Par S.E.M. KWON Tae-shin, Ambassadeur, Représentant permanent de la Corée auprès de l’OCDE
Quel est le pays où plus de 70% des habitants, y compris ceux des régions rurales, sont connectés à internet haut débit et, où également plus de 70% de la population, y compris les personne âgées, les étudiants et les femmes au foyer utilise un téléphone portable? Quel est le deuxième pays après la Finlande, producteur de téléphones portables, le cinquième producteur de voitures et le premier producteur de bateaux dans le monde ? Auriez-vous une idée de quel pays je parle ? De la Corée.
Il y a 120 ans, quand la France a établi des relations diplomatiques avec la Corée pour la première fois, elle était connue comme « le Pays du Matin calme ». Cependant, ceux qui visitent la Corée aujourd’hui en auront une impression différente, celle d’une « Corée dynamique ».
A la fin du 18ème siècle, quand les grandes puissances européennes naviguaient sur les mers pour dominer le monde, le peuple de Choson (la dernière dynastie de Corée) vivait tranquillement de la culture de la terre dans une société confucianiste traditionnelle très conservatrice, sans se rendre compte des changements dans le monde extérieur. Puis la Corée passa par la période de la colonisation japonaise, et ensuite par la guerre civile (1950-53). Dans les ruines de cette guerre, la Corée se trouvait être l’un des pays les plus pauvres au monde.
Malgré ses difficultés, à partir des années 60, la Corée accéléra le développement de son économie en adoptant un modèle de développement économique fondé sur une mobilisation des ressources fortement planifiée par le gouvernement. Aujourd’hui, la Corée a accompli un véritable miracle économique, si l’on en juge par l’augmentation
de son PNB/hab qui s’élève à 15 000 dollars alors qu’il était de 80 dollars en 1960. Selon les données recueillies en 2004, la Corée se situait à la quatrième place mondiale pour la production nationale totale, et à la douzième place mondiale pour la dimension de son commerce international. La Corée est très connue dans les pays développés, y compris en France, grâce à des produits comme les téléphones portables Samsung, les automobiles Hyundai et les téléviseurs couleur LG. Cette année est le dixième anniversaire de l’adhésion de la Corée à l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économique), à laquelle on a donné le surnom de « club des pays riches ». Preuve que la Corée représente désormais un modèle pour les pays en voie de développement.
Durant les dix dernières années, après son adhésion
à l’OCDE, l’économie coréenne a subi une catastrophe qui a créé un nouveau paradigme et qui restera dans l’histoire de l’évolution de l’économie coréenne comme une
période capitale.
En effet, en 1997, une année après l’adhésion à l’OCDE, la Corée a traversé une situation critique résultant des remous de la crise financière asiatique. Néanmoins, les Coréens ont réussi à surmonter cette crise grâce au sens de la collectivité de la nation. Ce fut en fait une véritable bénédiction cachée. La Corée a accepté les standards mondiaux dans les domaines de la finance, de l’industrie, des services publics et de l’emploi pour mettre en oeuvre une réforme solide de ses structures. Les recommandations politiques de la part de l’OCDE ont été très utiles pendant cette période.
La Corée a également participé très positivement à la vague de la mondialisation en ouvrant ses portes aux investissements étrangers. L’économie coréenne s’est affermie à travers cette crise et a acquis la capacité d’une plus grande souplesse face aux chocs extérieurs. La Corée est maintenant prête à s’adapter aux changements de l’économie mondiale et aussi à poursuivre l’accélération de son développement.
Le dynamisme que les Coréens ont manifesté pendant ces dix dernières années trouve son origine, je crois, dans leur caractère. Tout au long des milliers d’années de leur histoire, les Coréens se sont aguerris à résoudre les crises. Le tempérament coréen se caractérise par le goût d’explorer le futur. La vitesse est également considérée en Corée comme une valeur sociale très importante. Par conséquent, les Coréens ont la capacité de réagir rapidement aux transformations de leur environnement ainsi que d’accomplir rapidement un changement. Des mots comme innovation technique, base de données, nouvelles technologies, économie numérique sont des mots très familiers pour les Coréens.
Malgré ce dynamisme, la Corée figure, sur plusieurs points, parmi les pays qui se situent en dessous de la moyenne des pays membres de l’OCDE et qui doit rattraper les autres. Elle a ainsi pour objectif de passer dans le groupe des pays au-dessus de cette moyenne, en utilisant son dynamisme comme tremplin, mais aussi à travers le développement durable que préconise l’OCDE. Il ne s’agit pas simplement d’un rêve, si l’on tient compte du fait que le taux de croissance économique moyen de la Corée durant ces dix dernières années s’est classé au second rang des pays de l’OCDE, derrière l’Irlande, et que le potentiel de son taux de croissance est de 4 à 5 %.
L’économie mondiale d’aujourd’hui est emportée par la vague de la mondialisation et le partage des informations. Personne ne peut prédire sa direction. Nous nous trouvons dans un monde où l’incertitude domine. La Corée fait à présent de son mieux pour trouver la force de continuer à croître en réfléchissant aux possibilités de réformes. En ce sens, la Corée espère apprendre de ses partenaires de l’OCDE, de leurs réussites comme de leurs échecs. Ce qui attire l’attention de la Corée est la croissance et la répartition, l’équilibre entre efficacité et équité sociale, d’une part et croissance de la production, d’autre part, pour atteindre un développement durable. La Corée espère que les pays membres de l’OCDE, notamment la France, pourront éclairer sa route à travers l’obscurité de la situation économique mondiale. |