La lettre diplomatique

Entretien – Luxembourg
La Lettre Diplomatique n°77 – Premier trimestre 2007

Héraut du modèle européen

 Père fondateur de l’UE, le Luxembourg reste au cœur du processus de construction européen. Il a fait de la Grande Région le cadre pionnier d’une  coopération transfrontalière et interrégionale réussie, célébré par les manifestations de la capitale  européenne de la culture qu’organisent Luxembourg en 2007. Ambassadeur du Grand-Duché de Luxembourg, M. Hubert Wurth revient ici sur les atouts que lui confèrent à son pays son dynamisme diplomatique ainsi que son excellence financière et industrielle pour affirmer sa voie sur l’avant-scène européenne.

 

 La Lettre Diplomatique : Monsieur l’Ambassadeur, Luxembourg est désignée en 2007 capitale européenne de la culture. Associant les régions limitrophes de Lorraine, Wallonie, Rhénanie-Palatinat et Sarre, cette manifestation entend « dépasser les frontières ». Comment votre pays envisage-t-il de mettre en valeur à cette occasion la vocation du Luxembourg à se poser en carrefour culturel de l’Europe de l’Ouest ? 

 Monsieur Hubert Wurth : Situé à un carrefour, sans l’avoir choisi, le Luxembourg a su utiliser cette prise en tenaille au cours des 60 années de paix que nous venons de connaître pour assurer son développement de manière indépendante et à travers sa souveraineté. Notre participation à l’Union européenne nous a énormément aidé. Avec plusieurs centres d’activités régionaux ou internationaux, éparpillés autour de nous, en Belgique, en France ou en Allemagne, nous sommes attachés à rester ce que nous sommes, un espace propre et intermédiaire, et celui-ci est devenu en ce début du XXIème siècle le moteur économique d’une grande région. Centre géographique, la vocation du Luxembourg sera de donner davantage de consistance à cette « Grande région ». Parmi les instruments à notre disposition figurent la diversité culturelle, la qualité de nos échanges et de nos expériences respectives.

 L.L.D. : De par sa position géographique, votre pays joue traditionnellement un rôle de premier plan dans la construction européenne et, plus spécifiquement, pour favoriser le bon fonctionnement du « moteur franco-allemand ». Quelle nouvelle donne l’élargissement européen introduit-il de ce point de vue pour la diplomatie luxembourgeoise ? Comment abordez-vous les grands dossiers de la présidence allemande de l’Union européenne ? Au-delà, comment définissez-vous le rôle du Luxembourg au sein de l’Europe élargie ? 

 H.W. : L’élargissement de l’Union européenne de quinze à aujourd’hui 27 membres est non seulement la réparation d’une injustice, la correction d’un ordre insupportable, mais encore l’illustration d’une solidarité européenne en devenir. Indéniablement, ces élargissements ont suscité des réactions de réserve, voire de rejet, mais les gouvernements de nos différents pays ont su faire prévaloir la générosité et la solidarité. Pour autant, des malentendus subsistent, et le problème pénible des délocalisations en témoigne. Un petit pays comme le Luxembourg peut essayer d’arrondir certains angles, mettre de l’huile dans les rouages et appuyer les efforts de la présidence du Conseil des ministres. D’autres s’y mettent aussi, et nous réussirons à canaliser les plus graves sources de tension. Par la multitude des participants, les coalitions et la diversité, nous réussirons aussi à convaincre les partenaires les plus réservés ainsi que les citoyens, dans les plus grands pays et dans les autres, de leur intérêt à participer à cette dynamique. Aux yeux des Luxembourgeois, la question de l’élargissement a été vue dès le départ comme une chance, une opportunité que nous avons eu raison de saisir.

 L.L.D. : Le gouvernement luxembourgeois était à l’initiative avec le gouvernement espagnol de la réunion des 18 Etats membres ayant ratifié le Traité constitutionnel à Madrid le 26 janvier dernier. Deux ans après l’échec du referendum sur ce traité en France et aux Pays-Bas, comment le projet constitutionnel peut-il être relancé ?

