Lundi 22 Avril 2019  
 

N°124 - Quatrième trimestre 2018

La lettre diplometque
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« La France a un rôle fondamental à jouer aux côtés des Cubains »

Entretien avec M. Matthias FEKL,
Secrétaire d’État chargé du Commerce extérieur, de la promotion du Tourisme et des Français de l’étranger

La Lettre Diplomatique : Monsieur le Secrétaire d’État, vous êtes le premier responsable européen à vous rendre à Cuba depuis l’annonce d’un processus de rapprochement entre La Havane et Washington. Quel bilan faites-vous de ce déplacement ? Quel est votre sentiment à l’égard de l’accueil que vous ont réservé les autorités cubaines et de leur volonté affichée d’intensifier les relations avec la France ?

M. Matthias Fekl : Je tire un bilan très positif de cette visite et de mes rencontres avec les autorités cubaines qui confirment le lien historique ancien et fort qui unit la France et Cuba. En 2014, M. Laurent Fabius a été le premier ministre européen à se rendre à Cuba après que l’Union européenne, a ouvert la porte à une normalisation de ses relations avec l’île. Il existe de nombreuses convergences entre nos deux pays qui sont des pays amis. Lors de mon déplacement, mes entretiens avec les ministres des Relations extérieures et du Commerce extérieur, nos échanges avec les autorités du port de Mariel, la qualité de l’accueil et le temps qui a été consacré à ma délégation témoignent de cette volonté commune que nous avons de renforcer encore davantage nos relations bilatérales.  

L.L.D. : Alors que le Président François Hollande doit effectuer, en mai 2015, la première visite officielle d’un chef d’État français à Cuba, vous avez affirmé que « la France a un rôle fondamental à jouer aux côtés des Cubains ». Pouvez-vous nous préciser comment la France peut contribuer à la nouvelle dynamique d’ouverture de Cuba ?

M.F. : La France est dans son rôle lorsque elle est aux côtés des Cubains pour les accompagner dans leur voie de développement économique. Cuba s’est fixé comme priorité l’actualisation de son modèle économique, c’est-à-dire sa modernisation pour laisser plus de place à l’initiative privée, sans remettre en cause le principe de la socialisation de la propriété. La France peut accompagner Cuba dans cette transition et partage avec elle son expérience en matière de gestion d’entreprises publiques, mais aussi son modèle mutualiste.

L.L.D. : Lors de votre déplacement à Cuba, vous étiez accompagné des représentants de 17 entreprises françaises. Dans quels secteurs avez-vous identifié les plus grandes opportunités d’investissement pour les entreprises françaises sur le marché cubain ? Quel regard portez-vous sur le projet de zone de développement économique de Mariel ?

M.F. : De nombreux domaines offrent des opportunités pour la France : le tourisme, bien sûr,  mais aussi l’agriculture – un accord de coopération pour la recherche agricole a d’ailleurs été signé pendant ma visite – les transports et la construction.
Les Cubains veulent entamer une nouvelle étape. Il y a beaucoup de projets économiques. Un des plus importants est la zone spéciale économique autour du nouveau port de Mariel, dont le gouvernement veut faire un hub international pour les cargos et les containers et qui peut desservir la côte Est des États-Unis. Avec les travaux du canal de Panama, ce port peut devenir un lieu stratégique.

L.L.D. : Pernod-Ricard, CMA-CGM, Bouygues Construction sont autant de groupes français déjà bien implantés à Cuba. Tenant compte de leur expérience, quelle analyse faites-vous du potentiel économique de la Grande Ile ? A l’instar de la création d’un bureau de Business France à La Havane, quels sont les autres dispositifs prévus pour en faciliter l’accès aux investisseurs français ?

M.F. : Les conditions pour investir sont aujourd’hui compliquées : on ne peut pas aller au-delà d’une joint-venture de 50/50, il n’y a toujours pas de possibilité pour un investisseur d’établir un lien direct avec ses employés. Tout passe par l’État. Mais les choses vont évoluer et le potentiel est énorme. Les Cubains, savent qu’ils doivent changer les choses et en même temps, ils ne veulent pas retomber dans la situation d’avant 1959. Ils sont conscients de la nécessité de moderniser leur pays sans tomber dans la dépendance vis-à-vis de l’extérieur, la dépendance aux grands groupes, au capitalisme mafieux d’avant la révolution. Ils cherchent à sauvegarder ce que celle-ci a apporté de positif, notamment en matière d’éducation et de système de santé.

L.L.D. : M. Bruno Bézard, Directeur du Trésor français et Président du Club de Paris, faisait également partie de votre délégation. Dans quelle mesure une décote ou un effacement de la dette de Cuba à l’égard de la France vous semble-t-elle envisageable ? Quinze ans après la rupture du dialogue entre La Havane et le Club de Paris, quels effets ce « processus de réconciliation » est-il susceptible d’avoir sur l’attractivité économique de Cuba ?

M.F. : Sur la dette, il faut qu’un accord soit trouvé entre le Club de Paris et Cuba. La dette s’élève aujourd’hui à près de 15 milliards de dollars ; les discussions avancent. Sans solution pour ce problème, il sera difficile pour Cuba de trouver de nouveaux crédits. J’ai par ailleurs indiqué aux autorités cubaines notre disposition à reconduire notre garantie court terme via l’assureur crédit-public Coface.    

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