Par Dr Vivian BALAKRISHNAN, Ministre des Affaires étrangères de la République de Singapour
2015constitue une année charnière dans l’histoire de Singapour. Nous avons célébré le 9 août, notre Jubilé d’or (SG50), puis, le 18 septembre, les 50 ans de nos relations diplomatiques avec la France qui est l’un des premiers pays à avoir reconnu notre indépendance en 1965. Tout un kaléidoscope d’événements a marqué les célébrations de ce moment clé. Auparavant, le Président Tony Tan Keng Yam avait effectué en mai la première visite d’État d’un dirigeant singapourien en France. Et durant trois mois, le succès du Festival Singapour en France a permis de promouvoir dans plusieurs villes françaises le meilleur de l’art contemporain et de la culture de Singapour. Depuis son indépendance, Singapour a accompli un long chemin. Ce qui n’aurait pas été possible sans le soutien de pays amis comme la France qui se sont tenus à nos côtés dès la première heure. En fait, les entrepreneurs et les enseignants français étaient déjà présents dans notre pays, bien avant son indépendance. Les exemples de ces liens historiques sont d’ailleurs nombreux. La marque d’aliments en conserve « Ayam Brand » lancée par le Français Alfred Clouët est devenue incontournable à Singapour et en Asie. L’une des premières écoles d’enseignement secondaire à Singapour, le Couvent de l’Enfant-Jésus, a été fondé par des missionnaires français. Plus récemment, c’est le couturier parisien Pierre Balmain qui a créé en 1968 le mythique uniforme Sarong Kebaya qui habille les hôtesses de Singapour Airlines (SIA). Au fil du temps, la France a progressivement renforcé sa présence à Singapour, y voyant une porte d’entrée stratégique sur une région Asie-Pacifique en forte expansion. Les géants de l’industrie française y sont bien représentés et contribuent de manière significative à l’économie singapourienne. Les grandes marques de luxe françaises y sont perçues comme des symboles de qualité et de sophistication. Dans un pays de gastronomes, les restaurateurs français ont su conquérir le cœur (et le ventre) des Singapouriens. Les artistes et designers français apportent régulièrement leurs contributions à notre scène artistique et culturelle. L’architecte français Jean-François Milou s’est ainsi vu confier la mission de fusionner deux bâtiments historiques, le City Hall et la Cour Suprême, en un unique espace intégré, la National Gallery, qui a, par ailleurs, ouvert ses portes en novembre et présentera la plus grande collection au monde de l’art d’Asie du Sud-Est. Des compagnies singapouriennes comme SIA et le Groupe Ascott apportent également leur contribution à l’économie française. SIA est le client de lancement du premier avion d’Airbus. Citadines, le réseau de résidences hôtelières du Groupe Ascott, continue de se développer. Au-delà de sa bonne coopération avec l’industrie de défense française, l’Armée de l’Air singapourienne (RSAF) mène depuis 1998 des programmes de formation pour ses pilotes sur la base de Cazaux. À ce propos nous tenons à remercier la France pour cette opportunité. Singapour s’emploie par ailleurs à agir sur la scène internationale, et travaille en étroite collaboration avec la France pour répondre aux grands défis mondiaux. C’est surtout par leurs efforts conjoints pour resserrer les liens entre l’Europe et l’Asie que la France et Singapour se sont particulièrement illustrés. C’est à cet effet que nous avons co-fondé en 1996 le Sommet Asia-Europe Meeting (ASEM) pour promouvoir le dialogue et la coopération entre l’Asie et l’Europe. Nous soutenons pleinement le travail de la Fondation Asie-Europe, basée à Singapour, et dont la mission est d’encourager le rapprochement entre les peuples asiatiques et européens. Soucieux des conséquences du réchauffement climatique sur une île comme la nôtre, Singapour a soutenu le travail de la France qui a présidé en 2015 la COP21. Dans les domaines de l’éducation et de la recherche, notre coopération s’étend sur une large gamme de secteurs d’activité, de celui des affaires à celui de l’animation numérique en passant par celui de la recherche scientifique et des arts culinaires. Deux des meilleures écoles de commerce françaises, l’INSEAD et l’ESSEC ont établi des campus à Singapour. Le Centre national de recherche scientifique (CNRS), fleuron de la recherche française, a créé quatre laboratoires conjoints avec plusieurs instituts de recherche singapouriens, dans des secteurs de pointe comme l’imagerie médicale, l’électronique et la photonique, la mécano-biologie et la science quantique. Des étudiants en art culinaire de l’Institute of Technical Education (ITE) participent à des programmes d’échanges à l’Institut Paul Bocuse Worldwide Alliance de Lyon, et des animateurs en herbe de la School of Interactive and Digital Media de l’Ecole Polytechnique de Nanyang viennent en stage d’été à l’École de l’image des Gobelins. La dynamique actuelle de nos liens bilatéraux est de bon augure quant à l’évolution future de notre partenariat stratégique, d’autant plus que celui-ci, qui repose sur une base solide, ne demande qu’à être hissé à un niveau supérieur. Je suis convaincu que nous saurons tirer un grand bénéfice de ce partenariat, qui nous permet de poursuivre ensemble nos intérêts mutuels en faisant front ensemble aux grands défis mondiaux, dans un contexte régional et international de plus en plus complexe. La visite d’État du Président Tan a constitué la toile de fond idéale pour développer de nouveaux secteurs de coopération dans la technologie spatiale, la cybersécurité ou la sûreté nucléaire. Nous attendons avec impatience la visite du Président François Hollande à Singapour pour renforcer encore davantage notre partenariat stratégique ainsi que notre coopération bilatérale dans les secteurs prioritaires. |