 H.W. : Il fallait relancer le débat et faire entendre la voix de ceux qui ont dit « oui ». Le projet constitutionnel ne doit pas forcément être relancé par le recours réitéré à ce vocable. L’essentiel, c’est de mettre en œuvre les améliorations pratiques et de permettre davantage d’efficacité par davantage de coopération, respectueuse des personnalités des uns et des autres. Car si les notions de liberté et de responsabilité forment une paire, comme aussi les droits et les devoirs, il en va sans doute de même des notions de respect et de coopération. Je citerais l’auteur allemand Erich Kaestner : « es gibt nicht Gutes, ausser man tut es » (il n’y a pas de bon résultat, à moins que l’on ne s’y mette).

L.L.D. : Le rejet du Traité constitutionnel traduit, en quelque sorte aussi, un mécontentement à l’égard des institutions européennes qu’illustrent également la montée de l’extrême droite dans plusieurs pays européens mais aussi la désaffection à l’égard de l’Euro. Comment le sentiment d’appartenance et de confiance en l’Union européenne peut-il, selon vous, être approfondi ?

 H.W. : Les Luxembourgeois considèrent l’Euro comme une avancée fondamentale. Hélas, parfois nous prenons l’habitude d’opposer les mouvements d’opinion et la démocratie représentative. Or, cela me paraît une absurdité. La démocratie représentative ne saurait faire l’économie d’être en étroit contact avec les mouvements d’opinion, avec les couches de la population qui sont politiquement actives, comme avec celles plus discrètes. Et les mouvements d’opinion, à travers les canaux de la société civile, ne doivent pas confondre des aspirations idéalistes avec ce qu’il est possible de faire. Peut-être que les mouvements d’opinion et la démocratie représentative devront accepter davantage la rencontre des idées et l’apprentissage réciproque. Une évolution se fera à travers un travail de communication, peut-être sur plusieurs années, qui pourrait provoquer à l’occasion des turbulences. Pourtant, la communication entre les citoyens et entre les sociétés européennes ne doit-elle se faire, même à ce prix ?

 L.L.D. : Le Premier ministre Jean-Claude Juncker a été reconduit en septembre 2006 dans ses fonctions de Président de l’Eurogroupe jusqu’en 2008. Premier Président permanent de cette organisation, quelles sont ses priorités pour rendre plus efficace la coordination des politiques économiques au sein de la zone euro ? Quel regard portez-vous sur les critiques qui ont pu être émises à l’égard de la politique monétaire de la Banque centrale européenne (BCE) ?

 H.W. : Le premier président de l’Eurogroupe bénéficiant d’un mandat long serait sans doute heureux de voir reconnue plus largement l’immense performance que fut la création de l’Euro et les effets protecteurs ainsi introduits dans le fonctionnement des économies au quotidien. Au-delà, nous devons convenir que c’est son regard qui compte et ce sera à lui-même s’il le souhaite, d’exprimer ses sentiments, tant à l’égard de la coordination des politiques économiques au sein de la zone euro qu’à l’égard de la politique monétaire de la BCE.

 L.L.D. : Berceau de la Communauté européenne du Charbon et de l’Acier, votre pays a réussi sa transition économique en se dotant d’un solide secteur financier qui assure depuis trois ans, la reprise d’une croissance soutenue atteignant 5,5% en 2006. Quelles mesures votre gouvernement privilégie-t-il pour pérenniser ce dynamisme économique ? Comment compte-t-il encourager le développement d’autres secteurs d’activités, aux côtés de la finance et de la sidérurgie ?

 H.W. : Une vigilance de tous les instants et de  la part de l’ensemble des acteurs économiques est indispensable dans une économie relativement petite et fragile, parce qu’exposée à tous les vents. Cette vigilance ne peut continuer que si le citoyen reste apte à remettre en question des habitudes parfois enracinées, à entretenir la souplesse, à pratiquer une observation attentive pour apprendre des expériences d’autrui et, enfin, à bien réfléchir avant d’aller de l’avant. Une manière de se renouveler et de se diversifier devrait pouvoir surgir plus aisément à l’intérieur d’une communauté aux dimensions modestes, mais pour autant personne n’est immunisé contre la léthargie ou la suffisance.

