Lundi 22 Avril 2019  
 

N°124 - Quatrième trimestre 2018

La lettre diplometque
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     Monténégro
 

Hommage à Dado : « …saisir le siècle par l’imagination effrénée »

Par M. Alain Seban,
Président du Centre Pompidou

 

Proche de Dado, le poète Alain Bosquet a su ramasser dans cette formule l’extraordinaire tension qui traverse l’œuvre de Dado dont le grouillement graphique sidérant évoque irrésistiblement les monstres terribles que les désastres du XXème siècle ont fait sortir de l’abîme.
Doit-on s’en étonner lorsqu’on sait que Miodrag Djuric, dit Dado, est né en 1933 à Cetinje, dans la province du Monténégro de cet éphémère Royaume de Yougoslavie qui voit déferler les troupes de l’Axe alors qu’il n’a pas huit ans. Orphelin de mère à la fin de la guerre, Dado poursuit des études d’arts à Belgrade avant de s’installer à Paris en 1956. Dans ce pays dont il ne connaît pas la langue, où il arrive seul et sans amis, la rencontre avec Jean Dubuffet, subjugué par sa virtuosité qui mêle le burlesque au tragique, est fondatrice. Elle annonce la rencontre avec le grand marchand Daniel Cordier qui lui offre dès 1958 sa première exposition parisienne.  
Les premières expositions chez Daniel Cordier puis dès 1970 au Centre national d’art contemporain, ont ouvert les portes de cet imaginaire inouï, celui d’une tératologie moderne, inédite depuis les crépuscules infernaux de Jérôme Bosch. Du maître d’Aix-la-Chapelle, il partage les visions d’un peuple de damnés, enfants et bêtes mêlés, traqués, enchevêtrés, témoignage pictural sans égal, exorcisme aussi de la folie du siècle.
L’enthousiasme de Daniel Cordier, son admiration pour Dado et son engagement indéfectible aux côtés du Centre Pompidou, ont permis, à travers trois donations successives, d’une générosité inégalée, de constituer un ensemble de référence pour l’œuvre de cet immense artiste monténégrin adopté par la France. Le Centre Pompidou conserve aujourd’hui un ensemble unique de plus de 130 peintures et dessins et doit beaucoup à la générosité de l’artiste lui-même qui a consenti plusieurs dons importants.
Au lendemain de la disparition de Dado le 27 novembre 2010, la nécessité d’un hommage au Centre Pompidou s’est imposée avec la force de l’évidence. Le 8 mai 2011, journée de l’Europe, en présence des deux ministres de la Culture de France et du Monténégro, et de la propre fille de l’artiste, Mme Amarante Szidon, par ailleurs collaboratrice du Centre Pompidou, l’accrochage dédié à Dado dans les salles du Musée national d’Art moderne a été inauguré. Quelques-uns des grands chefs-d’œuvre de l’artiste, dont La grande ferme, ont permis au public parisien de redécouvrir, dans le voisinage bienveillant de ses amis Jean Dubuffet ou Bernard Réquichot, cet univers si poignant et si singulier.    

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