Par M. Philippe Boin, Chef de la Mission économique française à Bucarest
Les relations économiques et commerciales franco-roumaines se singularisent par des échanges et des investissements déjà relativement importants et diversifiés, mais qui pourraient encore beaucoup se développer.
Evolution des échanges commerciaux franco-roumains en 2005
Le dynamisme de nos investissements directs étrangers (IDE) dans une économie roumaine en forte croissance de la consommation et des investissements, nourrit en 2005, une progression de près de 17% de nos exportations dans ce pays en 2005, soit avec 2 180 millions d’euros, une part de marché de 6,7%, derrière l’Allemagne (14,9%) et l’Italie (15,4%). Notre part de marché recule certes (7,1% en 2004), mais cette évolution traduit en fait l’envolée des prix de l’énergie (remontée de la Russie : 8,3% contre 7,4% il y a un an) et plus encore la montée en puissance de la Turquie (4,9% contre 4,1%), de la Chine (4% contre 3,1%), de la Pologne (2,9% contre 2,1%). On constate enfin que nos exportations portent sur des biens d’équipement (28%), des véhicules (19%), des produits chimiques et pharmaceutiques (14%), du textile (12%), des matières plastiques (7%) et insuffisamment sur des biens de consommation courante, y compris agro-alimentaires et cosmétiques, à la différence des Italiens et des Allemands.
Compte tenu de la stagnation de nos achats de produits roumains en 2005 (+ 2.3%), à 1 646 millions d’euros, notre commerce bilatéral représente sur l’ensemble de l’année 2005, un peu plus de 3,8 milliards d’euros, en hausse de seulement 8,5% sur 2004. De fait, nos achats en provenance de la Roumanie traduisent en 2005, une envolée des matériels de transports, peu surprenante (effet Dacia), mais un recul d’autres postes importants tels que les produits mécaniques, métallurgiques, une quasi-stagnation des produits textiles et une faible progression des meubles. Ces évolutions posent la question de la compétitivité de l’industrie roumaine qui s’est érodée sensiblement depuis un an (appréciation du leu, hausses des coûts énergétiques et salariaux notamment, mais aussi retards dans la mise à niveau des infrastructures). Au total, notre commerce bilatéral a dégagé en 2005, un excédent de plus de 500 millions d’euros, soit le double de 2004.
Volume, évolution et domaines d’intérêt des IDE français en Roumanie
La France figure aujourd’hui au 3ème rang des IDE (3,3 millions d’euros d’encours selon nos estimations), derrière l’Autriche et les Pays-Bas, mais devant l’Allemagne. Toutefois, de par la diversité des secteurs d’activité de nos entreprises, notre rayonnement économique en Roumanie est plus grand que celui de nos concurrents « hollandais » (en fait, zone de transit d’IDE), ou autrichiens, concentrés sur la banque et l’énergie. De plus, les transferts de technologie associés à nos IDE sont particulièrement importants ainsi qu’en témoignent les investissements du groupe Saint-Gobain, notamment dans le verre-plat à Calarasi, le développement rapide et impressionnant de Renault Dacia, et celui de Michelin. Au-delà des transferts de technologie, les IDE français s’inscrivent dans la longue durée et ont un caractère structurant pour l’économie roumaine. En fait, nombre d’entreprises françaises ont littéralement sauvé des pans entiers de l’économie roumaine autrement voués à une disparition certaine dans une économie de marché, faute de capitaux et de savoir-faire. En 2005, le dynamisme des entreprises françaises en Roumanie ne s’est pas démenti : extension d’activités pratiquement dans tous les secteurs (distribution, pneumatiques, équipements automobile), rachat d’entreprises publiques (Distrigaz Sud par GDF), investissements en « greenfield » (verre plat, par exemple). Un retard cependant doit être constaté, celui de nos PME encore insuffisamment présentes, mais cette situation est aussi un potentiel à développer à l’avenir.
Rôle de la Mission économique française de Bucarest en faveur de la dynamisation des échanges bilatéraux.
Sachez que la Mission économique de Bucarest, qui dépend aujourd’hui de Bercy, plus exactement de la Direction générale du Trésor et de la Politique économique (DGTPE) dispose, hors encadrement, d’une quinzaine d’attachés et assistants couvrant tous les secteurs d’activité économique. Elle est aujourd’hui dans la zone d’Europe centrale et orientale, l’une des plus sollicitées par les entreprises du fait de la taille, des potentialités et des enjeux du marché roumain… qui plus est, naturellement, dans la perspective de sa prochaine adhésion à l’UE.