 L.L.D. : Si les créations d’emplois sont en hausse au Luxembourg, le chômage continue également d’augmenter, affectant en particulier les résidents luxembourgeois. Quelle approche votre gouvernement a-t-il adopté pour répondre aux inadéquations du marché du travail national ? 

 H.W. : Le chômage dans notre pays connaît des spécificités que le gouvernement étudie notamment en coopération avec des experts internationaux, avec ceux de l’OCDE par exemple. Des améliorations d’ordre technique sont en voie d’être dégagées. Les aspects humains liés à la détresse que répand autour de lui le chômage requièrent une stratégie bien ciblée. Un Etat, aussi prospère soit-il, ne peut se permettre d’accepter la sortie de la société active de catégories entières de la population. Notre approche sera de refuser toute fatalité et de nous focaliser sur la formation.

 L.L.D. : Les investissements étrangers ont, plus particulièrement, été identifiés comme un facteur-clé de création d’emplois par le Premier ministre luxembourgeois. De quels atouts, tant sur le plan réglementaire qu’économique, le Luxembourg dispose-t-il à cet égard ?

 H.W. : Les ministres luxembourgeois de l’économie se sont attelés à la tâche depuis plusieurs décennies, depuis les années 60 à vrai dire. Plusieurs vagues d’investissements étrangers ont pu être observées au fil du temps, et bien sûr nous avons pu nous rendre compte que certaines situations hier avantageuses se transformaient en rigidité désagréable aujourd’hui. Plusieurs vagues de remise en cause furent indispensables, et ce mouvement ne manquera pas de se poursuivre. Depuis plusieurs années, nous relevons que les frais accessoires rattachés au salaire restent d’un niveau très bas chez nous, et l’un de nos défis sera de veiller à ce que cet attrait ne se perde pas. Parmi nos atouts, nous devons évidemment mentionner aussi notre capacité à agir vite, celle d’élaborer nos propres lois et la grande cohésion sociale du Luxembourg.

 L.L.D. : Membre fondateur du Groupe d’action financière (GAFI), pourriez-vous nous rappeler les progrès obtenus par votre pays en matière de lutte contre le blanchiment d’argent ? Comment s’articule l’entraide judiciaire entre votre pays et la communauté internationale ? Plus largement, quelle contribution le Luxembourg peut-il apporter pour parvenir à neutraliser les systèmes de financement des réseaux terroristes ? Que suggère-t-il techniquement pour accroître l’efficacité des mesures prises à l’échelle internationale dans ce domaine ?

 H.W. : Le Luxembourg participe à l’ensemble des efforts mis en œuvre en vue d’enrayer les financements de nature criminelle ou terroriste, que ce soit à l’intérieur de l’Union européenne ou encore au niveau international. L’entraide judiciaire fonctionne. Une efficacité accrue des mesures prises à l’échelle internationale découlera d’une meilleure entente, d’une meilleure compréhension réciproque des contraintes et d’une coopération améliorée en vue de saisir les situations particulières.

 L.L.D. : En participant en 2003 à l’opération « Concordia » dans l’Ancienne République yougoslave de Macédoine (ARYM), votre pays a marqué sa volonté de contribuer à la Politique européenne de sécurité et de défense (PESD). Vous avez occupé entre 1996 et 1998 le poste d’Ambassadeur en mission spéciale pour les pays de l’ex-Yougoslavie. Au regard des incertitudes sur le futur statut du Kosovo et de la forte percée de l’extrême droite en Serbie, quelles sont, selon vous, les perspectives de stabilisation des Balkans ? 

 H.W. : Dans le passé, le Luxembourg a été victime de conflits internationaux et il est aujourd’hui très intéressé à promouvoir l’émergence d’une véritable politique européenne de sécurité et de défense commune. Pour autant, l’attention ne doit pas être portée uniquement vers l’action internationale. N’oublions pas que la plupart des conflits sont aujourd’hui d’origine interne. Que les acteurs soient petits ou grands, tous peuvent fournir une contribution positive pour mieux expliquer l’urgence et ramener vers les enceintes politiques les conflits qui risquent de monter en puissance et de finir dans la violence et le sang. Ne laissons pas seules des populations dont les émotions se trouvent exacerbées et qui risquent de déborder. Il est clairement de la responsabilité de l’Europe de s’efforcer à stabiliser les pays situés en Europe comme ceux des Balkans, mais aussi au-delà de l’Europe. Cela dit, c’est incontestablement la communauté internationale qui est interpellée dans son ensemble.

