Au « pays de la rosée du matin » : 120 années de relations franco-coréennes
Par M. Maurice Blin, Sénateur, Président du Groupe d’amitié sénatorial France-Corée du Sud
Dans le récit de son périple à travers la péninsule coréenne en 1888-1889, publié dans la revue Le tour du monde [tome LXIII], le Français Charles Varat saluait l’importante modification obtenue grâce au traité conclu en 1886. « La Corée était naguère si absolument fermée au reste du monde, qu’en dehors des ambas-sades chinoises annuelles, sévèrement contrôlées,… nul ne pouvait y pénétrer sous peine de mort. (…) Aujourd’hui,… un simple passeport nous suffit… ».
En écho à cet enthousiasme, évoquons aussi les propos du sénateur Paul de Casabianca, dans son rapport1 du 8 février 1887, relatif à la ratification du traité de commerce franco-coréen de 1886. Constatant que l’ouverture du Royaume ermite est en cours avec les traités accordés dès 1882 au Royaume-uni, à l’Allemagne et aux Etats-Unis, Paul de Casabianca affirmait que l’objectif premier de ce traité était de créer des relations commerciales fortes, permettre la circulation des personnes et rompre l’isolement politique de ce pays.
Le 120ème anniversaire du début des relations entre nos deux pays doit nous permettre de nous souvenir de l’immense chemin parcouru par la Corée depuis la fin du XIXème siècle.
La période 1886-1904 fut riche en échanges politique, économique et culturel culminant lors de l’Exposition internationale de Paris de 1900 pour laquelle la France encouragea le gouvernement coréen à faire connaître son existence en Europe. Mais l’élan fut brisé par la tragédie que la péninsule coréenne connut à partir de 1905. Cet « âge obscur » ne s’acheva que le 15 février 1949 avec la reconnaissance officielle de la Corée par la France2.
Depuis 1959, la France et la Corée ont établi les bases d’une coopération économique active dont l’aboutis-sement fut l’inauguration, en avril 2004, du train coréen à grande vitesse (KTX) bénéficiant de la technologie du système TGV. L’accélération de nos relations bilatérales a franchi un nouveau pas en décembre 2004, lors de la visite du Président ROH Moo-huyn en France, avec l’institution d’un « partenariat global ».
La Corée du sud est ainsi devenue le troisième partenaire commercial de la France en Asie, et le quatrième investisseur étranger. La France, synonyme pour de nombreux coréens de culture, accueille 6 000 étudiants coréens ; le cinéma coréen a fait une percée notable sur notre territoire ; les projets de coopération scientifiques se multiplient (Institut Pasteur, recherche nanophotonique…). Il nous faut encourager toutes ces initiatives qui consacrent les liens privilégiés entre nos deux pays.
Le groupe d’amitié France-Corée du Sud est composé de vingt-cinq sénateurs qui adhèrent, à titre personnel, pour manifester leur intérêt au développement de relations avec leurs collègues de l’Assemblée nationale de la République de Corée. Accueillir les délégations officielles, diffuser les informations concernant la Corée du Sud auprès des autres parlementaires, bref soutenir toute action renforçant la coopération et l’amitié entre les deux nations, tels sont les buts du groupe.
Tradition et modernité sont les deux antiennes de ces relations. Malgré les vicissitudes politiques et la situation géostratégique actuelle, la jeune démocratie coréenne avance à grands pas. Bousculant les habitudes de la vieille Europe, elle développe même l’e-démocratie.
La France doit donc rester un spectateur attentif de ces évolutions et maintenir un haut niveau de contacts politiques afin que le traité de 1886 demeure l’acte fondateur d’une amitié durable entre nos deux nations.