Le rôle central de la Mission économique de Bucarest est précisément de contribuer à la dynamisation permanente des échanges franco-roumains… de plus en plus, d’ailleurs, par la consolidation de la présence économique française en Roumanie qui est déjà forte et très diversifiée. Les investissements à l’étranger étant aujourd’hui les meilleurs vecteurs de développement des échanges commerciaux dans les deux sens (exportations et importations).
Ces missions, qui sont communes à celles de tout le réseau des 150 missions économiques réparties dans 120 pays dans le monde, sont nombreuses et se déclinent en une multitude de facettes.
On peut néanmoins en retenir trois principales :
Une première mission en amont, donc importante, car c’est un point de départ, qui est d’informer de façon permanente notre administration à Paris, nos partenaires naturels, notamment Ubifrance (notre nouvelle Agence pour le développement international des entreprises), tous les réseaux d’acteurs-partenaires du commerce international (CCI, associations et fédérations professionnelles, pour n’en citer que quelques-uns) et surtout les entreprises, au travers de nos divers supports de communication, comme le site web de la mission : www.misioneco.org/roumanie ; la Lettre mensuelle de Roumanie, la Revue de presse hebdomadaire (supports en général très appréciés) de tout ce qui se passe en Roumanie au plan économique, financier et commercial. Ces informations permettent ensuite à notre administration de définir des orientations et des actions d’appui public au développement international des entreprises (ainsi que les moyens nécessaires) tant au plan national que régional (en s’appuyant sur les DRCE) en faveur des entreprises intéressées par le marché roumain (aides à l’export, politique de crédit à l’égard du pays notamment, etc..) ; aux partenaires de mettre en place, toujours en direction des entreprises, des actions concrètes de prospection du marché roumain, quasi généralement en coopération avec la Mission économique (actions collectives sur salons spécialisés, semaines commerciales et journées techniques françaises, etc…) ; aux entreprises de décider de l’opportunité d’amorcer un courant d’affaires avec la Roumanie, mais le plus souvent, de venir tout simplement investir dans une implantation sur place, comme le font déjà de très nombreuses entreprises françaises…..
Une deuxième mission, qui est de soutenir et d’accompagner les efforts des entreprises qui ont pris la décision d’aborder le marché roumain et contactent alors la Mission économique pour affiner leur démarche commerciale. Ce soutien et cet accompagnement peuvent prendre diverses formes : informations de premier niveau aux demandes d’informations formulées depuis la France; entretiens à la Mission pour des conseils, des orientations, des contacts, lors d’une première prospection et visite sur place de l’entreprise ; enfin, propositions de prestations à réaliser par la Mission (facturables) lorsque la demande de l’entreprise va impliquer un travail d’enquête spécifique et « sur mesure » sur un secteur ou une thématique donnés …
Une troisième mission, qui concerne ce qu’on appelle aussi la « diplomatie économique ». Située souvent en aval de la démarche d’exportation ou d’implantation de l’entreprise mais qui peut se situer, en définitive, à tous les stades de cette démarche, souvent la moins visible. Elle regroupe en fait toutes les actions de la Mission (très souvent en étroite coordination avec notre ambassadeur) qui, pour faire simple, sont destinées d’une façon ou d’une autre à favoriser l’amélioration constante de l’environnement des affaires à tous les niveaux de l’activité de l’entreprise (finances, législation et réglementation, normes techniques, droit et justice, etc..). C’est, en Roumanie, pays encore en transition économique, une mission tout à fait essentielle de la Mission économique pour inciter les entreprises françaises à venir sur ce marché et à y rester en y développant leurs activités.
Au regard du potentiel considérable que recèle encore le marché roumain en matière d’équipements productifs, de biens intermédiaires et de consommation (durables et non durables), enfin d’infrastructures de tous ordres. Il ne fait aucun doute que le rôle d’information, de conseil, d’accompagnement et d’influence de la Mission économique de Bucarest, parfois en coordination avec les partenaires locaux que sont la Section des Conseillers du commerce extérieur de la France à Bucarest et la Chambre de commerce franco-roumaine en Roumanie, continuera à être incontournable à l’avenir pour le développement des relations économiques et commerciales franco-roumaines. |