 L.L.D. : Depuis le 30 juin 2005, votre pays est membre à part entière de l’Agence spatiale européenne (ESA). Quels facteurs ont-ils motivé cette adhésion ? Comment définiriez-vous la participation du Luxembourg au développement de la politique spatiale de l’UE ? 

 H.W. : Le Luxembourg est devenu membre de l’Agence parce que nos acteurs économiques et scientifiques tiennent à participer aux activités de recherche dans le domaine spatial, et notamment aux programmes que lance l’ESA. Cette adhésion traduit aussi le souci de prendre part à la coopération européenne dans tous les domaines. L’exemple de la Société européenne des Satellites (SES) montre amplement que des entreprises luxembourgeoises sont dynamiques et remportent des succès dans les activités de l’espace.

 L.L.D. : La relance des relations transatlantiques après les divergences provoquées par la crise irakienne est intervenue sous la présidence luxembourgeoise de l’UE, avec la visite à Bruxelles du Président George W. Bush en février 2005. Comment percevez-vous l’évolution du dialogue entre Washington et Bruxelles depuis lors ?

 H.W. : L’évolution du dialogue entre les Etats-Unis d’Amérique et l’Union européenne est favorable, et le sentiment d’une plus grande confiance se dégage. Nous ne pouvons faire autrement que de nous rendre compte qu’entre ces deux grands acteurs internationaux existe une communauté de destins. Mais pour autant nous devons constamment renouveler l’effort de nous écouter et de coopérer.

 L.L.D. : La politique étrangère luxembourgeoise s’efforce d’élargir ses champs d’action en accordant une grande importance à l’aide au développement. Quels en sont les principes et les priorités ? En votre qualité de Représentant du Luxembourg auprès de l’OCDE, quelle analyse faites-vous des défis du dialogue Nord-Sud, mais aussi de l’impact économique du défi climatique ? 

 H.W. : L’urgence du développement est reconnue de plus en plus largement, mais désormais aussi à l’intérieur des différentes opinions publiques européennes. L’impact du développement pour les questions climatiques, et vice-versa, vient d’être réaffirmé lors des récentes conférences de Paris sur les questions d’environnement. Mais le Luxembourg ne découvre pas ces thèmes : lors de la Conférence de Kyoto, il était le porte-parole des pays de l’Union européenne (car il assumait la présidence du Conseil des Ministres à l’époque) et il s’est fortement impliqué avec l’ensemble des autres pays européens. En matière de développement, nous avons été en 2000 le premier pays, après une longue pause internationale, à atteindre un niveau de 0,7% du RNB (revenu national brut) consacré à la coopération au développement. Notre pourcentage s’établit aujourd’hui à 0,88% (première estimation pour 2006). A Paris, l’OCDE et l’UNESCO s’occupent de manière efficace de la problématique du développement et le Luxembourg coopère étroitement avec ces organisations. Les défis du dialogue Nord-Sud sont au cœur de notre avenir, les pays développés ne pouvant en aucune manière faire l’économie de reconnaître leur dépendance à l’égard de ce grand devoir international. C’est une question de survie pour tous les pays du monde.

 L.L.D. : Le Luxembourg a développé, notamment dans le cadre de la « Grande Région », une coopération transfrontalière originale dont l’illustration la plus accomplie réside dans le domaine de la sécurité. Quels sont les résultats de cette coopération policière dont le bureau de coordination siège à Luxembourg et comment peut-elle être renforcée ? Au-delà, comment évaluez-vous l’apport des échanges transfrontaliers, notamment sur plan du travail pour l’économie luxembourgeoise ?

