Par Mme Jacky Deromedi 1, Sénateur représentant les Français établis hors de France, Vice-Présidente du Groupe d’amitié sénatorial France-Asie du Sud-Est, Présidente de la section des Conseillers du commerce extérieur de la France à Singapour, Présidente de la Saison européenne « Encore »
Le mot d’ordre de Singapour depuis son origine est le « développement ». Singapour présente des singularités. Petit par la taille, grand par la richesse et l’excellence dans tous les domaines. C’est aussi un laboratoire d’idées : on regarde ce que font les autres, ce qui a conduit à des succès et ce qui a échoué, puis l’on prend le meilleur et on l’améliore. Partis du constat qu’un « micro-État » ne peut se développer que s’il suit une ligne directrice claire, les dirigeants de Singapour planifient des « objectifs à 20 ans » et identifient les moyens nécessaires pour y parvenir. Dans cette optique, ils se sont d’abord concentrés sur l’économie, puis le rayonnement diplomatique, puis la santé. Ils y ont ensuite ajouté l’éducation et, pour finir, la culture. Ils abordent désormais le volet social avec beaucoup de précaution. C’est en respectant scrupuleusement cet ordre et leurs priorités dans ces domaines qu’ils ont réussi à faire d’un comptoir marchand insignifiant dans les années 1960, un partenaire de référence pour tout État, toute société, tout entrepreneur à vocation internationale. À l’heure où la France croule sous les normes, les codes, les contraintes sociales, juridiques et fiscales, Singapour a la sagesse de se remettre en cause constamment. Leur seule préoccupation est « est-ce bon pour Singapour ? ». La seule question qui se pose demeure « a-t-on identifié les moyens d’y parvenir ? ». Avec une réaction d’application immédiate « du jour au lendemain » et avec parfois un « effet rétroactif », sans prendre en compte « les acquis ». La population, extrêmement nationaliste et disciplinée, ainsi que les acteurs économiques sont informés de ces changements. Ils peuvent participer à l’élaboration des décisions et sont entendus dans leurs éventuelles demandes d’ajustement dès lors que celles-ci sont considérées comme bénéfiques et productives. Pour Singapour, les priorités sont le succès économique du pays, le bien-être des Singapouriens et la sécurité. On y est libres, égaux en droits et en devoirs, unis dans l’intérêt de la nation. C’est leur triptyque « liberté, égalité, fraternité ». Les investisseurs étrangers y sont très bien accueillis. Plusieurs agences gouvernementales, dont la plus connue est l’Economic Development Board (EDB), leur ouvrent toutes les portes et participent même à leurs investissements locaux, à partir du moment où ils apportent de la technologie, de l’emploi, de l’enrichissement pour le pays et pour les Singapouriens. À l’heure du tout libéral, Singapour est l’exemple réussi de dirigisme économique pragmatique. Il est aujourd’hui l’État où la qualité de vie est la meilleure au monde. Il suffit d’aller au Centre de planification urbaine, ouvert au public, où l’on peut voir ce que sera Singapour dans 30 ans. Ils réussissent tout ce qu’ils entreprennent car tout est sur les rails depuis longtemps et ils savent très exactement où ils veulent aller et de quelle manière ils y arriveront. Et qu’on ne vienne pas nous dire que ce qu’ils font n’est pas adaptable dans d’autres pays… C’est une question de nationalisme, de discipline, de courage !
1. Mme Jacky Deromedi vit à Singapour depuis 26 ans. |