Djibouti : Tête de pont de l’Afrique de l’Est sur le Moyen-Orient et l’Asie
Situé à l’extrême pointe de la Corne de l’Afrique, Djibouti a retrouvé une stabilité politique et un rôle géostratégique de premier plan dans le contexte de la lutte anti-terroriste internationale. S.E.M. Mohamed Goumaneh Guirreh, Ambassadeur de Djibouti en France, décline ici les aspirations de son pays à devenir une plate-forme majeure du commerce est-africain et son appréciation du processus de stabilisation régionale.
La lettre diplomatique : Monsieur l’Ambassadeur, dix ans après le début du processus de démocratisation, le multipartisme intégral a été introduit dans la vie politique djiboutienne. Compte tenu des résultats des élections législatives de janvier 2003 donnant la majorité au parti au pouvoir, une modification du scrutin n’est–elle pas, selon vous, nécessaire pour une représentation équitable de tous les partis politiques au Parlement djiboutien ? Dans ce contexte, la réconciliation nationale entre les populations afar et issa est-elle complètement achevée ?
S.E.M. Mohamed Goumaneh Guirreh : Oui, la paix est définitivement scellée entre les différentes composantes de la population djiboutienne. La preuve : il n’y a plus de rébellion dans le pays. Depuis, Djibouti s’est élevé comme terre de stabilité dans la Corne de l’Afrique et joue un rôle important comme médiateur pour la région. Ce qui est prévu, c’est une refonte des listes électorales avant la prochaine élection présidentielle en 2005.
L.L.D. : Octroyée en octobre 1999 par le FMI, le programme de la Facilité pour la lutte contre la pauvreté et la croissance (FRPC) prévoit la mise en œuvre d’importantes réformes structurelles. Quel est leur état actuel d’avancement ? Avec 40 à 75% de la population djiboutienne vivant en-dessous du seuil de pauvreté, autour de quelles mesures la politique nationale s’articule-t-elle dans ce domaine ? Quels efforts le gouvernement de Djibouti a-t-il entrepris pour améliorer son image en termes de respect des droits de l’homme, notamment à l’égard de la place de la femme dans la société djiboutienne et de la situation des réfugiés clandestins récemment expulsés ?
S.E.M.G.G. : Entre 1996 et 1999, le gouvernement s’est engagé avec les institutions de Bretton Woods à un accord de « Stand By » qui s’est poursuivi de 1999 à 2002, par un second accord appelé « Facilité pour la Réduction de la Pauvreté et la Croissance ». Ces deux accords ont permis de remettre l’économie djiboutienne sur des bases saines. Ces réformes structurelles en profondeur ont été réalisées grâce aux larges concessions que le peuple djiboutien tout entier a bien voulu consentir pour résorber une crise financière aiguë.
Toutefois, il nous reste à parcourir encore un long chemin pour sortir le pays de la faiblesse de la croissance économique et de la pauvreté. Nous nous sommes engagés à consolider les acquis et surtout à nous projeter dans une économie du troisième millénaire axée autour du futur port de Doraleh et de la zone franche.
Dans le cadre du programme soutenu par la Facilité pour la Réduction de la Pauvreté et la Croissance, l’économie djiboutienne a accompli de réels progrès.
La croissance du PIB a été estimée à 1,9% en 2001. En réalité, elle est supérieure à ces estimations. L’inflation est totalement maîtrisée. Elle n’a pas dépassée 1,8% en 2001. Le déficit commercial a été ramené à 30,7% du P.I.B. (35,5% en 2000).
Les grands équilibres ont été ainsi rétablis, ce qui a permis de minimiser la détérioration prévisible de la balance courante en 2002 (-7,5 milliards de francs Djibouti) du fait de la mise en route d’un important programme d’investissements publics et de l’augmentation des importations effectuées par les contingents militaires étrangers entre autres.