H.W. : Les échanges transfrontaliers ont atteint aujourd’hui une dimension inouïe et leur progression se poursuit. L’élément le plus spectaculaire en est le chiffre global des travailleurs qui se déplacent vers le Luxembourg tous les jours, se situe désormais aux alentours de 115 000 (en 2005). Il est naturel qu’il s’en dégage toute une série de coopérations dans les domaines techniques et administratifs. Sans doute que la coopération dans le domaine de la sécurité et de la police se voit accorder une valeur emblématique, alors que l’attention de nos populations se focalise facilement sur ces problèmes. Toutes ces formes de coopération sont des aspects mélant le côté humain et l’efficacité. Elles méritent d’être développées et approfondies, alors que nous sommes conscients que l’économie luxembourgeoise et les économies des régions voisines sont devenues inextricablement interdépendantes.

 L.L.D. : Le TGV-Est qui relie Paris à Luxembourg, entrera en service en juin prochain. Comment évaluez-vous l’impact socio-économique de cette nouvelle infrastructure ? Plus largement, dans quels secteurs d’activités votre pays et la France peuvent-ils encore renforcer leurs échanges économiques ?

 H.W. : Grâce au TGV-Est qui reliera Luxembourg à Paris, et vice-versa, les deux capitales pourront être rejointes en un peu plus de deux heures de centre ville à centre ville. A partir de l’été 2007, une situation nouvelle émergera ainsi, car aucune autre grande capitale ne sera aussi proche de Luxembourg. Certes Bruxelles est également à deux heures (de route) de Luxembourg, mais encore faudra-t-il faire le choix de la voiture. Sans aucun doute, le TGV sera un succès populaire, même si le prix des billets sera dorénavant plus élevé. De manière plus générale, il s’en dégagera sans doute un meilleur ancrage entre le Luxembourg et la France ainsi que la francophonie. Car le Luxembourg et la France peuvent encore renforcer leurs échanges économiques, même si nous constatons d’ores et déjà une évolution très positive depuis quelques années. Il faut relever à cet égard que la France est notre deuxième partenaire économique.

 L.L.D. : Les relations franco-luxembourgeoises sont empreintes d’une grande proximité et de fréquentes rencontres au plus haut niveau des deux Etats. Tenant compte des prochaines échéances électorales en France, comment sont appelées à évoluer les relations entre les deux pays ? Quel bilan pouvez-vous faire des accomplissements du Premier ministre Jean-Claude Juncker et du Président Jacques Chirac, arrivés tous deux aux affaires en 1995, tant sur le plan de la coopération bilatérale qu’en faveur de la construction européenne ?

 H.W. : L’Histoire européenne doit beaucoup à la France et à sa créativité en matière politique. Le Luxembourg n’oublie évidemment pas que l’initiative de lancer la construction européenne est venue de France le 9 mai 1950, à travers l’appel de Robert Schuman, le ministre français des Affaires étrangères de l’époque, qui agissait en étroite concertation avec Jean Monnet. Notre pays a été tout de suite disposé à suivre la proposition de ce grand Français, que nous connaissions évidemment fort bien puisqu’il est né au Luxembourg. La coopération en matière européenne entre la France et le Luxembourg est à la fois ancienne et naturelle, et il ne sera pas aventureux de la faire remonter au Moyen-âge : plusieurs souverains luxembourgeois, dont les empereurs Henri VII et Charles IV de Luxembourg, ainsi que Jean l’Aveugle, mort à Crécy dans les rangs français, avaient une politique d’alliance avec la France. Le Président Jacques Chirac, et notre Premier ministre Jean-Claude Juncker se sont bien entendu placés dans cette perspective historique. Au cours de la dernière décennie, ils ont en effet travaillé main dans la main pour promouvoir la cause européenne à travers des dossiers parfois très techniques et d’autres d’une grande portée symbolique. L’introduction de l’euro fait certainement partie de la liste de leurs grands succès. Mais ne m’en veuillez pas si je ne tente pas de faire un bilan.
L’Europe est une œuvre inachevée. Le travail des années 1990 et du début du XXIème siècle aura été indispensable, et l’avenir se construira forcément sur le résultat de ces efforts. Je suis convaincu que d’ici quelques années nous serons bien mieux en mesure de comprendre la valeur de cet œuvre. Pour autant, nous savons d’ores et déjà que la coopération entre la France et le Luxembourg se poursuivra et s’intensifiera encore après l’été 2007.


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