Par M. Federico Castellucci, Directeur général de l’Organisation Internationale de la Vigne et du Vin (OIV)*
S’il est un domaine où le rayonnement du Monténégro est inversement proportionnel à l’étendue de son territoire, c’est celui de la vitiviniculture. Il suffit de faire un tour parmi les longs couloirs voutés du complexe de Šipčanik pour s’apercevoir à quel point la filière vitivinicole conçoit une partie non négligeable de son développement à l’international. Situé dans les refuges souterrains d’une ancienne base militaire désaffectée, ce complexe a fait l’objet d’un lourd investissement – plus de deux millions d’euros – pour devenir le cellier et le centre de visite de la société Plantaže, qui produit à elle seule près de 70% du vin monténégrin. Mais cette société n’est pas la seule, car il existe aussi d’autres producteurs grands et petits tels que Bogojevic, Rajković, Kopitović et beaucoup d’autres que je conseille à tous de visiter. Dans l’hymne national du Monténégro, il est dit que l’unité donne des ailes et, à défaut d’une force de frappe commerciale comparable à celle des grandes maisons françaises ou italiennes, les vignerons locaux ont su faire preuve d’ingéniosité en se regroupant au sein de l’Association nationale des producteurs et vignerons, mettant au point une stratégie commune pour le développement de la filière, laquelle mise sur une valorisation du produit et du terroir d’où il est issu. C’est en tant que Directeur général de l’Organisation internationale de la Vigne et du Vin (OIV) que j’ai eu l’opportunité en 2011 de visiter le vignoble monténégrin aux côtés de M. Tarzan Milošević, Ministre de l’Agriculture et du Développement rural. J’ai pu constater ainsi le remarquable succès qui a accompagné le développement du tourisme du vin dans le pays, avec des vignerons qui ouvrent leurs caves aux visiteurs et leur permettent de déguster leurs crus et leurs spécialités culinaires, intégrant ainsi le vin dans l’offre touristique du pays. Cette stratégie s’est montrée payante et, en conséquence, les vins du Monténégro ont commencé à se frayer une place dans la distribution spécialisée, jusqu’au point où un tiers du vin produit chaque année (près de 150 000 hectolitres en moyenne) est aujourd’hui acheminé vers l’extérieur. Le fait que le gouvernement de Podgorica ait rejoint cette grande famille qu’est l’OIV en 2007, c’est-à-dire seulement un an après son indépendance, témoigne de l’importance que la vitiviniculture possède dans ce pays. Parmi les différents travaux en cours à l’OIV, le Monténégro s’est révélé particulièrement actif dans ceux qui touchent à l’œnologie. Car, contrairement à ce que laisseraient penser les dimensions modestes de son territoire, le Monténégro abrite un patrimoine vitivinicole qui a peu à envier à celui de ses voisins. Des variétés de raisin telles que le vranac ou le krstač, indigènes du Monténégro, demeurent le principal patrimoine des vignerons locaux, et ceux-ci les cultivent avec soin et savoir-faire dans les régions plus méridionales et proches du littoral, en particulier sur les pentes terrassées de Crmnica. Le cépage vranac sert à produire des vins rouges secs et équilibrés qui aujourd’hui s’exportent bien au-delà des frontières du Monténégro, grâce à des prix intéressants et proportionnés à leur valeur intrinsèque. De son côté, le krstač donne des vins blancs secs qui peuvent atteindre une qualité remarquable. Bien sûr, le Monténégro reste confronté aux mêmes défis que les autres pays viticoles, sauf que son appartenance à l’OIV lui donne la possibilité de se faire entendre au niveau international et de bénéficier d’un cadre de référence harmonisé pour le développement de sa vitiviniculture, qui a ainsi des beaux jours devant elle. À l’OIV nous serions donc heureux de contribuer à la diffusion de ce patrimoine viticole, avec une dégustation de vins du Monténégro dans notre siège. Vu le dynamisme de la mission diplomatique monténégrine à Paris, et en particulier de S.E.Mme Irena Radović, Ambassadeur du Monténégro, le succès sera au rendez-vous. |