Par M. Jérôme Kelle, Conseiller de coopération et d’action culturelle à l’Ambassade de France au Monténégro, Directeur de l’Institut Français du Monténégro (IFM)
Le pôle SCAC-IFM (Service de coopération et d’action culturelle et l’Institut français du Monténégro) de l’Ambassade de France au Monténégro mobilise l’essentiel de ses activités autour de l’appui au processus d’intégration européenne du Monténégro. Depuis que le pays a obtenu en décembre 2010 le statut de pays candidat à l’adhésion à l’Union européenne (UE), gouvernement, autorités publiques mais aussi société civile sont engagés dans un train de réformes et une dynamique de changements qui visent à conduire toutes les forces vives vers cette perspective européenne porteuse de standards de vie renforcés. À cet égard, les services de l’Ambassade de France s’efforcent d’y apporter leur modeste contribution à travers quelques axes de coopération prioritaires : le renforcement des capacités administratives et institutionnelles du pays ; l’encouragement à la mobilité internationale de la jeunesse ; l’enseignement du français, à la fois auprès des fonctionnaires et des étudiants, comme langue d’ouverture et de travail européenne ; et la participation à la vie culturelle du pays.
L’appui au renforcement des capacités administratives et institutionnelles L’Ambassade de France s’efforce de mobiliser l’expertise française dans le cadre du programme européen IPA (instrument de pré-adhésion) dans des secteurs clés des réformes en cours. Les autorités monténégrines ont d’ores et déjà choisi nos offres de service dans trois secteurs d’intervention : – La réforme de la justice notamment dans le cadre d’un jumelage portant sur la « mise en place du nouveau code de procédure pénale » mis en œuvre par ACOJURIS. Ce programme, qui arrive à terme en avril 2012, aura notamment permis de renforcer l’efficacité de l’action des procureurs dans la conduite des enquêtes et des procès. Il s’agit d’un apport non négligeable à l’effort global consenti pour améliorer le cours de la justice et répondre ainsi aux fortes attentes de l’UE en matière de lutte contre la corruption et le crime organisé. – Le développement rural dans le cadre d’un projet mené par une équipe austro-franco-slovaque en faveur de la mise en place de l’Agence publique qui sera chargée d’optimiser les fonds européens agricoles (IPARD) au Monténégro. Il vise notamment à encourager les acteurs du développement rural à revitaliser un secteur de l’économie locale qui dispose de forts atouts (vins, charcuterie, fromages, huile d’olives, etc) et d’un potentiel (agrotourisme, tourisme vert, énergies renouvelables, etc) qui reste, sans doute, à ce stade sous-exploité. – L’environnement réglementaire en faveur de la normalisation et des règles de qualité s’agissant de la production et des services. L’AFNOR (Agence française de normalisation) est très présente sur le terrain et contribue à cet égard à préparer l’économie monténégrine aux exigences de l’entrée sur le marché unique européen.
La France se prépare à poursuivre son intervention dans ces secteurs et à proposer son appui dans d’autres domaines essentiels tels que la réforme de l’administration publique pour en perfectionner le mode de management, d’une part, et contribuer à sa professionnalisation et à la transparence de son action, d’autre part. À cet égard, elle intervient déjà dans un cadre bilatéral à travers un partenariat étroit, établi depuis deux ans désormais, entre l’Agence des ressources humaines du gouvernement monténégrin et l’ENA (École nationale d’administration). Des séminaires relatifs aux grands enjeux des réformes en cours (éthique et déontologie, fonction publique de carrière et/ou d’emploi, recrutement, formation et promotion au mérite des agents publics, management des ressources humaines, principes de bonne gouvernance, évaluation des résultats des politiques publiques, etc) sont organisés sur place tandis que de jeunes fonctionnaires monténégrins francophones (3 à 5 par an) sont accueillis aux CISAP (Cycle internationaux spécialisés d’administration publique) de l’ENA en France chaque année. Par ailleurs, l’Ambassade de France initiera pour la première fois cette année un partenariat identique entre le Centre de formation judiciaire et l’ENM (Ecole nationale de la Magistrature).
