La lettre diplomatique

Article – Chypre
La Lettre Diplomatique N°70 – Deuxième trimestre 2005

Message

Message de S.E.M. Tassos Papadopoulos,
Président de la République de Chypre

 

C’est un grand plaisir pour moi d’envoyer ce message à « La Lettre Diplomatique » à l’occasion de son édition spéciale sur Chypre. Cette édition coïncide avec l’achèvement d’une année depuis l’adhésion de Chypre à l’Union européenne. Un effort collectif et laborieux de quatorze ans, qui a commencé en juillet 1990 au moment où la République de Chypre a soumis sa candidature afin de devenir membre de l’UE, a abouti à sa réalisation le 1er mai 2004. Le nouveau contexte offert par cette adhésion marque le début d’une nouvelle ère, à la fois sur les fronts intérieur et extérieur de Chypre.

La performance macroéconomique du pays, ainsi que les faibles taux d’inflation et de chômage, sont des sources d’optimisme et je suis, de ce fait, convaincu que nos capacités seront accrues davantage encore pour nous permettre de saisir les occasions et de relever les défis. Nous sommes satisfaits de ce que notre objectif stratégique de rejoindre le Mécanisme de Change II ait été réalisé, prouvant une fois de plus le caractère dynamique de l’économie chypriote. Par ailleurs, nous ne perdons pas de vue notre objectif ultime qui est l’adoption de l’euro dans deux ans.

Alors que la pierre angulaire de notre économie réside dans le secteur des services, il est généralement reconnu que l’avantage comparatif le plus important de Chypre est sa population hautement qualifiée. Cet atout nous permet d’aspirer à promouvoir davantage la recherche et l’innovation en vue de faire de Chypre un centre régional de recherche et de technologie. Le gouvernement a conclu des accords et commencé à mettre en oeuvre des projets ambitieux dans ces domaines, y compris la création du premier parc technologique. A cet égard, ce serait une omission de ne pas mentionner l’aide précieuse du parc technologique de Sophia-Antipolis, ainsi que la coopération et le soutien d’importantes institutions universitaires et de recherche internationales. En outre, nous avons fondé « l’Institut chypriote », se consacrant à la recherche, au développement et à l’innovation, qui met en œuvre son programme décennal pour la création de six centres autonomes de recherche. L’accord conclu avec l’Université de Harvard en vue de la création d’un Centre de Recherche à Chypre pour les Ressources en Eau et l’Environnement est déjà dans la deuxième année d’application de son Programme de Recherche.

A travers ces projets, nous aspirons également à renforcer le rôle de Chypre dans notre région, mettant ainsi à profit sa position géographique. Chypre, malgré sa petite taille, peut devenir un pont naturel politique, économique et culturel reliant l’Union européenne à ses voisins du Sud-Est méditerranéen.

Nous avons, néanmoins, une autre vision que nous nous efforçons de transformer en une autre réalité. Malgré nos efforts soutenus et sincères en vue de parvenir à une solution, 31 ans après l’invasion turque et l’occupation de 37% du territoire de Chypre, la question chypriote n’est toujours pas résolue.

Le dernier plan de règlement proposé par l’ONU a été rejeté par les Chypriotes grecs lors du référendum d’avril 2004. Par leur rejet de cette version particulière du plan Annan, les Chypriotes grecs n’ont pas rejeté la solution du problème de Chypre ni la réunification de notre pays. Ils ont rejeté un plan ne répondant pas suffisamment à leurs préoccupations légitimes et ne garantissant pas une solution fonctionnelle et viable qui réunifierait réellement leur pays. Le rapport soumis au Conseil de Sécurité le 22 juin 2005 par l’envoyé spécial du Secrétaire général de l’ONU, M. Prendergast, après sa récente mission d’enquête à Chypre en tant que première étape d’une nouvelle initiative des Nations unies pour le règlement de la question de Chypre, confirme qu’il convient de répondre aux préoccupations sincères des Chypriotes grecs concernant le Plan Annan dans le contexte de cette nouvelle initiative de l’ONU.

Le Gouvernement de Chypre réaffirme son engagement en faveur d’une solution d’une fédération bizonale et bicommunautaire. Nous continuerons de travailler pour une solution négociée qui réponde aux préoccupations légitimes du peuple chypriote dans son ensemble, Chypriotes grecs aussi bien que Chypriotes turcs. Notre adhésion à l’Union européenne, en mai de l’année dernière, et le fait que la Turquie ait obtenu à présent l’occasion unique d’entamer des négociations d’adhésion avec l’Union, plus tard dans le courant de cette année, nous offre un cadre prometteur pour la normalisation de nos relations avec la Turquie et, éventuellement, le règlement de la question chypriote.

En outre, le Gouvernement de Chypre a promu une série complète de mesures destinées à aider nos compatriotes chypriotes turcs à récolter les avantages de l’adhésion de la République de Chypre à l’Union européenne. Nous espérons que le Règlement de l’UE relatif à l’aide financière aux Chypriotes turcs sera adopté et appliqué prochainement. Le retard dans ce domaine n’est pas dû au Gouvernement de Chypre qui a accepté de manière constructive, depuis le mois d’octobre dernier, le texte du compromis convenu au COREPER à Bruxelles. Le Gouvernement de Chypre travaille également en vue de l’amélioration du fonctionnement et du champ d’application du Règlement de l’UE au sujet de la Ligne Verte, qui prévoit le commerce à l’intérieur de l’île et l’exportation de produits chypriotes turcs vers l’UE par les ports et aéroports légaux de Chypre. Nous croyons fermement qu’il faut laisser à ce règlement le temps de prouver son efficacité et qu’il convient d’abandonner les efforts visant à promouvoir le prétendu commerce direct, qui compromettent la souveraineté de la République de Chypre de même que le droit international et européen.

Je profite de l’occasion pour réitérer notre détermination à déployer tous les efforts nécessaires afin de parvenir à une solution qui apportera aux Chypriotes grecs aussi bien qu’aux Chypriotes turcs un environnement stable et pacifique, essentiel pour leur sécurité et leur prospérité, au sein de la famille européenne. Elle offrira, en d’autres termes, à tous les Chypriotes un avenir meilleur que leur passé.


Tous droits réservés ® La Lettre Diplomatique