Lundi 22 Avril 2019  
 

N°124 - Quatrième trimestre 2018

La lettre diplometque
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     Roumanie
 

La Roumanie et l’Europe, à nouveau réunies

Par M. Traian Basescu, Président de la Roumanie

 

Près d’un demi-siècle après notre séparation brutale et artificielle de la famille européenne, la Roumanie est en train de réaliser le plus beau rêve de la société roumaine : reprendre sa place au sein d’une communauté de valeurs que nous partageons et auxquelles nous souscrivons pleinement.

L’adhésion de la Roumanie à l’Union européenne – événement qui, nous sommes confiants, deviendra réalité le 1er janvier 2007 – représentera sans aucun doute l’un des plus importants jalons de notre longue histoire européenne.

Les Roumains ont exprimé la très haute priorité qu’ils accordent à cet objectif, sans jamais cesser de croire qu’il allait se réaliser. Notre pays a investi beaucoup d’efforts parce qu’elle est convaincue que son avenir est dans l’Union européenne. Une Union fondée sur la performance économique, le développement durable et la cohésion sociale. Une Union fondée sur les principes de la liberté, de la démocratie et de l’Etat de droit. Une Union dédiée à l’exercice de la tolérance, de la justice et de la solidarité. Une Union, enfin, déterminée à promouvoir le respect de la dignité humaine, de la liberté et des droits de l’Homme.

Aussi heureux que nous soyons de cette adhésion, je voudrais souligner que nous savons qu’elle n’est pas une fin en soi et que de nouvelles étapes importantes suivront. Nous nous préparons activement à apporter la contribution propre de la Roumanie à l’édification de l’avenir commun de tous les Européens. Nous sommes décidés à assumer notre part de responsabilité dans un esprit de solidarité avec nos partenaires.

 

La contribution de la Roumanie au dynamisme de l’UE

Nous voulons que l’adhésion de la Roumanie – qui sera le septième plus grand pays de l’Union européenne – confirme et renforce de manière significative la valeur ajoutée créée par l’élargissement aux pays d’Europe centrale et orientale, d’abord en ce qui concerne l’accroissement de la capacité de l’Union européenne à agir de manière unie et efficace dans un environnement politique, économique et social de plus en plus globalisé.

La Roumanie est un pays où les valeurs européennes jouent un rôle fondamental dans la vie sociale, culturelle et personnelle. Nous avons une grande expérience de l’interaction multiculturelle ; notre système éducatif produit, par exemple, des manuels scolaires en pas moins de sept langues. Les minorités bénéficient d’un cadre de protection juridique aux normes européennes et sont pleinement représentées au Parlement.

Notre pays a la chance d’avoir une population relativement jeune, qui dispose d’un haut niveau de formation et de qualification malgré les contraintes macroéconomiques et budgétaires que la période de transition a fait peser sur nous. Nous bénéficions notamment d’un potentiel reconnu et apprécié par les grands acteurs internationaux en matière d’expertise en informatique et en technologies de communication. Nous avons donc confiance en notre capacité à consolider le marché du travail européen dans ces secteurs.

Avec une population globale de près de 500 millions d’habitants, le marché de l’Union européenne élargie aux dix autres nouveaux Etats membres, ainsi qu’à la Roumanie et la Bulgarie, sera de loin le plus large marché intégré au monde. Au sein de ce marché, la Roumanie tout comme les autres nouveaux membres, enregistre depuis déjà plusieurs années une dynamique de croissance économique soutenue. Elle amorce ainsi un processus de convergence, et à terme de rattrapage, avec les autres économies européennes.

 

Des défis restent à relever

Le Rapport de suivi pour la Roumanie, rendu public par la Commission européenne le 16 mai constitue une photographie réaliste et crédible des performances de notre pays. La Commission européenne a évalué de manière exacte et professionnelle, les progrès enregistrés par la Roumanie au travers du processus de préparation à l’adhésion, en ce qui concerne les différents critères d’adhésion – politiques, économiques, et de respect de toutes les obligations liées au statut d’Etat membre. Cette évaluation de la Commission contient d’ailleurs tous les arguments qui confirment l’adhésion de la Roumanie au 1er janvier 2007, sans application de la clause de sauvegarde.

