancement de zones économiques spéciales.
Autre facteur positif pour les entreprises françaises, l’élection au poste de Présidente de la République de Mme Sahle-Work Zewde, première femme élue chef de l’État et parfaitement francophone, après plusieurs années passées à Paris en tant qu’ambassadrice. D’ailleurs, le nouveau gouvernement respecte une stricte parité homme-femme.

Le bilan des entreprises françaises installées sur place ou commerçant avec le pays est dans l’ensemble positif. Les trois quarts d’entre elles enregistrent un chiffre d’affaires
et des investissements en progression. Aucune d’entre elles n’annonce des pertes, 75% se déclarant bénéficiaires. Enfin, concernant les créances commerciales, les encaissements semblent réguliers et sans incidents majeurs. D’ailleurs, très peu d’entre elles possèdent des créances sur l’État.
Malgré la place modeste de l’Éthiopie dans le classement Doing Business 2018, au 159ème rang sur 190, le climat des affaires est perçu par les entreprises comme en progrès. C’est ce qu’il ressort du Rapport CIAN 2019 établi à partir de l’enquête pays auprès des entreprises françaises installées sur place.
Les atouts traditionnels de l’Éthiopie – taille du pays, population importante et éduquée, position géographique privilégiée – sont maintenant confortés par le renouveau politique encourageant, malgré les soubresauts observés ces derniers jours. Les nouveaux acteurs en Afrique que sont la Chine, mais aussi l’Inde et la Turquie, ne s’y sont pas trompés et continuent à investir massivement et avec détermination, dans les infrastructures mais aussi dans les industries de transformation (textile, alimentaire).
Les entreprises françaises ne doivent donc pas hésiter à investiguer les opportunités de ce marché porteur, car les positions qu’elles occuperont à l’horizon 2030 se construisent dès aujourd’hui. Évidemment, investir en Éthiopie est parfois compliqué et prend du temps, mais les entreprises présentes, dans leur écrasante majorité, s’en félicitent. Le secteur privé français est attendu dans cette région, pour la qualité de ses produits et de ses services, mais aussi comme contrepoids aux nouveaux acteurs émergents dans la région.