Par S.E.Mme Sonia Sarmiento, Ambassadeur, Délégué permanent de la Colombie auprès de l’UNESCO
En privilégiant une approche inclusive et pluraliste, la Colombie considère l’UNESCO comme une enceinte idéale pour débattre de l’agenda constructif du système multilatéral, au cœur de laquelle sont élaborés jour après jour les fondements du développement durable dans le respect des droits de l’homme. Sur la base de ses quatre principaux domaines d’activité, à savoir l’éducation, la culture, la communication et la science, le respect mutuel y est renforcé, tandis que des progrès y sont accomplis dans la mise en œuvre d’activités visant, entre autres, à réduire la pauvreté, avec parmi ses priorités l’égalité des sexes. Compte tenu de son potentiel dans le domaine de la culture, la Colombie a enregistré des avancées au cours de ces dernières années en matière de reconnaissance et de promotion de la diversité culturelle en vue de renforcer les processus de développement économique, l’équité et la cohésion sociale ainsi que la prospérité des artistes et des créateurs. Ces expériences ont démontré que la culture est génératrice de processus de construction d’une citoyenneté active, attachée aux valeurs de la démocratie et de la coexistence, qui trouve dans la reconnaissance de la diversité culturelle un cadre approprié à l’édification de la paix et de la réconciliation nationale. La Colombie est, en effet, un pays multiethnique et multiculturel. Selon les chiffres du recensement national de 2005, environ 1,4 million d’habitants appartiennent à 87 peuples autochtones, 4 311 000 sont des Afrodescendants, et 4 800 000 sont des Tsiganes ou Rome. À cette diversité ethnique s’ajoute une grande diversité linguistique, avec l’existence de 68 langues de minorités et de peuples autochtones, regroupées en 13 familles linguistiques. Il en résulte que la Colombie est un pays très diversifié, en termes culturels, que ce soit dans les villes ou dans les campagnes, un pays où se mêlent tradition et modernité. La construction de la nation est le fruit de l’existence et de l’affirmation de ces identités multiples, de ces valeurs, de la diversité des expressions culturelles et des visions du monde qui s’y expriment. Cette configuration socio-éthnique forme depuis plus d’une décennie le socle des programmes prioritaires du Ministère colombien de la Culture, grâce auquel a été mis en place un solide cadre réglementaire. Celui-ci comprend le Plan national de la culture pour la décennie 2001-2010 et la loi générale sur la culture qui constituent les piliers du Système national de la Culture de la Colombie. Parmi ses principales composantes, le Plan national Musique pour la Coexistence implique 30 écoles de formation musicale avancées et 327 groupes de musique, bénéficiant à plus de 23 600 jeunes et enfants. Le Plan national pour la Culture et la Coexistence a créé à ce jour plusieurs espaces d’expression et d’intérêt public au sein des 81 stations de radio communautaire, ce qui en fait un vecteur essentiel pour la promotion de valeurs telles que la tolérance, le respect des différences, et bénéficiant avec le Plan national pour la Lecture et les Bibliothèques, à plus de 63% des municipalités dans le pays. Dans le même temps, la Colombie cherche à développer des politiques s’articulant autour de la lecture, en essayant de dépasser le critère strictement culturel. L’industrie culturelle est devenue une composante très importante et compétitive de l’économie nationale, situation favorisée par la croissance et le développement généralisé du réseau des bibliothèques publiques à travers l’ensemble du pays, lesquelles sont devenues l’épicentre de la vie culturelle et communautaire. C’est pourquoi les défis dans le domaine culturel visent à renforcer les liens entre culture et développement à travers l’entrepreneuriat culturel. Une étude a justement été réalisée par l’UNESCO en collaboration avec le Ministère colombien de la Culture en 2011, intitulée « Batterie des Indicateurs de la Culture pour le développement ». Celle-ci prend l’expérience de la Colombie, afin d’identifier un ensemble d’indicateurs qui expliquent comment la culture contribue au développement national par la promotion de la croissance économique