Ayant retrouvé une certaine stabilité macroéconomique, la République de Djibouti investit pour devenir une plaque tournante du commerce régional et une place de redistribution à l’image du port de Dubaï, qui reste notre modèle. Pour atteindre cet objectif, notre pays dispose de nombreux atouts :
– un port équipé d’installations modernes,
– un code des investissements offrant de nombreux avantages fiscaux,
– la construction d’un nouveau port (Doraleh) avec un tirant d’eau de plus de 20 m pour accueillir les plus gros navires,
– une extension du port sec existant pour répondre à l’accroissement du trafic,
– un réseau de télécommunications très moderne avec notamment la présence d’un câble sous-marin reliant l’Asie à l’Afrique et à l’Europe de l’ouest,
– une place financière sûre : inexistence de contrôle de changes et de redistribution de transferts de capitaux, ouverture de comptes bancaires dans toutes les monnaies.
Le point d’orgue des réformes économiques initiées pour lutter contre la pauvreté reste la concession du port de Djibouti à un groupe émirati, la Dubaï Port Authority. Le gouvernement a également engagé des réformes drastiques : libéralisation et privatisation. La concession de la gestion du port à un groupe privé fait partie de ces réformes.
La gestion de l’aéroport et celle de la zone franche ont également été confiées à un groupe privé. Et c’est Dubaï qui a été retenu pour ces trois entreprises publiques.
Cet émirat a été retenu pour sa longue expérience en matière de gestion d’entreprises publiques, et surtout pour bénéficier de délocalisations, car il y a à Dubaï, 2 200 entreprises internationales de distribution.
Il faut par ailleurs souligner que la bataille pour l’égalité entre les hommes et les femmes, garantie par la constitution depuis notre indépendance en 1977, est en passe d’être gagnée. La République de Djibouti vient de mettre au point une stratégie nationale pour l’intégration de la femme dans le développement. Celle-ci devrait permettre notamment une plus grande visibilité de la participation de la femme au développement national.
Longtemps négligée et soumise aux pesanteurs socio-traditionnelles, la promotion de la femme djiboutienne est l’une des préoccupations majeures du Président Ismaïl Omar Guelleh. Pour la première fois dans l’histoire politique du pays, sept femmes ont été élues députés le 10 juillet 2003.
Enfin, le 26 juillet 2003, la décision gouvernementale de résoudre la problématique de l’immigration clandestine a été rendue publique, le travail organisationnel et les mesures administratives et sécuritaires mis en place en collaboration avec le H.C.R. et l’Office National d’Assistance aux Réfugiés et Sinistrés (ONARS) ainsi que des représentants diplomatiques des pays limitrophes, ont permis des rapatriements volontaires massifs ainsi que des regroupements des demandeurs d’asile aux réfugiés d’Aouraoussa. Ce processus de refoulement de Djibouti a le mérite de se baser sur la concertation et le respect des droits humains, et le maintien de l’ordre et de la sécurité.
L.L.D. : Bénéficiant d’une position géographique de première importance, votre pays aspire à devenir un acteur majeur du commerce entre l’Afrique et l’Asie. Avec la privatisation de la gestion du Port autonome de Djibouti en faveur de Dubaï et le début de la construction du port de Doraleh, votre pays aspire-t-il à devenir le relais africain des Emirats Arabes Unis ?
S.E.M.G.G. : Les évènements mondiaux ayant fait accroître sa fonction géostratégique, notre pays aspire à devenir un acteur majeur du commerce entre l’Afrique et l’Asie. Après la déviation du trafic de transit commercial éthiopien, nous venons de bénéficier, grâce à la stabilité politique et macroéconomique de notre pays, du détournement du transbordement maritime initialement destiné au port d’Aden.
Ainsi le trafic de transbordement a augmenté de 69% entre février 2002 et février 2003. Par ailleurs, le trafic des mouvements des aéronefs a connu une croissance de 117% en l’espace d’une année.
