La lettre diplomatique

Article – El Salvador
La Lettre Diplomatique N°73 – Premier trimestre 2006

L’ouverture commerciale d’El Salvador : de nouvelles opportunités d’investissement

En cent trente ans de relations diplomatiques, le Président Elias Antonio Saca a accompli en juin 2005 la première visite officielle en France d’un président salvadorien. Si la relance des relations avec les pays de l’Union européenne est la motivation première de ce déplacement inédit, l’attraction de nouveaux investisseurs étrangers en est, sans doute, la plus concrète.

Elu avec 60% des suffrages en juin 2004, pour rétablir la sécurité dans le pays et relancer une économie atone, le Président Antonio Saca a engagé une politique volontariste de développement des infrastructures, visant à poser les fondements d’une nouvelle dynamique économique. Le plus petit pays d’Amérique centrale, mais aussi le plus peuplé, cherche en effet à se positionner en plateforme logistique et commerciale de la région. D’importants projets de construction ont ainsi été lancés, comme l’extension et la modernisation de l’aéroport national de Comalapa ou la modernisation du port de Acajutl au nord-ouest du pays. Le plus ambitieux reste toutefois le projet de « canal sec » devant reliant le département de la Union au port de Cortez au Honduras, dans le but de raccourcir les voies commerciales entre le Pacifique et l’Atlantique.

En une décennie, l’économie salvadorienne s’est fortement diversifiée, majoritairement dans les services. Le temps des « 14 familles » est loin. L’agriculture ne pèse plus que 17% du PIB. La chute constante des prix du café, son principal produit d’exportation (70% entre 1997 et 2005), a contraint le pays à trouver d’autres sources de richesses avec le développement du système des « maquilas », ou industrie de sous-traitance. La croissance stagne pourtant au Salvador, atteignant en 2005 tout juste 2% (la moyenne depuis quatre ans), alors que celle des autres pays centraméricains s’est parfois élevée au-dessus de 3,5%. Elle reste encore étroitement dépendante des « remesas » ou transferts de fond des immigrés salvadoriens (14% du PIB). Le redémarrage économique est ralenti par l’envolée des prix du pétrole et la remontée de l’inflation à 5,4% qui constitue un handicap pour les exportations vers les marchés régionaux et américain. Depuis l’ouragan Mitch en 1998, El Salvador a également dû surmonter une succession de calamités naturelles, avec deux séismes ravageurs en 2001 et un nouveau cyclone à l’automne 2005. Le ralentissement de l’économie américaine entre 2000 et 2003 a également fait stagner ses exportations qui sont soumises à une concurrence de plus en plus féroce des produits asiatiques sur ce marché.

Jusqu’au retrait de France Telecom début 2004, qui a d’ailleurs concerné l’ensemble de l’Amérique latine, la France occupait le second rang des investisseurs étrangers derrière les Etats-Unis, premier partenaire commercial d’El Salvador. La France veut toutefois se maintenir parmi ses premiers partenaires économiques. Elle a ainsi financé l’étude de faisabilité du projet hydro-électrique El Cimarron, d’ailleurs réalisé par une société française, Coyne et Bellier. Représentant un investissement estimé à 404,8 millions de dollars, ce projet pourrait permettre une augmentation de 50% de la capacité énergétique actuelle du pays, ouvrant également des possibilités à l’exportation d’énergie. Alors que les flux d’investissements étrangers au Salvador n’ont cessé de décroître depuis 1999, le gouvernement salvadorien a défini les secteurs stratégiques pour l’investissement dans le   textile, la logistique et les services. En juin dernier, le Président Elias Antonio Saca affirmait ainsi devant les parlementaires salvadoriens que, durant sa première année de mandat, une quinzaine d’entreprises étrangères s’étaient implantées dans le pays, investissant près d’un milliard de dollars et générant 4 000 emplois directs et 8 000 indirects. Parmi elles, des sociétés françaises comme Teleperformance qui a investi 5 millions de dollars pour la création d’un centre d’appels, ou la filiale Devanlay du groupe Lacoste qui a implanté une unité de fabrication dans la zone franche de Miramar. Devanley compte bien d’ailleurs se servir du traité de libre-échange CAFTA, ratifié en juin 2005 par le Congrès américain, pour pénétrer le marché américain. Disposant également d’accords similaires avec les autres pays centraméricains, la République dominicaine, le Panama, le Mexique et le Chili, El Salvador bénéficie avec le CAFTA de l’accès à un marché naturel de 2,5 millions de consommateurs salvadoriens immigrés. La réussite des négociations en cours avec l’Union européenne et le Canada ne pourrait que renforcer les opportunités de croissance dans un pays situé au carrefour des échanges économiques centreaméricains. C.H.


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