Par M. Vincent Toussaint, Chef du Service économique de l’Ambassade de France en Jordanie
Les entreprises françaises ont beaucoup investi en Jordanie. Nous sommes le premier investisseur après les pays arabes, avec un stock estimé à 1,5 milliard d’euros (en retenant la capitalisation des filiales françaises). Les groupes français sont présents sur des secteurs clés, comme les télécommunications (Orange), le ciment (Lafarge), les transports (ADP, CMA-CGM), les carburants (Total) ou l’eau (Degrémont, Suez). Par ailleurs, la Jordanie est un marché en croissance, y compris au plan démographique (6,5 millions d’habitants officiellement). Nos entreprises sont très présentes dans la distribution (Carrefour en particulier) et la banque (Société Générale). Enfin, certains groupes (Alstom, Saint-Gobain) ont fait le choix d’implanter des structures régionales, notamment pour couvrir l’Irak et – très probablement à l’avenir – la Syrie. La France compte près de trente filiales et autant de franchises. Les échanges commerciaux sont fortement excédentaires, au profit de la France. En 2014, nos exportations s’élevaient à 289 millions d’euros (selon les douanes françaises), avec comme points forts les produits agroalimentaires, les produits pharmaceutiques ou l’automobile, où nos marques sont en position de challengers. À l’inverse, nos importations en provenance de Jordanie n’ont représenté que 12 millions d’euros, principalement des produits chimiques, engrais et textiles. Notre part de marché s’établit à environ 2%. Comme pour la plupart des pays de l’Organisation de Coopération et de Développement économique (OCDE), notre poids relatif diminue par rapport aux émergents. Cependant, notre part de marché ne reflète pas la visibilité des marques françaises, notamment parce que certains produits sont importés via des pays voisins (comme le Liban) ou sont fournis à partir de sites de production de la région (comme l’Égypte). Tout l’enjeu est aujourd’hui de densifier la relation commerciale et économique. Trois facteurs invitent à la confiance dans l’avenir. Tout d’abord, la Jordanie est un pays ouvert, bien gouverné et stable, par contraste avec son environnement immédiat. Le PIB continue de croître, à un rythme qui la situe dans le peloton de tête de la zone (3% en 2014, probablement près de 4% en 2015) et avec une inflation modérée (2,9% en 2014, probablement moins de 2% en 2015). La situation des comptes extérieurs se redresse, notamment grâce aux dons de la communauté internationale. La Jordanie a conclu une dizaine d’accords de libre-échange avec, entre autres, l’Europe, les États-Unis et la Turquie. Enfin, des réformes visant à améliorer l’environnement des affaires ont été accomplies, dans le cadre du programme du Fonds monétaire international (FMI), comme la nouvelle loi sur l’investissement, qui crée un guichet unique et clarifie les avantages fiscaux. Par ailleurs, la Jordanie connaît un redémarrage de l’investissement dans les infrastructures : énergie, eau, transports. Grâce à l’aide internationale, en particulier les dons du Golfe, l’investissement public a augmenté fortement depuis 2013. En outre, les « mégaprojets » cèdent le pas à des approches plus pragmatiques, comme le montrent la concrétisation du projet de terminal GNL à Aqaba, l’accélération dans le photovoltaïque, ou encore la relance des projets de dessalement d’eau de mer avec l’initiation de la première phase du projet Mer Rouge–Mer Morte. Enfin, nos entreprises peuvent s’appuyer sur le soutien des pouvoirs publics. Il est d’abord financier, à travers le groupe Agence française de développement (AFD), les financements concessionnels du Trésor et l’assurance-crédit de la Coface pour le compte de l’État. Récemment, la France a versé une aide budgétaire de 150 millions d’euros au profit du secteur de l’énergie, et le Trésor, 83 millions d’euros en prêts concessionnels dans le secteur de l’eau, avec trois importants marchés attribués en 2014. L’AFD finance, à hauteur de 166 millions de dollars, le bus rapide d’Amman (BRT), dont les appels d’offres sont lancés en 2015. La Jordanie est, en outre, ouverte au FASEP (Fonds d’étude et d’aide au secteur privé). Bien sûr, l’ensemble des grands bailleurs sont actifs, y compris la Banque européenne d’Investissement (BEI) et la Banque européenne pour la Reconstruction et le Développement (BERD) qui opère en Jordanie depuis 2013. En termes de dispositif d’appui aux entreprises, le Service économique de l’Ambassade de France travaille en lien étroit avec la Chambre de commerce et d’industrie franco-jordanienne (« CAFRAJ »), qui est partenaire de Business France et membre de l’Union des Chambres de commerce et d’industrie françaises à l’étranger (UCCIFE). Deux événements commerciaux importants seront organisés en 2015, sur les transports et la ville durable et dans la santé, qui est un des pôles d’excellence de la Jordanie, dans lequel des partenariats industriels sont possibles. |