Le Rapport de suivi relève ainsi des progrès significatifs en matière de renforcement de l’Etat de droit : la réforme de la justice, l’accomplissement de progrès dans la lutte contre la corruption par la mise en place de structures solides et efficaces, ainsi que le lancement d’un nombre significatif d’enquêtes sur les cas de corruption à haut niveau. En outre, le Rapport reconnaît des résultats positifs dans les domaines de la protection de l’environnement, de l’administration publique, de la protection de la propriété intellectuelle, de la préparation à gérer les fonds communautaires et du respect des normes sanitaires et vétérinaires.

Il constitue également un guide pour l’action du gouvernement, pour la présidence, pour toutes les institutions de l’Etat, ainsi que pour l’ensemble des Roumains. L’intégration au sein de l’Union européenne résulte d’un effort collectif, d’un processus national mobilisant de manière solidaire l’ensemble de la nation roumaine autour de cet objectif majeur de politique intérieure et étrangère. Je suis convaincu que les résultats de la Roumanie, tels qu’ils sont mis en évidence dans le Rapport, fournissent de solides arguments pour accélérer le processus de ratification du Traité d’adhésion dans les pays qui, à cette date, ne l’ont pas encore achevé.  

Nous sommes conscients que les efforts de la Roumanie pour s’aligner sur les exigences européennes devront se poursuivre après l’adhésion. Nous savons que notre action   pour lutter contre la corruption et pour élever le niveau de vie d’une partie encore importante de la population n’est pas terminée. Les infrastructures roumaines requièrent d’importantes remises à niveau. Les différences entre les zones urbaines et rurales sont encore relativement élevées et nous devons veiller à ce qu’elles ne se creusent pas pour préserver la cohésion de notre pays. Nous savons que notre adhésion à l’Union européenne ouvre une autre perspective, tout en se gardant de ne pas oublier un seul instant que la lutte pour atteindre les meilleures normes européennes, est un combat que nous devrons gagner d’abord chez nous. Notre objectif stratégique est d’assurer à nos concitoyens la qualité de vie des autres citoyens européens, en rattrapant nos retards de performance économique par rapport aux Etats membres déjà développés. C’est un objectif que nous ne pourrons atteindre complètement qu’en maintenant fermement le cap, par des efforts constants pendant de longues années.

 

La Roumanie se prépare à assumer son rôle dans la sécurité européenne

Notre monde doit faire face à des problèmes globaux sans précédent, d’origine naturelle ou le plus souvent humaine : prolifération des armes de destruction massive, terrorisme, trafic international de drogues, d’armes et d’êtres humains, criminalité internationale organisée, réchauffement climatique, désastres naturels. Quand ils n’affectent pas directement l’Europe, ces problèmes touchent fréquemment des zones politiquement fragiles qui mettent en danger sa sécurité. Des menaces périphériques, en particulier les trafics en tous genres, prospèrent à la faveur de ces crises, et parfois contribuent à les alimenter. Constituant un havre de stabilité proche de plusieurs régions troublées, il n’est pas surprenant que la Roumanie se sente particulièrement concernée par ces problèmes, et qu’elle soit en faveur d’une action collective et déterminée de l’Union européenne pour les résoudre. Dans ce contexte, elle est prête à assumer le rôle qui revient aux pays d’une certaine dimension, fortement consciente des responsabilités particulières que cela implique.

La Roumanie assume d’abord ces responsabilités découlant de sa situation géographique, en prenant en charge la surveillance d’une frontière extérieure étendue, à l’Est de l’UE. L’adhésion de la Roumanie contribuera ainsi à atteindre l’objectif européen que constitue la consolidation de l’espace commun de liberté, de sécurité et de justice. Elle a d’ores et déjà mis en œuvre des efforts très importants, tant en termes d’hommes que d’équipement, pour garantir un haut niveau de sécurité sur cette frontière.