La gestion du port a été confiée à Dubaï, car ce port arabe est devenu l’arrière-cour des grandes firmes internationales pour leurs opérations en Afrique de l’Est et des régions avoisinantes. Plus de 2000 entreprises internationales se sont installées dans sa zone franche, d’où elles expédient leurs marchandises et équipements dans toutes les régions avoisinantes, asiatiques comme africaines.
En confiant, la gestion de ses infrastructures aux autorités économiques du port émirati, le gouvernement de Djibouti a clairement montré vers quelle voie il entendait se diriger. Des investissements sont en cours, tant au niveau de l’accueil des conteneurs qu’à celui du traitement et du stockage du vrac. En 2002, la gestion de l’aéroport d’Ambouli a été confiée à la Dubaï Airport Authority, avec la perspective de la construction d’une nouvelle infrastructure dans les années à venir. Quelques mois plus tard, vint la concession de la zone franche aux mêmes autorités. Ces concessions ont été faites dans l’objectif d’accueillir quelques unes de ces milliers d’entreprises installées à Dubaï et qui sont intéressées par le marché africain. Il s’agit, en fait, d’une sorte de sous-traitance du port de Djibouti avec, comme hinterland, l’Ethiopie et la Somalie, mais aussi toute l’Afrique de l’est.
L.L.D. : Positionné comme un débouché naturel de la Comesa sur l’Océan indien, comment votre pays compte-t-il contribuer au renforcement de cet espace d’intégration régionale ? Quelles sont les mesures prévues pour l’application de la loi sur la concurrence que la Comesa doit adopter prochainement ?
S.E.M.G.G. : Il faut d’abord rappeler que le COMESA est un marché commun qui a été créé au sein des pays de l’Afrique de l’Est et Australe et qui regroupe 22 pays dont la République de Djibouti bien entendu. L’intégration économique dans le cadre du COMESA suppose une adaptation de notre fiscalité à celles de nos partenaires. Cette démarche devra enclencher dès la fin du mois de décembre 2004, la mise en place de la TVA en vue de remplacer la TIC et sauvegarder nos ressources par l’application du taux extérieur commun. Elle est destinée à uniformiser les droits de douane des pays signataires de l’accord. De même l’intégration régionale par adhésion au COMESA nous a engagé dans un dynamisme d’instauration du marché unique avec 22 pays et plus de 400 millions de consommateurs potentiels qui appellent à l’application de normes qui auront des retombées positives pour notre économie.
La République de Djibouti compte contribuer au renforcement du COMESA en créant les conditions pour la concrétisation de l’intégration des Etats membres. Son objectif est donc de trouver un débouché par lequel elle pourrait développer son économie de service. Son objectif est également de se développer et d’apporter sa contribution à l’épanouissement de l’ensemble des pays membres du COMESA.
La République de Djibouti a également demandé à abriter la cour de justice du COMESA. Djibouti y est candidat avec trois autres pays (le Kenya, le Malawi et le Soudan). Lors du précédent sommet, une commission a été mise sur pied pour voir si les pays candidats répondent aux critères préétablis. Les membres de cette commission ont répondu que tous les pays candidats répondaient aux critères de sélection.
Mais de notre point de vue, Djibouti a un avantage de plus, car il est le centre géographique des pays du COMESA. Qui plus est, il est un trait d’union entre les pays du Moyen-Orient et l’Afrique. Djibouti est donc en très bonne position pour abriter cette cour .
En vue de l’application de la loi sur la concurrence, il est prévu de créer un fonds de compensation et de coopération dont le but essentiel serait de compenser le manque à gagner des pays qui seraient impliqués dans des projets de développement du COMESA. L’intégration économique impliquant le retrait des barrières douanières, le libre-échange et la circulation des biens et des personnes, il va de soi que la perte de certains avantages est compensée par le fonds qui vient d’être mis sur pied.
L.L.D. : A la lumière de l’implication de Djibouti dans la conclusion des accords de paix d’Arta, son retrait du Comité technique de l’IGAD est-il un signe de désaveu à l’égard de la Conférence de paix somalienne ? La récente visite d’une délégation du Somaliland, où des élections présidentielles ont été organisées le 14 avril 2003, constitue-t-elle une reconnaissance de fait par Djibouti de cette république auto-proclamée ou tout au moins de la partition irréversible du territoire somalien ?
