Détente dans les Relations transatlantiques
Détente dans les Relations transatlantiques
Mme Thérèse Delpech, Chercheur associé au CERI
Le Président Bush a décidé de faire de l’amélioration des relations avec ses alliés une priorité de son second mandat. Certes, ce sera seulement dans quatre ans que l’on pourra dire si cet objectif a été rempli. Mais il faut reconnaître que les initiatives qui ont été prises par Washington depuis le mois de janvier vont bien dans le sens d’une volonté de détente. La nomination au Département d’Etat d’une des plus proches collaboratrices du Président, Condoleezza Rice, laisse présager un rôle beaucoup plus important de la diplomatie que lors du premier mandat. Colin Powell ne manquait pas de qualités, mais n’a jamais eu d’influence décisive et les querelles permanentes avec le Pentagone étaient le plus souvent tranchées en faveur de ce dernier. Le choix par le nouveau Secrétaire d’Etat de Robert Zoellick comme numéro deux est un autre signal d’apaisement. Bien connu pour ses talents de négociateurs, Bob Zoellick est un homme de compromis et non de confrontation. Certes, le titulaire du Pentagone, Donald Rumsfeld, dont les propos et les décisions ont souvent été très vivement discutés en Europe, est resté à son poste. Mais il a profité de la réunion des ministres de la défense de l’OTAN à Nice pour répondre avec humour à une question sur sa célèbre déclaration concernant « la vieille et la nouvelle Europe », en disant que c’était là « le vieux Rumsfeld ». Sur le fond, l’atmosphère est aussi à l’apaisement. En Irak, les Européens ont été surpris par l’ampleur de la participation aux élections de janvier et par le courage des électeurs, tandis que les Américains reconnaissent la nécessité d’assurer une représentation aux sunnites dans l’administration du pays. La participation européenne à la reconstruction demeure limitée mais la remise de la dette à hauteur de 80% par des pays comme
la France ne peut être tenue pour négligeable. Au Sommet de l’OTAN, l’essentiel est de pouvoir dire que tous les Etats membres contribuent d’une façon ou d’une autre. En Afghanistan, grâce à des moyens additionnels, l’OTAN a pu étendre sa mission au-delà de Kaboul, comme la nécessité s’en faisait sentir depuis plusieurs années. C’est chose faite vers le nord (novembre 2004), et de nouvelles étapes sont prévues vers l’ouest (printemps 2005), puis vers le sud et enfin vers l’est. Avant les élections législatives de juin, un enjeu important est aussi de progresser dans la lutte contre la drogue sur l’ensemble du territoire. Enfin, les excès syriens, qui ont consisté dans un premier temps à changer la constitution pour pouvoir conserver le Président Lahoud, puis à assassiner l’ex-Premier ministre Rafic Hariri, ont beaucoup contribué à rapprocher les Etats-Unis et
la France. Les deux pays étaient déjà co-auteurs de la résolution 1559 du Conseil de Sécurité des Nations unies demandant le retrait de
la Syrie du territoire libanais. Avec l’assassinat de Rafic Hariri, c’est une nouvelle étape qui a été franchie et le traditionnel soutien de
la France à
la Syrie fait désor-mais partie du passé. Sur l’Iran, Washington soutient les efforts diplomatiques des Européens même s’ils sont sceptiques sur leurs résultats, mais c’est un jugement que partagent beaucoup d’Européens, y compris parmi les négociateurs. Enfin, comme le souhaitaient tous les Européens, les Etats-Unis se réinvestissent dans le processus de paix au Moyen-Orient après la mort de Yasser Arafat et l’élection de Mahmoud Abbas, qui a fermement condamné l’utilisation de la violence, et qui a pris des mesures concrètes pour la prévenir. Le cessez-le feu signé à Charm el Cheikh le 8 février entre les deux leaders israélien et palestinien ouvre une nouvelle étape. Dans ce contexte général, les conditions semblent remplies pour une détente transatlantique, même si des points de désaccord continueront de subsister. Après tout, ce que fait George W. Bush depuis janvier 2005 est très exactement ce que l’on attendait de John Kerry à l’égard des alliés !