Lundi 22 Avril 2019  
 

N°124 - Quatrième trimestre 2018

La lettre diplometque
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     Vietnam
 

Un partenariat économique à consolider

Par M. Cao Viêt Sinh,
Vice-Ministre du Plan et de l’Investissement, Co-président du Haut Conseil pour le développement de la coopération économique franco-vietnamienne

 

Le Vietnam et la France disposent de solides fondements pour approfondir leur coopération économique. Nos deux pays ont en effet signé un nombre important de textes juridiques qui encadrent et assoient son développement. Les visites de haut niveau font l’objet d’une attention particulière de part et d’autre, leurs hauts dirigeants respectifs ayant effectué plusieurs visites bilatérales au cours des deux dernières décennies, sans compter l’importante fréquence des visites ministérielles.
C’est sur la base d’un tel cadre juridique et d’une forte volonté politique que les deux pays ont mené une coopération économique soutenue qui s’est fait connaître par d’impressionnants résultats, notamment après le lancement du « Renouveau » au Vietnam. La France a été à ce titre l’un des premiers pays à aider le Vietnam à renouer avec la communauté des bailleurs de fonds internationaux. Elle avait en effet concouru au règlement de la dette du Vietnam auprès du Club de Paris, ainsi qu’allégé et effacé une partie de sa dette au début des années 1990. Durant près de dix années consécutives, elle a d’ailleurs occupé  depuis lors le rang de premier investisseur, premier donateur et premier partenaire commercial européen du Vietnam.   
Au cours de ces vingt dernières années, notre pays a accompli des progrès économiques spectaculaires. De 2000 à 2009, son PIB a affiché une croissance annuelle moyenne de plus de 7%. Malgré les impacts négatifs de la crise économique internationale, qui a entrainé un ralentissement de sa croissance (6,2% en 2008, puis 5,3% en 2009 contre 8,5% en 2007), la reprise a été au rendez-vous avec 6,5% en 2010 et 5,89% en 2011, notre PIB s’élevant à 120 milliards de dollars. Depuis 2009, le Vietnam figure ainsi parmi les pays à revenu intermédiaire.
C’est en normalisant ses relations avec les États-Unis et accélérant son intégration aux processus à l’échelle régionale et internationale (ASEAN, OMC et bien d’autres enceintes commerciales, financières et économiques) que le Vietnam est progressivement parvenu à réunir les conditions nécessaires et propices à son développement économique. Fort de cette dynamique, le commerce extérieur vietnamien a connu une progression soutenue avec un volume de plus de 200 milliards de dollars en 2011, en 5ème position des économies de l’Asie du Sud-est. Avec un rythme de décaissement qui se maintient en moyenne à un niveau de 10 milliards de dollars par an, le Vietnam est toujours considéré comme une destination attractive pour les investisseurs étrangers.  
L’économie du Vietnam est en pleine mutation, passant d’une croissance centrée sur la quantité (croissance élevée) à une croissance tournée vers la qualité (résolution des difficultés inhérentes au modèle de croissance, restructuration de l’économie et changement de modèle de croissance). En 2011, nous avons assisté à l’apparition de nombreuses difficultés qui relèvent à la fois de la dégradation de l’environnement économique international avec la crise financière internationale, la question de la dette souveraine en Europe, la montée de l’inflation et du chômage dans plusieurs parties du monde, mais aussi des faiblesses et des lacunes inhérentes à un phénomène de surchauffe, ou en d’autres termes, d’un long processus de développement interne trop axé sur la quantité au détriment de la qualité et qui a pour conséquence la monté de l’inflation, la réduction des réserves de change, ainsi que les pressions sur le taux de change.
Une série de politiques économiques a ainsi fait l’objet des mesures de correction comme le resserrement de la politique monétaire, le réajustement du taux de croissance, la priorité aux équilibres macro-économiques concernant notamment la réduction du déficit public et du déficit commercial. En 2012, le gouvernement vietnamien poursuivra ses efforts en pilotant la mise en œuvre des politiques visant à maîtriser l’inflation, restructurer les investissements publics, les entreprises publiques ainsi que le système bancaire et financier en vue d’une plus grande efficience de l’économie nationale dans son ensemble. L’objectif de croissance ne passera plus au premier plan dans l’ordre de nos priorités qui sont désormais données à la maîtrise de l’inflation et à la stabilité macro-économique.  