S.E.M.G.G. : La République de Djibouti s’est retirée du comité technique de l’IGAD en charge de la Conférence de réconciliation somalienne de Naïrobi.
La décision djiboutienne a été motivée par l’échec du Comité technique de l’IGAD à aider les Somaliens à résoudre leurs différends.
Le comité technique, composé de Djibouti, de l’Ethiopie et du Kenya, a été mandaté par l’IGAD, lors de la Conférence ministérielle tenue en janvier 2002 à Khartoum au Soudan, pour faciliter les discussions entre les Somaliens, en leur offrant un climat propice au dialogue et à la réconciliation, dans le but de former un gouvernement à base élargie.
Pour nous, le Comité technique et plus particulièrement son président, s’est très vite posé en négociateur faisant perdre à cet organe son statut d’entité neutre.
Le processus s’est encore davantage éloigné des objectifs fixés, lorsque par exemple, le Kenyan Kipligat qui dirige les pourparlers intersomaliens a dissout le Comité consultatif composé de personnalités somaliennes neutres telles que Abdirazak Haji Hussein, Abdilkader Aden, ou Mohamed Sheikh, dont le rôle précieux a été retenu par le Comité technique et par la communauté internationale.
Les intellectuels somaliens qui cherchaient à offrir leurs services pour la réussite du processus, ont été également écartés.
Les conclusions du Comité d’arbitrage composé de sages somaliens, dont la mission était d’aider à la résolution des problèmes, ont été négligées. Les appels de la République de Djibouti et des acteurs externes concernés par la Somalie, n’ayant pas été entendus, nous nous sommes résolus à nous retirer du comité technique de l’IGAD.
Pour ce qui est de la visite à Djibouti de la délégation du Somaliland, le jeudi 25 septembre 2003, celle-ci s’inscrivait dans un cadre de bon voisinage et de renforcement des liens de coopération. Lors de cette visite, ont été abordés la situation des frontières des deux pays et notamment le programme de refoulement des personnes en situation irrégulière entrepris par la république de Djibouti.
L.L.D. : Fort du rôle qu’occupe Djibouti comme pays hôte des réunions tripartites entre la Mission onusienne (MINUEE), l’Ethiopie et l’Erythrée, comment percevez-vous les difficultés actuelles que rencontre le marquage des frontières ethio-érythréennes ? Ne craignez-vous pas un regain de tension entre ces deux pays ?
S.E.M.G.G. : Le processus de démarcation des frontières résultant de l’accord de paix global entre l’Ethiopie et l’Erythrée a été reporté sine die selon la Mission de l’Onu en Ethiopie et en Erythrée alors qu’il devait débuter en octobre 2003, car l’Ethiopie avait rejeté les recommandations faites par la Commission chargée du tracé des nouvelles frontières, bien que les décisions de la dite commission obligent normalement les parties à les appliquer. Nous espérons que les deux parties se remettrons rapidement autour d’une table.
L.L.D. : En établissant une base militaire au Camp Lemonier, les Etats-Unis ont ouvert un second front pour la lutte contre le terrorisme. Quelles sont les modalités de la coopération américano-djiboutienne ? Ce choix stratégique implique-t-il de nouveaux apports en matière d’assistance financière ?
S.E.M.G.G. : La présence américaine est un atout indéniable pour l’économie djiboutienne. De nombreux emplois ont été créés suite à l’arrivée des Américains. Par exemple, ceux-ci sont en train de construire de nouvelles infrastructures au port et à l’aéroport. Début novembre 2003, le Ministre des Affaires étrangères et de la Coopération Internationale de Djibouti et l’Administrateur de l’USAID ont paraphé un protocole de partenariat accordant une enveloppe de 20 millions de dollars à la République de Djibouti. Cette aide est destinée principalement aux secteurs de la Santé et de l’Education. Ainsi les Etats-Unis nous ont fourni et nous fournissent encore une aide importante en logistique militaire et en formation des ressources humaines.
