Lundi 22 Avril 2019  
 

N°124 - Quatrième trimestre 2018

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Le rachat d’Emporiki : un signe pour les investisseurs

Avec la réussite de l’offre publique d’achat lancée l’été dernier par le Crédit Agricole sur la banque grecque Emporiki, la France se hisse au premier rang des investisseurs étrangers en Grèce. Au-delà du symbole, qui illustre la densité des relations économiques franco-grecques puisqu’il s’agit du plus important projet d’investissement étranger réalisé en Grèce, cette opération constitue sans doute la meilleure réalisation de la politique économique impulsée par le gouvernement grec depuis son élection en mars 2004.

Après avoir dirigé la Grèce pendant plus de dix ans par le parti socialiste grec, le PASOK, le gouvernement de Kostas Karamanlis a en effet placé son mandat sous le signe du changement, avec pour ferme volonté de faire du secteur privé le moteur de l’économie. Volonté qui répond à la nécessité de maintenir la croissance grecque : à l’heure des restrictions budgétaires que le gouvernement s’efforce d’ailleurs de rendre les moins coûteuses sur le plan social, il s’agit en effet de trouver un solide relais à l’investissement public dont le volume a culminé avec les préparatifs des Jeux olympiques de 2004. D’une manière plus générale, l’objectif de fond de l’équipe dirigée par Kostas Karamanlis est d’alléger le poids de l’Etat dans l’économie grecque, que le journaliste Georges Papageorgiou qualifie de « premier investisseur, premier employeur et premier consommateur »1. Elle s’est donc employée à mettre en œuvre toute une série de mesures d’incitation à l’activité entrepreneuriale, avec notamment la réduction progressive du taux d’imposition sur les bénéfices des sociétés (qui devrait passer de 35% en 2004 à 25% en 2008), l’introduction de plus de flexibilité dans le marché du travail avec l’allègement du coût des heures supplémentaires ainsi que le développement de partenariats public-privé par la mise en place d’un système de financement des infrastructures publiques par des capitaux privés. Si la mesure la plus significative réside dans l’allègement de la fiscalité, l’obstacle majeur à l’investissement reste le poids de la bureaucratie et son manque de transparence, questions qui n’ont pour l’heure été abordées que sous l’angle d’une sensible réduction des délais à la création d’entreprises.

Parallèlement à la restructuration des entreprises publiques pour les rendre plus performantes, le gouvernement a également lancé un programme de privatisation qui passe pour être l’une des clés de la réduction du déficit public qui, bien qu’il soit passé de 6,9% du PIB en 2004 à 4,5% en 2005, demeure au-dessus des critères du pacte de stabilité. De ce point de vue, M. Georges Alogoskoufis, le Ministre de l’Economie et des Finances qui présidait au nom de son pays la Conférence annuelle des grands argentiers de l’OCDE à Paris en mai dernier, se veut rassurant. Dans son budget pour l’année fiscale 2006, le gouvernement grec, placé sous surveillance par Bruxelles, a fixé comme objectif de le ramener à 2,9%.

Dans son entreprise de promotion du secteur privé, l’attraction des investissements étrangers constitue un axe privilégié de la politique du gouvernement de Kostas Karamanlis. En dépit d’une croissance soutenue supérieure à la moyenne de l’UE-15 pour la cinquième année consécutive et de véritables atouts, comme la proximité des marchés émergents dans les Balkans, le marché grec n’accueille encore que de faibles flux d’investissements directs étrangers (IDE). Allié au déficit courant, cette situation témoigne de la nécessité pour la Grèce d’accroître sa compétitivité.

Or, la cession de la banque Emporiki constitue un tournant dans la politique de privatisation : il ne s’agit plus en effet de céder des blocs minoritaires mais d’une cession complète ; méthode dont le M. Alogoskoufis a laissé entendre qu’elle pourrait à l’avenir inspirer d’autres opérations. Qui plus est, cette privatisation intervient dans un secteur stratégique de l’économie grecque. Celui-ci en reflète en outre une de ses caractéristiques majeures, à savoir la faible concurrence sur l’ensemble des secteurs du marché. Des progrès ont également été accomplis dans ce domaine en renforçant les capacités de la Commission hellénique de la concurrence. Plus qu’un simple désengagement de l’Etat, le rachat d’Emporiki constitue donc un signe aux investisseurs étrangers et devrait impulser l’ouverture d’autres secteurs encore fermés à la concurrence, comme celui de l’énergie. Il s’inscrit dans un effort plus vaste d’ancrage d’une véritable « culture de la concurrence ».      C.H.

 

1-Le Monde diplomatique, août 2006.

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