Notre pays est en outre devenu un catalyseur des évolutions démocratiques et de la stabilisation en Europe de l’Est et du Sud-Est, ainsi que dans la région de la Mer Noire – la stabilité, la démocratie et la prospérité de ces régions figurant au premier rang de nos intérêts. Par notre implication dans la résolution des problèmes de la région, nous souhaitons contribuer au renforcement de la sécurité à l’échelle continentale, tout en apportant notre concours à la capacité de réaction de l’Union. Un regard visionnaire et du courage sont aujourd’hui nécessaires pour lancer de nouveaux projets. La mission de l’UE en Transnistrie constituerait un premier pas dans ce sens et qui devrait être consolidé avec minutie et constance.

L’attention spéciale que la Roumanie doit porter à la République Moldave est une évidence pour nous, découlant de notre histoire et de notre culture communes. De ce fait, il est naturel que nous continuions à plaider, y compris au sein de l’UE, en faveur d’un appui à son cheminement vers l’Europe. Nous allons continuer nos efforts pour convaincre nos partenaires européens, en premier lieu de la nécessité d’une implication plus forte de l’Union européenne pour la résolution finale du conflit transnistrien, au bénéfice de la stabilité et de la sécurité régionale mais aussi de l’Europe toute entière.

Nous accordons également un intérêt particulier à la transition démocratique de l’Ukraine – Etat voisin et, en même temps, pays-clef du voisinage direct de l’UE. Pour trouver des issues aux problèmes qui subsistent dans nos relations bilatérales, comme la question du canal de Bistroe (dans le delta du Danube), nous allons recourir à une solution conforme aux normes européennes, auxquelles l’Ukraine aspire également à se rapprocher.

La région élargie de la Mer Noire constitue sans aucun doute la région où la Roumanie (et la Bulgarie) apportera sa contribution avec le plus fort impact à la Politique européenne de Sécurité commune (PESC). Il s’agit d’une région très complexe qui présente de grands défis à l’Union européenne – les conflits gelés, l’insécurité maritime, le trafic de personnes, de drogues et d’armes conventionnelles. En terme de dimension énergétique, comme la Roumanie l’a souligné à plusieurs occasions, elle est d’une importance particulière pour la sécurité future de l’UE, notamment parce qu’elle se pose en lien avec la Mer Caspienne et l’Asie Centrale – réalité de plus en plus reconnue dans toute l’Europe.

Il est en outre vital pour nous que l’UE maintienne son niveau d’engagement dans les Balkans. D’importantes avancées ont été accomplies ces dernières années en faveur de la stabilisation et de la démocratisation de la région, notamment au travers de la perspective européenne élaborée à Salonique. Nous considérons que l’engagement en faveur de l’adhésion à l’UE et à l’OTAN représente la meilleure voie vers un avenir de stabilité et de démocratie pour la région. Nous nous sommes engagés sans réserve dans les démarches visant à favoriser un rapprochement entre nos voisins des Balkans et les structures européennes et euro-atlantiques ; rapprochement que nous mettons au cœur de nos rapports bilatéraux avec chacun d’entre eux et que nous estimons d’ailleurs comme un fondement de la prospérité et de la stabilité régionale.

La Roumanie encourage ainsi le dialogue entre les parties directement impliquées, afin de trouver une solution négociée pour le statut du Kosovo. Une telle solution doit être trouvée tout en respectant les normes européennes pour fonder une société multi-ethnique.

Pour conclure en quelques mots, la Roumanie est totalement prête à reprendre sa place en Europe. En tant que nouveau membre, elle a l’ambition de prendre, dès son adhésion, toutes ses responsabilités en tant que partenaire actif et fiable, en apportant, aux côtés des autres Etats, sa contribution pleine et entière aux progrès d’une Europe forte, dynamique et respectée sur la scène internationale.

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