La mobilité internationale des jeunes Dans un pays réouvert sur son espace européen depuis quelques années seulement, notre pays souhaite encourager l’ouverture intellectuelle et la formation universitaire des jeunes Monténégrins vers l’international, et notamment vers la France. À cet égard, les services de l’Ambassade contribuent à structurer des partenariats universitaires entre les deux pays et à encourager l’optimisation des opportunités offertes aux jeunes de se former et d’acquérir une expérience professionnelle en France grâce à l’accord de mobilité des jeunes professionnels signé par le Ministre Eric Besson, sur place, en décembre 2009. Le principal partenariat en cours d’essor est celui qui relie l’Université Sophia Antipolis de Nice à l’Université d’État du Monténégro. Une formation conjointe bilingue et co-diplomante a déjà été instaurée à cet égard au niveau licence en sciences économiques. Une cinquantaine d’étudiants monténégrins la suivent actuellement sur place à Podgorica. Forte de cette première expérience réussie, l’Ambassade encourage la mise en place de cursus conjoints de masters en tourisme, sciences politiques et en droit, notamment international et européen, qui devraient voir le jour à la rentrée universitaire 2013-2014. En outre, au-delà de l’opportunité de former un réseau de jeunes diplômés francophones politistes, juristes, managers, opérateurs du tourisme ; un effort est consenti pour favoriser également la formation des futures générations de professeurs de FLE (français langue étrangère) et d’interprètes-traducteurs. Cela s’établit à travers une coopération régulière entre les facultés de lettres des Universités de Tours et de Strasbourg et la Chaire de langue et de littérature françaises de la Faculté de Niksic et de l’Institut des langues étrangères de Podgorica. Outre les échanges d’enseignants, un dispositif de bourses universitaires en faveur des doctorants et des étudiants a été mis en place et nettement renforcé ces dernières années (de 7 bourses en 2009, elles sont désormais au nombre de 12 en 2012). Elles permettent notamment à des étudiants francophones de poursuivre leurs études de master 2 en France et de bénéficier dans la foulée d’un contrat de courte durée auprès d’une entreprise sur place.
L’enseignement du français dans une perspective européenne Depuis que le Monténégro est devenu, sous l’impulsion notamment de son Premier ministre, M. Igor Luksic, membre observateur de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), l’Institut français en étroite collaboration avec l’OIF, mène un vaste programme d’enseignement du français de la diplomatie et du droit européen auprès des cadres de l’administration publique du Monténégro. Ce sont actuellement environ 150 fonctionnaires (diplomates, fonctionnaires, cadres du Parlement) qui suivent ce cursus et valident la progression de leur apprentissage à travers les diplômes du DELF (diplôme d’études de langue française). L’objectif est de permettre notamment au gouvernement monténégrin de s’appuyer sur un vivier de jeunes recrues anglophones et francophones à même de faciliter le déroulement du long processus de négociation à venir avec l’UE. Par ailleurs, la forte progression du nombre d’apprenants aux cours de français et aux examens de langue française proposés par l’Institut français au grand public traduit l’appétence européenne et francophone croissante de la jeunesse du pays. Les chiffres parlent d’eux mêmes : d’une centaine d’apprenants en 2008, en 2011 l’IFM a enregistré 440 inscriptions aux cours et 289 candidats aux examens du DELF et du DALF. Une telle dynamique a conduit l’IFM à renforcer le niveau de ses prestations auprès d’un public de plus en plus exigeant en introduisant dès 2011 les standards de la « démarche qualité » recommandée par l’Institut français et l’Alliance française, notamment à travers la certification DALF C1 de toute son équipe pédagogique locale. Son effort vise également le système scolaire monténégrin, à travers la signature en juin 2010 d’un arrangement administratif pour la promotion et l’enseignement du français dans les écoles et les lycées. Ce dispositif prévoit des mécanismes de co-financement entre l’Ambassade et le Ministère monténégrin de l’Éducation, en faveur de la formation continue des professeurs de FLE, de séjours culturels en France pour les meilleurs élèves et étudiants et un appui conjoint à l’Association des professeurs de français du pays.
La participation à la vie culturelle du pays Bien évidemment, l’Institut français du Monténégro encourage, avec les autres acteurs européens sur place, l’ouverture culturelle du pays à travers une série d’évènements et de manifestations artistiques destinés à un large public. Les rendez-vous les plus médiatiques de ces deux dernières années ont été la célébration de l’Année Chopin, la prestation du trio de jazz « Eric Legnigi », la représentation sur la scène du Grand théâtre national du spectacle de chorégraphie contemporaine « SCORE » et le Concert le 20 mars de cette année de la chanteuse « Belle du Berry ». L’IFM s’adresse aussi à des publics plus avertis comme elle l’a fait notamment à l’occasion de la commémoration du bicentenaire des Provinces illyriennes à l’automne 2009 à Kotor ou encore à travers l’invitation de l’anthropologue Véronique Grappe Naoum, à l’occasion du festival de Podgorica « D’où j’appelle », à l’été 2011. |