L.L.D. : Pays membre de la Ligue arabe, Djibouti a manifesté ces dernières années sa volonté de redynamiser les relations avec les pays arabes. En dehors du Qatar, du Yémen et récemment de la Libye, avec quels autres pays arabes la coopération de Djibouti s’est-elle intensifiée ?
S.E.M.G.G. : C’est surtout avec les Emirats arabes unis que notre coopération s’est intensifiée ces dernières années. Ce pays considère que Djibouti a un avenir prometteur et à ce titre, il est prêt à y investir et à coopérer de façon constructive avec nous.
L.L.D. : La diplomatie djiboutienne s’est également ouverte à des partenaires non-traditionnels comme la Chine, le Japon et l’Inde. Dans ces conditions, l’Asie est-elle une zone porteuse pour votre pays en terme de coopération et de développement économique ? Quelles sont vos attentes à l’égard de la TICAD III qui s’est tenue à Tokyo en septembre 2003 ?
S.E.M.G.G. : Tout à fait, l’Asie est une zone porteuse pour notre pays en terme de coopération et de développement économique. Pour ce qui concerne la Chine, la République de Djibouti entretient des relations diplomatiques depuis son indépendance ou presque. Du 20 au 26 mars 2001, le Président de la république de Djibouti, S.E.M. Ismaïl Omar Guelleh a effectué une visite d’Etat en République populaire de Chine. Lors de cette visite, ont été paraphés trois accords de coopération d’une portée significative :
– le premier portait sur l’octroi d’un don de 30 millions de Yuan (690 millions de Francs Djibouti) qui a été consacré à la réalisation de projets de coopération économique et technique.
– Le deuxième accord concernait un prêt à taux préférentiel de 100 millions de Yuan (2,3 milliards de francs djibouti) pour la réalisation de projets de coopération du secteur privé en partenariat avec des entreprises chinoises.
– Le troisième accord avait trait à l’annulation partielle de la dette chinoise vis-à-vis de Djibouti à hauteur de 35,91 millions de Yuan (825 millions de francs djibouti).
La contribution japonaise au développement de Djibouti est également très importante. L’ensemble des projets finalisés entre 1999 et 2001 confirment la vitalité de la coopération djibouto-japonaise. Celle-ci a privilégié la promotion des secteurs social, sanitaire et éducatif :
– le réaménagement des locaux médicaux de la maternité Dar el Hanan,
– la réfection des égouts et canalisations du centre anti-tuberculeux Paul Faure,
– l’octroi d’appareils médicaux évalués à 251 millions de francs djibouti,
– la fourniture de vaccins et de matériel à l’usage de la santé maternelle et infantile (165 millions de fd),
– la construction du collège Fukuzawa à Djibouti-ville, et celle de trois écoles à l’intérieur du pays,
– la réfection des infrastructures routières de la capitale et de Dikhil,
– l’agrandissement de la Radio Télévision de Djibouti,
– la réalisation de projets agropastoraux.
– Le Projet « NERICA » ou nouveau riz africain.
Suite à la visite du Président Ismaïl Omar Guelleh, en mai 2003, la République de Djibouti a établi des relations diplomatiques avec l’Inde. Celles-ci seront bientôt matérialisées sous la forme d’une représentation diplomatique. A l’occasion de cette visite, ont été signés une série d’accords de coopération et notamment l’octroi par l’Inde d’une ligne de crédit d’un montant de 10 millions de dollars pour la construction d’une cimenterie à Ali-Sabieh, et celle d’un million de dollars destinée à l’assistance humanitaire dans le cadre de la lutte contre la sécheresse. Dans ces conditions, la coopération de l’Asie est plus active.