C’est sur cette toile de fond que les relations franco-vietnamiennes ont évolué durant ces dix dernières années. Il est à noter que ces relations ne sont pas encore à la hauteur des potentialités qui existent de part et d’autre. En termes d’investissement, la France est seulement en 15ème position parmi les pays et territoires ayant des projets d’investissements directs étrangers au Vietnam. Les grands projets se font rares. Le volume des échanges commerciaux avec la France ne représente que 2% du volume d’échanges du Vietnam avec le monde extérieur. Une instance au niveau gouvernemental, en l’occurrence le Haut Conseil pour le Développement de la Coopération économique, a été ainsi instituée dans l’espoir que ce mécanisme donne un coup de pouce aux échanges bilatéraux, tant sur le plan du volume que sur le plan de la qualité des marchés passés dans les échanges économiques et commerciaux. Néanmoins, les résultats obtenus en la matière ne répondent pas encore aux attentes.  
Cette réalité révèle l’éventuelle faiblesse de l’attractivité du marché vietnamien par rapport à d’autres marchés de la région aux yeux des milieux d’affaires français. Elle pourrait s’expliquer par les contraintes auxquelles sont confrontées des entreprises françaises en termes de compétitivité ou par les difficultés propres aux échanges bilatéraux. Ces questions ont été largement débattues au sein du Haut Conseil entre dirigeants et grandes entreprises de nos deux pays. Mais il est important de noter qu’il revient aux deux parties de continuer à renforcer leur détermination politique afin de créer un environnement propice aux affaires, d’alléger les procédures administratives ainsi que les coûts d’investissement et commerciaux. Il incombe aussi à chacun de promouvoir la connaissance de l’autre, notamment les échanges d’informations de marché en vue de faciliter l’accès de l’autre à son marché.
La mise en œuvre par le Vietnam de trois mesures-clés inscrites dans sa nouvelle Stratégie de développement constitue une grande opportunité pour les investisseurs. D’une part, il s’agit de projets d’infrastructures représentant des centaines de milliards de dollars à investir au cours des cinq ans à venir et qui seront financés par des fonds d’origines différentes, comme l’aide publique au développement, les dotations budgétaires ou des appels à des investissements étrangers sous forme de projets avec un apport de capitaux à 100%, BOT (Build, Operate and Transfert) ou PPP (Partenariat public-privé). D’autre part, ces opportunités existent aussi dans le cadre des programmes de formation professionnelle et d’enseignement supérieur. Enfin, ces projets couvrent de nombreux domaines, des hautes technologies à la protection de l’environnement, en passant par la lutte contre le changement climatique. Ceux-ci ont en effet été programmés au sein du plan quinquennal de développement du Vietnam et de sa Stratégie de développement socio-économique, avec comme objectif de faire entrer le pays dans le cercle vertueux de la croissance et du développement durable. Ce sont là aussi des domaines auxquels la France, parfaitement reconnue pour ses avantages comparatifs, est appelée à porter un vif intérêt.
Le gouvernement vietnamien souhaite que le gouvernement français accorde en priorité des fonds concessionnels aux projets que j’ai mentionnés. D’autant que la France est et sera toujours un débouché de première importance pour les marchandises vietnamiennes dans l’Union européenne.
Notre gouvernement continuera à œuvrer en vue de renforcer les mesures de soutien destinées à promouvoir les investissements français au Vietnam ainsi que ses échanges commerciaux avec la France et l’Europe. Il revient ainsi à nos deux pays d’identifier les obstacles pour les lever en temps voulu, dans l’optique d’atteindre des résultats plus encourageants. Il leur appartiendra aussi d’engager ensemble des réflexions sur l’instauration d’un mécanisme de coopération efficient et efficace. À terme, il est important d’envisager la signature d’un document qui institutionnalisera notre partenariat stratégique pour réaffirmer la forte volonté politique et délimiter le champ de la coopération. Ce texte se déclinera par la suite en une série de lignes d’action prioritaires qui viseront, entre autres, à promouvoir la coopération dans les différents secteurs. Dans cet esprit, il est utile, me semble-t-il, d’étudier la possibilité de mettre en place un mécanisme de dialogue économique d’un niveau encore plus élevé entre la France et le Vietnam, après la signature de ce texte qui suivra la mise en œuvre des objectifs fixés en commun à un haut niveau.   

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