Lundi 22 Avril 2019  
 

N°124 - Quatrième trimestre 2018

La lettre diplometque
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     Émirats Arabes Unis
 

Défense et armement : composantes majeures du partenariat stratégique franco-émirien

Établi à la demande de la France, l’accord de défense franco-émirien du 26 mai 2009 traduit de fait l’actualisation d’accords antérieurs auxquels il se substitue et dont le plus ancien remonte à 1971, relatif à une coopération qui n’a cessé depuis de considérablement s’étoffer, notamment après la guerre du Golfe.
Important de par son ampleur, l’accord de 2009 n’en demeure pas moins la suite logique des accords de 1991 et 1995 qui ont donné un nouvel élan aux relations de coopération militaire et d’armement entre les deux pays (Formation d’officiers, organisation de manœuvres interarmées communes, augmentation des capacités d’intervention dans le cadre d’opérations de maintien ou de rétablissement de la paix, coopération en matière de renseignement, assistance et formation militaire, planification etc.). Cet accord s’inscrit avant tout dans un contexte d’intensification des échanges politiques, économiques et culturels bilatéraux, caractéristique d’une relation franco-émirienne devenue stratégique avec l’installation d’une base militaire française permanente à Abou Dhabi.
Tenant compte de la position géostratégique qu’occupe les Émirats Arabes Unis à proximité immédiate du détroit d’Ormuz, au large duquel passe 40% du trafic pétrolier mondial, ainsi que l’indique le rapport parlementaire de l’Assemblée nationale daté du 14 juin 2011, l’accord de 2009 « engage la France à participer à la défense de la sécurité, de la souveraineté, de l’intégrité territoriale et de l’indépendance des Émirats Arabes Unis ». Il fait donc de la base interarmes d’Abou Dhabi le point d’ancrage stratégique de la force de présence française dans la région.
Cet accord instaure aussi un nouveau cadre qui, au-delà de l’affirmation par les deux parties de leur attachement à la stabilité et à la sécurité du Golfe qu’il mentionne clairement, prend mieux en compte la nouvelle dimension et les aspects de la relation bilatérale eu égard au nombre croissant de Français expatriés installés aux Émirats Arabes Unis et dans les pays voisins, outre bien entendu la volonté exprimée par les autorités émiriennes de renforcer ses capacités militaires et de défense à travers le resserrement de ses liens avec la France, allié traditionnel et fidèle de l’Etat émirien depuis sa création aux côtés d\\\’autres puissances occidentales.
Très tôt en effet, les relations privilégiées qu’entretiennent les Émirats Arabes Unis et la France se sont singularisées par la signature et l’exécution de contrats de fournitures d’armement qui  ont concerné pratiquement tous les segments (terre, air, mer) de ses forces armées. Et malgré la prégnance d’une présence anglo-saxonne historique, plus de 70% des équipements militaires acquis par les Émirats Arabes Unis depuis 1976 ont le plus souvent été fournis par les industriels de l’armement français.
La plupart de ces contrats d’armement contribuent, hormis leur vocation spécifique, à une dynamique d’ensemble participant à l’intensification de la coopération militaire entre les deux pays, qu’accroît l’interopérabilité induite par l’usage de matériels similaires en dotation dans les forces armées respectives des deux pays ainsi que par les entraînements et les exercices communs régulièrement organisés sur le terrain.  
Les plus représentatifs de ces contrats continuent d’illustrer au quotidien la réalité de cette coopération militaire et d’armement. C’est le cas de la vente de 436 chars Leclerc produits par GIAT Industries devenue depuis Nexter. Ces chars de type AMX Leclerc également en service dans l’Armée de terre française ont été acquis dans les années 90 par les forces armées des Émirats Arabes Unis et constituent aujourd\\\’hui encore l’équipement de référence de leur armée de terre. Côté aérien, ce ne sont pas moins de 62 exemplaires de Mirage 2000-9, conçus et produits par la société Dassault-Aviation, qui équipent aussi les forces armées des Émirats Arabes Unis dont 32 Mirage 2000-9 acquis en 1998 et 30 Mirage 2000, que possédaient déjà son armée de l’air et qui ont été portés au standard 2000-9 après modernisation et mise à niveau. Dassault Aviation et la société d’électronique de défense Thales, s’activent actuellement dans la négociation d’un contrat de vente qui pourrait porter sur la fourniture de 60 exemplaires du Rafale répondant aux spécifications d’un cahier des charges particulièrement exigeant. Au plan naval, le contrat « Baynunah » signé en 2003 par les Constructions Mécaniques de Normandie avec les Émirats Arabes Unis prévoit la livraison de six corvettes furtives multi-rôle lance-missiles dont la première, construite à Cherbourg, a été livrée à la fin 2011, tandis que les cinq autres doivent être construites dans les chantiers navals d’Abu Dhabi Ship Building, suite à un accord de transfert de technologies. Les Émirats Arabes Unis ont par ailleurs confirmé en 2008 la commande de trois exemplaires d’avion ravitailleur A330-MRTT, développé par le constructeur européen Airbus Military, filiale du groupe EADS. Tous ces contrats bénéficient directement ou indirectement à l’ensemble des industriels du secteur qui participent au développement de ces programmes sophistiqués et font nécessairement l’objet d’accords de maintenance en condition opérationnelle, d’assistance technique et périodiquement de modernisation, notamment de leur armement et de leurs équipements électroniques embarqués qui peuvent représenter jusqu’à un tiers et plus du coût total des matériels concernés.
Les salons professionnels de l’armement qui se déroulent tous les deux ans aux Émirats Arabes Unis, IDEX pour l’armement terrestre, alternativement avec le Dubai Air Show pour l’aviation civile et militaire, confirme une tendance à la constitution d’une industrie de défense locale à laquelle les autorités émiriennes accordent toute leur attention. Il est à prévoir que le complexe militaro-industriel émirien, créé à cet effet, deviendra pratiquement incontournable pour tous les futurs contrats d’armement qui sont appelés à faire systématiquement l’objet de transferts de technologies et/ou de production locale avec la volonté farouche, si ce n’est d’entrer en concurrence, d’être capable à terme d’une réelle indépendance technologique acquise aujourd’hui à travers des accords de partenariat industriels et, demain peut-être, par de plus larges participations croisées en investissements au capital des industries européennes et occidentales légitimement considérées à la fois comme leurs alliés et fournisseurs privilégiés.
A l’aune du partenariat stratégique que constitue aujourd’hui les différentes dimensions de la relation bilatérale franco-émirienne, d’autres accords et contrats viendront sans nul doute compléter ceux déjà passés pour sécuriser le pays et adapter sa défense aux nouvelles menaces. Ils représenteront alors l’évolution naturelle et dans l’intérêt mutuel bien compris du lien particulier existant entre deux partenaires d’une relation privilégiée qui ne s’est jamais démentie depuis plus de 40 ans. Une relation basée sur la confiance, le respect mutuel et le désir de voir s’épanouir une coopération toujours portée vers l’excellence telle que l’avait définie et souhaitée en son temps le fondateur visionnaire et souverain des Émirats Arabes Unis, feu S.A. Cheikh Zayed bin Sultan Al Nahyan dont il a su transmettre l\\\’héritage avec sagesse.    

François Béranger

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