et comment elle peut aider les individus et les communautés afin d’élargir leurs choix de vie et de s’adapter au changement. Cette étude conclut que les industries culturelles actuelles contribuent à environ 3% du PIB en Colombie, la positionnant parmi les pays les plus performants dans ce domaine et les plus aptes à la coopération et au partage des bonnes pratiques. Par conséquent, le Congrès national colombien (qui détient le pouvoir législatif) a récemment approuvé la ratification de la Convention sur la Diversité culturelle de l’UNESCO de 2001, dont notre pays devient État partie de plein droit dès cette année. Cette convention nous permettra de continuer à réaliser des progrès en matière d’adoption de programmes éducatifs et de sensibilisation sociale, d’implication de la société civile, de coopération internationale et d’intégration de la culture dans le développement durable. Elle place ainsi notre pays dans le contexte global de la coopération internationale sur la protection de la diversité culturelle ; évolution qui découle des dispositions que stipule la Déclaration universelle des droits de l’homme. Notre participation au sein du Comité sur le Patrimoine mondial constituera par ailleurs un défi stratégique pour la politique extérieure de la Colombie. Dans le cadre de la 18ème Assemblée des États parties à la Convention pour la protection et la sauvegarde du Patrimoine culturel et naturel, qui s’est tenue en novembre 2011, la Colombie a en effet été élue membre du Comité du Patrimoine mondial. Cette opportunité représente une occasion idéale pour travailler en coordination avec d’autres pays en développement, conformément à la vision définie par le Président Juan Manuel Santos, en vue de promouvoir la consolidation de notre ouverture à la coopération et au partage des bonnes pratiques. À cette fin, le gouvernement colombien a mis en place une équipe d’experts hautement qualifiés et ayant une vaste expérience en matière de patrimoine mondial, qui sera placée sous la tutelle de la Délégation permanente que je dirige à l’UNESCO. La délégation de la Colombie auprès de l’UNESCO est chargée de coordonner le travail entre le Comité et les autorités nationales, afin d’assurer une représentation adéquate, ce qui en fait un acteur clé, à partir duquel s’articule le dialogue politique et technique, en étroite collaboration avec le Centre du patrimoine mondial et les délégations permanentes auprès de l’Organisation. Considérant l’importance qu’attache la Colombie au respect total des droits de l’homme, notre gouvernement a élaboré les mécanismes appropriés pour permettre l’exercice de la liberté de presse, plaçant les journalistes dans le cadre d’un système efficace de protection qui, avec la promotion de la libre circulation des connaissances, complète l’ensemble des éléments identifiés comme prioritaires dans le domaine de la communication. La Colombie est ainsi très honorée et fière que l’UNESCO décerne le Prix international pour la liberté de la presse « Guillermo Cano », le 3 mai de chaque année, à l’occasion de la Journée mondiale de la liberté de la presse, afin de rendre hommage à tous les journalistes qui œuvrent constamment à la recherche de l’objectivité et de la transparence. Parmi les lauréats de ce prix, se distingue la journaliste chilienne Mónica González, Directrice du Center for Investigative Journalism (à Santiago), qui lui a été remis en 2010 pour son travail sur la situation des droits de l’homme au Chili pendant la dictature militaire. D’autres journalistes de différentes régions du monde ont également été récompensées dont Anna Politkovskaïa (Fédération de Russie, 2007), May Chidiac (Liban 2006) ou Cheng Yizhong (Chine, 2005). Ces différents éléments constituent donc le cadre général des politiques nationales mises en œuvre en Colombie en faveur des jeunes, en tant que catalyseurs des conditions propices à l’inclusion sociale et à la création d’opportunités. La préservation du patrimoine, la diversité culturelle, l’éducation pour le développement durable et la culture de la paix, constituent des références essentielles pour bâtir une société meilleure. Pour y parvenir, la coopération avec l’UNESCO et son soutien demeurent notre atout le plus approprié. |