Lundi 22 Avril 2019  
 

N°124 - Quatrième trimestre 2018

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La Brigade franco-allemande, un outil précurseur, performant, particulièrement opportun et adapté

Par le Général de Brigade Gert-Johannes Hagemann,
Commandant de la Brigade franco-allemande

Àl’aube du renforcement de la politique européenne de sécurité et de défense commune, l’expérience vécue depuis vingt ans au sein de la Brigade franco-allemande (BFA) sur le vivre et combattre ensemble permet naturellement d’alimenter une réflexion plus large sur la place d’un outil militaire multinational européen au service d’une politique étrangère commune.
Héritière du traité de l’Élysée de 1963, signé par le Chancelier fédéral Konrad Adenauer et le Président de la République Charles de Gaulle, la Brigade franco-allemande a été créée le 2 octobre 1989 sous l’impulsion de leurs successeurs respectifs, Helmut Kohl et François Mitterrand, dans la logique de la politique « des petits pas » des pères fondateurs de l’Europe.
Si les années 2009-2010 ont marqué un tournant stratégique, par la décision du couple Merkel-Sarkozy de redéfinir le stationnement de la brigade et de renforcer ses capacités par l’installation d’une unité de combat allemande en France, l’Année franco-allemande, qui a débuté le 8 juillet 2012 à Reims par la célébration de la réconciliation, devrait offrir à la brigade toute l’attention des acteurs politiques présidant à sa destinée opérationnelle.  
En effet, la Brigade franco-allemande, forte de 6 000 soldats et du panel complet des capacités nécessaires à son niveau, douée d’une solide expérience et définitivement reconnue internationalement, comme lors du dernier exercice du corps germano-néerlandais « Peregrine sword » en septembre 2012, se place aujourd’hui à l’avant-garde de la politique européenne de sécurité et de défense commune (PESD). Les précédents engagements en binational de la brigade, Ex-Yougoslavie en 1997 et Afghanistan en 2004, couplés à la présence continue, depuis sa création, d’éléments sous mandat national projetés sur tous les théâtres d’opérations, démontrent que la Brigade franco-allemande est prête à exprimer la volonté politico-militaire de la France et de l’Allemagne, au service de l’Union européenne ou de l’OTAN.
Depuis maintenant plus de vingt ans, la France et l’Allemagne concrétisent à travers la Brigade franco-allemande l’interopérabilité de leurs forces armées, au quotidien, au cœur de garnisons situées de part et d’autre du Rhin et le plus souvent binationales. La préparation opérationnelle commune, dans les garnisons comme dans les camps d’entraînements français et allemands, trouve son accomplissement logique lors des projections opérationnelles. Le soldat BFA, mieux que tout autre sans doute, s’intègre naturellement dans la complexité structurelle et culturelle d’une force multinationale. Ce soldat franco-allemand constitue une richesse stratégique à l’heure des approches globales des règlements de conflit : exploitant les acquis et les forces de chacune des nations dont il est issu, son identité repose sa maîtrise des langues, sur sa connaissance de l’autre et l’assimilation de ces différences dans le cadre d’une réelle compétence interculturelle ; cette identité propre lui assure une plus-value tactique considérable.
Dans ce cadre, le 50ème anniversaire de la signature du traité de l’Elysée revêt naturellement une importance toute particulière pour la brigade. Le cycle prochain d’activités opérationnelles 2013-2014, actuellement planifié, constituerait à l’évidence une fenêtre d’opportunité particulière, quasiment 10 ans après le dernier engagement commun en Afghanistan.
Dans un contexte économique désormais plus que contraint, l’Europe cherche à mettre en commun et à partager ses capacités militaires. Les nouveaux concepts européens de pooling and sharing et otanien de smart defense, comme le renforcement de la bilatéralité et de la multinationalité, sont déjà mis en œuvre au sein de la Brigade franco-allemande. Ce statut de précurseur commence à intéresser d’autres nations qui pourraient, à l’avenir, s’inspirer de cet exemple.
Malgré ce temps d’avance, la Brigade franco-allemande poursuit ses efforts pour renforcer toujours davantage son interopérabilité native. Ainsi, la mise en œuvre dynamique de l’ambitieux accord intergouvernemental sur la Brigade franco-allemande révisé en 2010 par nos ministres de la Défense vient actuellement contredire les craintes initiées par l’essoufflement apparent des relations franco-allemandes. Cet accord se traduira dans les faits selon un road map Interoperability, qui développe entre autres les jalons suivants d’ici 2016 :
– effort initial d’interopérabilité sur les systèmes d’information et de commandement, avec des interfaces automatiques ;
– mise en place en 2013 d’un module de formation initiale commune pour les jeunes recrues françaises et allemandes. Il s’agit de créer au plus tôt l’identité singulière du combattant franco-allemand ;
– enfin et surtout, améliorer la synchronisation des cycles Préparation Opérationnelle-Projection des deux parties française et allemande de la Brigade franco-allemande.
Tout en s’attelant avec détermination pour améliorer toujours et encore son interopérabilité, la Brigade franco-allemande porte, grâce aux deux nations-piliers de la politique européenne de sécurité et de défense commune, des solutions novatrices ; autant d’opportunités pour rendre à terme toujours plus concrète et efficace une certaine idée de l’Europe de la Défense.
De ce point de vue, la Brigade franco-allemande, outil militaire et politique, avec vingt années d’expérience, est une matrice d’efficacité opérationnelle mais aussi d’efficience fondée sur la mutualisation des capacités et des moyens. Sans doute est-elle un modèle éprouvé qui pourrait faire des émules.
Éspérant l’alignement progressif des planètes politiques et stratégiques pour marquer concrètement et fortement le 50ème anniversaire de la signature du traité de l’Elysée par son engagement opérationnel commun, la Brigade franco-allemande, forte de ses cultures et habitudes différentes forgées par l’histoire, met en œuvre au quotidien, d’une manière unique à ce niveau, cette règle militaire : « Train as you fight ! », et plus précisément : « Train european and multinational as you fight european and multinational !”.   

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