La lettre diplomatique

Article – Australie
La Lettre Diplomatique N°73 – Premier trimestre 2006

Australie-France : Un partenariat « Win Win »

Par M. Jean-Louis Latour, Chef de la Mission économique française à Sydney

 

La relation commerciale entre la France et l’Australie est contrastée, mais de nombreux signes montrent qu’elle s’améliore dans les deux sens.

L’on peut se féliciter de l’augmentation du volume global des échanges de marchandises entre la France et l’Australie (en 2004 : 3,4 milliards d’euros) due, pour l’essentiel, à l’essor des exportations françaises qui ont triplé depuis 1992 et, pour une moindre part, à une récente augmentation des exportations australiennes vers la France. On doit aussi constater que :

– si ce commerce est fortement déséquilibré en faveur de la France qui dégage un excédent de près de 1,5 milliard d’euros situant l’Australie, selon les années, entre le troisième et le huitième excédent commercial français tous pays confondus,

– ce déséquilibre est essentiellement dû à l’incorporation des ventes d’airbus (non comptabilisées dans la part des exportations allemandes vers l’Australie en raison de la logique comptable de la mesure des flux), faussant de ce fait toute comparaison lucide. C’est ainsi qu’en 2004, les exportations françaises vers l’Australie ont augmenté de 22% par rapport à l’année 2003 (de 1 925 millions d’euros à 2 348 millions d’euros), alors qu’elles ont augmenté vers le reste du monde de 5,6%. Si l’on ne tenait compte que de la fraction française des exportations d’Airbus, ce pourcentage resterait au dessus de la moyenne, mais l’asymétrie ne serait pas aussi importante.

En effet, les exportations australiennes en France après une longue période de stabilité (769 millions d’euros en 1992, 849 millions d’euros en 2002), s’intensifient (+3,1% en 2003 et +5,3% en 2004).

 La répartition des exportations françaises par grands secteurs fait apparaître une prédominance des biens d’équipement (52%, Airbus représentant à lui seul 33% de nos exportations totales) ; les biens intermédiaires représentent une part stable de près d’un quart de nos exportations (22%), les biens de consommation 20% et l’agroalimentaire 6%.

De 2000 à 2004, la part de la France dans les importations australiennes est passée de 2 à 3 % (Source : World Trade Atlas), celle des Etats-Unis de 19,8 à 14,5%, celle du Japon de 13,1 à 11,8% et celle du Royaume-Uni de 5,9 à 4,1%.

L’Australie reste encore un fournisseur marginal de la France (0,3% des importations françaises de biens en 2004), en dépit de percées commerciales de ce pays, notamment dans le domaine du vin.

Cette stabilité s’explique par la composition des exportations australiennes, mais aussi par l’éloignement :

– Les ventes australiennes en France sont en effet constituées aux quatre cinquième de matières premières et, plus précisément, de charbon (25%), de produits de l’élevage ovin (12%), de fer (10%), et d’uranium (6%), produits pour lesquels la France est un des principaux clients de l’Australie.

La présence des sociétés françaises est un élément important de la relation bilatérale. A cet égard, la France peut être considérée comme un des grands partenaires de l’Australie avec un stock d’investissement d’un montant de 2,6 milliards d’euros qui la place au huitième rang des investisseurs étrangers. La place de la France en Australie, c’est au total près de 300 filiales employant près de 85 000 salariés australiens qui dégagent un chiffre d’affaires de plus de 12 milliards d’euros.

Selon les statistiques douanières, 5 000 entreprises françaises environ sont présentes ou représentées sur le marché australien.

 

Certaines sociétés françaises ont acquis au cours des dernières années des positions de leaders dans leur secteur. Parmi les principales, on peut citer :

 – Accor, dont le parc hôtelier est de 100 établissements en Australie et Nouvelle-Zélande fin 2005,

 – Sodhexo, leader du marché de la restauration collective,

 – Thalès, qui a racheté en 1999 Australian Defence Industry, la principale société d’armement du pays,

 – Suez, qui assure l’approvisionnement en eau potable de Sydney au travers de sa filiale Degrémont

 – Veolia Environnement, très présent dans le transport de passagers (trains de banlieue à Melbourne et tramway à Sydney),

 – AXA qui, après le rachat de National Mutual en 1996, est un des principaux assureurs-vie en Australie,

 – BNP PARIBAS et SG (par sa filiale SG Australia), qui ont une activité de banques d’affaires,

 – CMA-CGM, devenu le cinquième armateur mondial pour le trafic de conteneurs, après l’achat des lignes internationales de la société ANL, première compagnie australienne,

 – La Caisse des Dépôts et Consignations, par le biais de ses filiales Egis et Transdev, assure la gestion de plusieurs autoroutes à péage à Sydney, du réseau de tramway de Melbourne et vient de remporter la privatisation des ports d’Adélaïde,

 – Pernod Ricard, principal exportateur de vins australiens depuis l’acquisition d’Orlando Wyndham,

 – Moët et Chandon du groupe LVMH, producteur de vins mousseux australiens

 – Chargeurs, premier exportateur de laine australienne,

 – Schneider Electric, qui a acquis en 2003 l’activité équipements électriques basse tension du groupe Gérard Industrie pour l’Australie, la Nouvelle-Zélande, l’Afrique du Sud et l’Inde, ainsi que la marque Clipsal,

Enfin, de nombreux investissements sont à mettre à l’actif des PME françaises : Brochot, Sicame, SNF Floerger, Insul 8, Gerflor, Mermet, Somfy, Virbac, Railtech, Compagnie Générale de Géophysique, Infogrammes ou Webraska, ou encore des 50 000 Français installés en Australie, notamment dans la restauration et le commerce.

 

En 2005, les entreprises françaises continuent à remporter d’importants contrats dans les secteurs de l’énergie et de l’environnement.

Alstom a remporté un contrat pour la fourniture clef en main d’une centrale au gaz à cycle ouvert de 450 MW, située à Braemar dans le Queensland. Alstom Australie sera également maître d’œuvre pour la construction de la deuxième tranche de la centrale de Prony Energies en Nouvelle Calédonie (135 millions d’euros, dont 75 de part française).

SPIE Capag, filiale du groupe SPIE spécialisée dans la construction de conduites, a remporté pour 300 millions d’euros, avec son partenaire australien AJ Lucas, un contrat pour la construction d’un gazoduc de plus de 900 km, qui reliera le champ gazier de Blacktip en mer de Timor à la raffinerie de bauxite de Gove, dans le Territoire du Nord.

La coentreprise entre Multiplex et Australian Water Services, filiale australienne de Degrémont (Groupe Suez), réalise pour 230 millions d’euros l’usine de désalinisation d’eau de mer de Perth. qui produira 140 000 mètres cubes d’eau douce par jour.

Il est éminemment souhaitable que les investissements australiens en France se développent   car ils n’occupent encore aujourd’hui qu’une faible place.


Tous droits réservés ® La Lettre Diplomatique