La lettre diplomatique

Article – Le partenariat franco-russe
La Lettre Diplomatique N°79.1 – Quatrième trimestre 2007

Arianespace au cœur de la coopération spatiale euro-russe

Par M. Jean-Yves Le Gall,
Président-Directeur Général d’Arianespace

Numéro un mondial du marché des services de lancement, la société européenne Arianespace a la double vocation de garantir l’indépendance de l’accès à l’espace pour la France et l’Europe, et de parfaire l’excellence et la compétitivité de l’industrie spatiale européenne.
Dans un contexte hautement concurrentiel, où la demande de lancements se diversifie fortement, tant pour les besoins commerciaux qu’institutionnels, Arianespace a toutefois développé une coopération originale avec la Russie pour adapter son offre aux demandes de ses clients. C’est ainsi qu’aux côtés du lanceur européen Ariane 5, va être exploité à partir de 2009 en Guyane française (Amérique du Sud) le lanceur russe Soyuz, déjà mis en œuvre à des fins commerciales depuis dix ans à Baïkonour (Kazakhstan) par Starsem, filiale euro-russe d’Arianespace.
Cette nouvelle stratégie a permis à Arianespace de signer au cours des deux dernières années près de la moitié des contrats commerciaux ouverts sur le marché mondial. L’exploitation simultanée en Guyane d’Ariane 5 et de Soyuz augmentera la flexibilité de l’offre proposée sur le marché international, pour le lancement des petits satellites de télécommunications et des constellations, comme Galileo. Arianespace dispose en permanence d’un carnet de commandes de près de cinquante satellites à lancer avec Ariane 5 et Soyuz, ce qui représente largement plus de trois ans d’activité.
Mais la coopération avec la Russie va surtout permettre à Arianespace de lancer à partir de la Guyane, tous les satellites institutionnels européens et, en particulier, ceux qui ne seront pas lancés par Ariane 5. Soyuz est en effet devenu le lanceur de référence pour les missions européennes scientifiques, d’observation de la Terre, de défense et de sécurité comme, par exemple, les satellites français Pléiades.
De plus, au-delà de l’intérêt immédiat de conforter la compétitivité d’Arianespace sur le marché des services de lancement, l’implantation de Soyuz en Guyane permet à la France de consolider un partenariat à long terme avec la Russie dans un domaine d’excellence, à forte valeur politique.
Ce projet est en effet financé majoritairement par la France et il est réalisé sous l’égide d’un accord intergouvernemental franco-russe spécifique, conclu le 7 novembre 2003. Il entrera à la fin de 2007 dans la dernière phase de sa construction, avec l’installation en Guyane des équipements de fabrication russe, avant leur exploitation effective à compter de 2009.
De façon générale, les autorités françaises et russes jouent un rôle fondamental dans la réalisation du projet. D’une part, les activités d’installation et de mise en œuvre des matériels liés à Soyuz vont nécessiter la présence de nombreux spécialistes russes en Guyane, seuls habilités à occuper ces fonctions en vertu des accords franco-russes. Pour ce faire, les employeurs russes détacheront leurs personnels sur le territoire français pour y exercer leur activité professionnelle. D’autre part, les autorités russes sont les garantes de la viabilité du projet, en s’assurant de l’adéquation aux besoins du marché des conditions techniques et financières d’approvisionnement à long terme des lanceurs.
Au total, Soyuz en Guyane apparaît comme un exemple particulièrement réussi de la coopération entre la France et la Russie. Il marque aussi l’aboutissement de plus de quarante ans de coopération dans le domaine spatial entre nos deux pays, depuis la visite historique du Général De Gaulle à Baïkonour en 1966. Il donne surtout un nouvel élan à cette coopération, à un moment où, dans ce domaine comme dans beaucoup d’autres, les enjeux deviennent définitivement globaux.


Tous droits réservés ® La Lettre Diplomatique