La coopération scientifique pilier de l’amitié franco-allemande

Paru dans La Lettre Diplomatique n°124 4ème trimestre 2019

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Par M. Michael JASPERS
Chef du Service des affaires scientifiques et technologiques de l’Ambassade d’Allemagne en France

Par sa diversité, sa qualité et sa fiabilité, la coopération franco-allemande en sciences et en recherche est unique. Elle est le fruit d’une implication de longue date de nombreux acteurs à tous les échelons du système de recherche et de la politique. Elle est désormais l’un des piliers de l’amitié franco-allemande. La France et l’Allemagne insufflent une nouvelle dynamique à cette coopération afin de la faire encore progresser.
La déclaration de Meseberg en juin 2018 et la déclaration d’intention commune des ministères de la Recherche formulée lors du 6ème Forum de la coopération franco-allemande en matière de recherche énoncent les grands sujets de réflexion actuels.
Ainsi, les innovations de rupture sont une thématique de première importance. Il s’agit pour les deux pays de favoriser le lancement d’innovations révolutionnaires grâce à de nouveaux outils et méthodes. La France a pris de premières initiatives en ce sens ; le gouvernement fédéral a adopté une « stratégie Hautes technologies 2025 » et décidé la création d’une Agence pour les innovations de rupture. Mais agir au niveau national ne suffit pas. Il faut donc rassembler les initiatives, au niveau européen avec le Conseil européen de l’innovation envisagé, comme au niveau franco-allemand.
L’intelligence artificielle (IA) représente un autre enjeu majeur de cette coopération. Nos deux pays ont présenté les stratégies de recherche : briguant le peloton de tête mondial en matière d’IA, ils tablent clairement sur une mise en réseau franco-allemande de leurs centres de compétences nationaux. Car dans un contexte de concurrence très disputée, ce n’est qu’en conjuguant nos forces que nous pourrons atteindre nos ambitieux objectifs.
La coopération universitaire franco-allemande vise principalement à rendre les étudiants et les chercheurs toujours plus mobiles et à développer encore davantage l’espace universitaire européen. Dans ce domaine, la France et l’Allemagne disposent d’une longue expérience, notamment grâce à leurs réseaux d’établissements d’enseignement supérieur. Forte de 180 cursus intégrés binationaux et trinationaux, l’Université franco-allemande (UFA) joue à cet égard un rôle central de passerelle entre la France et l’Allemagne. La création d’universités européennes, pour lesquelles le premier appel à propositions a été lancé à l’automne 2018 par la Commission européenne, viendra donner un nouvel élan à la coopération dans l’enseignement supérieur. Il serait souhaitable et important que des consortiums d’établissements comprenant des partenaires français et allemands soient retenus, d’autant plus que nos deux pays entendent alors doter leurs universités de moyens supplémentaires.

© BMBF/Hans-Joachim Rickel À l’issue du 6ème Forum de la coopération franco-allemande de la recherche, Mme Anja Karliczek, Ministre fédérale allemande de l’Éducation et de la Recherche et Mme Frédérique Vidal, Ministre française de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation ont signé le 19 juin 2018 une déclaration d’intention commune définissant des objectifs conjoints en vue de mieux prendre en compte les défis globaux et le développement de l’espace européen de la recherche et de l’enseignement supérieur.

La recherche sur le climat, l’énergie et le système terrestre ainsi que la sécurité informatique sont d’autres axes clés de notre coopération. En microélectronique en particulier, nos deux pays souhaitent continuer à accroître la souveraineté technologique européenne. Qu’il s’agisse de l’organisation d’un espace européen de recherche, de la définition du futur programme cadre « Horizon Europe » ou de projets exceptionnels tels que le projet européen de supercalcul EuroHPC, la France et l’Allemagne partagent de toute évidence les mêmes objectifs.
L’idée est de garantir les fondements de la prospérité future et la compétitivité de nos deux pays, mais aussi de toute l’Europe. Et cela repose sur des sciences d’excellence, une recherche forte et une innovation performante.
Mais une coopération scientifique fructueuse va plus loin. Elle doit permettre des rencontres, réunir des individus avec leur savoir et leur curiosité, faire naître des idées communes, penser l’avenir ensemble. La coopération scientifique franco-allemande entend développer une perspective partagée et consolider encore l’amitié entre nos deux pays. Et n’oublions pas qu’elle représente un gain incomparable pour tous les étudiants, chercheurs et scientifiques qui prennent part à ces échanges et les font vivre.