Nous attendons, en outre, beaucoup de la TICAD III. Nous espérons que la réflexion menée lors de cette conférence permettra le retour des investissements extérieurs et la consolidation des rapports d’entraide et de solidarité entre le Nord et le Sud, afin de nous mettre sur la voie d’un véritable développement durable.
L.L.D. : Alors que la première mission de l’Euromarfor dans le cadre de l’opération antiterroriste « Enduring Freedom » a été lancée le 18 septembre 2003 sous commandement français, comment percevez-vous la politique française, et plus largement de l’Europe, en matière de lutte contre le terrorisme dans la Corne de l’Afrique ? Plus globalement, quelles sont les perspectives du développement des relations entre votre pays et l’Union européenne ?
S.E.M.G.G. : La politique européenne, en matière de lutte contre le terrorisme, est bien coordonnée, en tout cas à Djibouti, et les missions se déroulent dans une bonne ambiance. La conjoncture internationale nous aura permis de développer une approche prospective avec la République Fédérale d’Allemagne et avec l’Espagne.
Notre coopération avec l’Europe serait plus importante, si les entreprises européennes pouvaient, par exemple, s’installer en masse dans la zone franche de Djibouti, d’où elles expédieraient leurs marchandises et équipements dans toutes les régions avoisinantes.
L.L.D. : Ancienne colonie française, Djibouti s’est efforcée de conserver depuis son indépendance d’excellentes relations avec Paris, renouvelées à l’occasion de la visite officielle en France, en octobre 2002, du Président Ismaël Omar Guelleh. Dans quels domaines, notamment en matière de coopération, les relations franco-djiboutiennes peuvent-elles encore être approfondies ?
S.E.M.G.G. : Les relations franco-djiboutiennes sont en train d’être approfondies sur le plan universitaire par exemple.
Le 2 novembre 2003, le Ministre djiboutien de l’Education nationale et de l’Enseignement supérieur , M. Abdi Ibrahim Absieh, et M. Patrick Roussel, Ambassadeur de France à Djibouti, ont paraphé un important accord : un protocole de partenariat entre l’Université d’Amiens et l’Education nationale. Cet accord de partenariat fait suite à la visite officielle en France du Président de la République de Djibouti en octobre 2002.
La signature de cet accord témoigne de la volonté commune des deux pays d’élargir et de renforcer leur coopération dans le domaine de l’Education et de l’Enseignement supérieur. Ce partenariat devrait permettre notamment une intensification des échanges d’expertise, un renforcement de la documentation pédagogique, la formation des cadres djiboutiens ainsi que l’appui et le soutien à l’animation de la vie scolaire et universitaire.
Il est également prévu des partenariats en matière de santé : jumelage d’hôpitaux, missions ponctuelles de spécialistes à Djibouti.
L.L.D. : A l’aune du poids économique de la présence militaire française à Djibouti, quel est le sens de la révision du statut financier et fiscal des Forces françaises de Djibouti (FFDJ) ? S’agit-il d’une mesure compensatoire à l’égard de la réduction des effectifs militaires français dans votre pays ? Dans quelle mesure votre pays reste-t-il attaché à son appartenance à l’espace francophone et comment celui-ci continue-t-il à contribuer au développement de Djibouti ?
S.E.M.G.G. : La révision du statut financier et fiscal des forces françaises stationnées à Djibouti est bien sûr à relier au redéploiement du dispositif militaire français stationné à Djibouti qui a vu passer les effectifs de 4000 à 2800 hommes, et à ses répercussions négatives sur l’économie locale.
Lors de sa visite officielle en France, le Président de la République de Djibouti, a demandé à la France d’essayer de pallier de la meilleure façon qui soit, à ce manque à gagner. Suite à cette visite, a été signée une nouvelle convention relative au statut financier et fiscal des Forces Françaises Stationnées à Djibouti.
En outre, la République de Djibouti reste bien sûr attachée à l’espace francophone, car elle est un îlot francophone dans cette mer anglophone qu’est la région est-africaine. Mais la mondialisation obligeant, notre pays est contraint d’élargir le champs de ses partenariats économiques et politiques.
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