La lettre diplomatique

Article – Indonésie
La Lettre Diplomatique N°78 – Deuxième trimestre 2007

« L’Indonésie, un ami et un acteur clé en Asie »

Par M. Philippe Louis-Dreyfus, Directeur Général du Groupe Louis Dreyfus, Président de Louis Dreyfus Armateurs, Président du Comité Indonésie de MEDEF International

Le Comité Indonésie de MEDEF International
Dans le cadre du Comité Indonésie que je préside depuis plus de cinq ans, nous travaillons avec les autorités politiques et économiques indonésiennes (gouvernement, parlement, Kadin, chefs d’entreprise indonésiens…) les institutions et les entreprises françaises pour la promotion des échanges et des investissements, mais également pour faciliter le développement d’un cadre légal transparent, stable et sécurisant pour les projets des entreprises. L’Indonésie est un ami, c’est également un acteur clé en Asie.
Notre action a été particulièrement soutenue ces deux dernières années. Nous avons rencontré à plusieurs reprises le Ministre Coordinateur de l'Economie, M. Aburizal Bakrie et Mme Mari Pangestu, Ministre du Commerce et également M. Hatta Radjasa, Ministre des Transports.
Avec les entreprises françaises, nous sommes également allés plusieurs fois en Indonésie, où nous avons rencontré le Président Susilo Bambang Yudhoyono (SBY) et certains ministres importants de son gouvernement ainsi que des chefs d’entreprise indonésiens de premier plan, que ce soit dans le cadre de la délégation que j’ai eu le plaisir de conduire, à l’occasion du déplacement de M. François Loos, ancien Ministre délégué au Commerce extérieur en Indonésie, du sommet infrastructures – initiative très positive du gouvernement indonésien – auquel nous participons et du Forum ASEAN que nous avons organisé avec la communauté française des affaires en Indonésie, à Jakarta en décembre 2005.
En 2006 et 2007, notre action est principalement concentrée sur l’avancement des projets des entreprises françaises et sur les moyens de faciliter et d’accélérer leur réalisation. Nous avons récemment accueilli une délégation de parlementaires indonésiens afin d’échanger sur les réformes et les nouvelles lois attendues par l’ensemble de la communauté d’affaires en Indonésie et les difficultés ou les retards qui gênent le secteur privé.

Promesses de perspectives positives pour l’avenir
Nous ne pouvons que nous réjouir, avec les entreprises françaises implantées de longue date en Indonésie, et qui y ont maintenu leur présence en dépit des périodes difficiles et du désengagement de nombreux investisseurs internationaux, du retour de la stabilité macro-économique, des appréciations positives portées sur l’efficacité de l’équipe gouvernementale et de la consolidation du processus démocratique.
La croissance économique progressera avec près de 6% en 2006 et 6,3% prévus en 2007, soutenue par la consommation qui représente 60% du PIB indonésien, bien qu’elle ne suffise pas à réduire la part du secteur informel, le chômage et la pauvreté.
Parallèlement aux points forts de l’économie indonésienne qui vont dans le sens d’une amélioration sensible de la perception du pays par la communauté internationale, nous ne pouvons ignorer que les grands groupes mondiaux, tout comme les PME, s’implantent et/ou développent des unités de production sur les marchés internationaux là où leurs investissements sont le mieux protégés et le cadre des affaires, le mieux garanti.
Notre part de marché reste faible (1,2%). Cette érosion est principalement liée à la concurrence des marchés européens et asiatiques (ASEAN et Chine) ainsi qu’à l’arrêt des grands contrats et au ralentissement des investissements français en Indonésie.
Bien que le contexte macro-économique (taux de croissance, inflation, assainissement budgétaire…) se soit sensiblement amélioré, l’investissement étranger en Indonésie est effectivement en baisse. Parmi les principaux obstacles à l’investissement, certains doivent être particulièrement soulignés : l’insuffisance du développement des infrastructures – lequel représente aussi d’un autre côté une opportunité pour les investisseurs – l’incertitude sociale, le manque de clarté du système légal et la décentralisation qui posent d’énormes problèmes et pèsent sur le climat des affaires.
Si l’Indonésie reste, par la taille de sa population, un acteur clé en Asie, la pression concurrentielle de la Chine et des autres économies de la région, tant sur les marchés intérieurs qu’extérieurs, place la réussite du processus de réformes comme enjeu majeur de la pérennité économique et sociale indonésienne.
Le gouvernement, conscient de ces déficits structurels, a engagé le pays dans un processus de réformes qui devraient permettre de renforcer la confiance, la coopération et l’investissement internationaux, vitaux à la poursuite de la croissance de l’économie. Les entreprises françaises ont des opportunités à saisir dès à présent pour l’avenir.
Nous ne pouvons que souhaiter que ces grands dossiers de réformes, autant que les projets des entreprises françaises, grandes, petites et moyennes, puissent voir des évolutions positives dans les mois à venir. Le soutien des autorités françaises, via l’aide au développement mais également par le biais des protocoles financiers (RPE, FASEP…) est également très important pour le renforcement des positions françaises en Indonésie.
J’aimerais conclure en faisant part d’un regret et en émettant un souhait :
Mon regret est dû à l’insuffisante présence politique et officielle de la France en Indonésie. Malgré les efforts déployés par les Conseillers du Commerce extérieur, MEDEF International et par nos dynamiques ambassadeurs, seuls deux ministres en activité ont témoigné de l’intérêt français en visitant officiellement l’Indonésie ces dernières années. Ceci est faible, surtout comparé aux nombreux déplacements ministériels dans d’autres pays de la zone. Il n’y a pas que la Chine, et l’Inde à un degré moindre, qui méritent attention.
Le souhait, il s’agit de la face positive du regret exprimé ci-dessus : je souhaite profondément que l’ASEAN en général et l’Indonésie en particulier soient d’avantage pris en considération ; l’Indonésie représente un énorme potentiel pour notre pays et ses entreprises. La qualité des produits et services de celles-ci parle d’elle-même. Les réussites de certains groupes dans ce pays – Total, Danone, Carrefour, Lafarge, Louis Dreyfus… pour ne citer que certains d’entre eux – le prouve assez. Il est seulement dommage de ne pas mieux profiter de la position assez unique de la France dans le monde, de l’indépendance politique qu’elle a affiché vis-à-vis d’autres grandes puissances et des énormes possibilités que représente le tissu de ses moyennes entreprises qui mériterait d’être mieux orientées et plus soutenues dans leur volonté de développement à l’étranger, en Asean en général et en Indonésie en particulier.


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