Lundi 22 Avril 2019  
 

N°124 - Quatrième trimestre 2018

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Comprendre la finance islamique et ses synergies avec la finance conventionnelle

Par Philippe-Henri Latimier, Ph.D. Consultant international en Réforme des Marchés de Capitaux & Professeur d’Ingénierie Financière

Dans un environnement économique mondial qui a vu ces derniers temps son intensité concurrentielle s’accroître de manière persistante, il n’est pas faux de dire que la finance islamique a connu une expansion fulgurante au point – à en croire certains experts – d’apparaître dans plusieurs domaines de la banque, tels le financement d’actifs et le financement de grands projets, comme un vecteur d’intermédiation financière alternatif doté d’un potentiel de développement significatif.

La finance islamique et la remise en cause du système financier international
Le poids du marché de la finance islamique serait évalué aujourd’hui à quelque 700 milliards de dollars soit 1% environ des actifs détenus à l’échelle mondiale. Pour 2008, on estime à 76 milliards de dollars le volume de « sukuk » – les titres de participations, bons, certificats d’investissement et obligations islamiques – émis, traduisant dans le même temps un taux de croissance de 26% par rapport à l’année précédente.
Dans ce contexte historique de croissance à deux chiffres, l’intégration de la finance islamique aux marchés des capitaux internationaux et des institutions financières a fait la démonstration éclatante de sa vitalité. Elle affiche quelque 25 milliards de dollars de financements décaissés en 2007 et 22 milliards de dollars rien qu’au titre de la première moitié de 2008, majoritairement au sein des pays du Golfe arabo-persique (60%) et en Asie (20 %).
Et dans une certaine mesure aussi d’une résilience surprenante à l’égard de l’onde de choc que vient de subir de plein fouet le système financier international mu – il faut le dire – depuis quinze ans par l’ivresse technique autant que par une avidité pécuniaire quelque peu démesurée de la part des professionnels des marchés.
La finance islamique, bien qu’affectée par la crise comme tout un chacun, aurait – sous réserve d’inventaire – été avantageusement immunisée dit-on par les règles de base de la Chari’a qui – précisons le ici – se présentent comme un corpus « d’obligations, de devoirs et de considérations morales servant à orienter les fidèles dans la direction de l’obéissance à Dieu ».
Faut-il rappeler à cet égard, que l’amplitude de la crise financière en Occident avec, notamment, la nationalisation-sauvetage en février 2008, de la banque Northern Rock au Royaume-Uni, puis la participation récente de la puissance publique à la recapitalisation d’établissements bancaires tels RBS en Ecosse, Citigroup aux Etats-Unis, Commerzbank en Allemagne et le groupe Caisses d’épargne-Banques populaires en France, autant d’opérations destinées à sauver de la faillite ces établissements et bien d’autres encore, et à permettre aussi au système de crédit de fonctionner à nouveau, nous aura fait prendre conscience de la mesure des errements des professionnels ?
Faut-il rappeler également ici que ces mêmes professionnels prétendument chevronnés de la finance de marché étaient plus que confortés dans leurs stratégies par les théoriciens experts en modèles mathématiques, persuadés qu’à vouloir rejeter toujours plus avant le risque qu’ils croyaient savoir valoriser en le fractionnant presque à l’infini, ils finiraient par s’en défaire ?
Au final, on retiendra la brutalité des chiffres et celle de la facture de 400 milliards de dollars (316 milliards d’euros) d’argent public déjà affecté à la recapitalisation des banques en sus des autres mesures de soutien comme les garanties massives sur les dépôts, voire la mise à disposition par les banques centrales de liquidités, en échange de titres de plus en plus risqués.
Et à laquelle devrait s’ajouter selon le FMI dans son rapport sur la stabilité financière dans le monde publié le 28 janvier dernier, 500 milliards de dollars au moins pour éviter que les fonds propres des banques américaines et européennes ne se détériorent davantage.
En somme, avec cette crise, à l’origine financière, qui touche désormais l’économie réelle aux quatre coins du monde, tout indique que nous venons d’assister à la sanction du modèle « Originate and Distribute » et celle de la financiarisation arborescente et systémique, caractérisée par la sophistication excessive des instruments financiers permettant de saupoudrer les risques sur le plus grand nombre d’établissements porteurs à l’échelle planétaire, sans pour autant les neutraliser.
Cette crise financière, comme toutes les autres, rouvre le débat sur la moralisation de l’argent, l’un des piliers de la finance islamique, ainsi que sur celui d’une exigence de responsabilité collective afin de permettre d’édifier le nouvel ordre financier international. Elle pose également la question d’une réforme du système financier tout entier désormais confronté au ralentissement économique comme la suite naturelle de la crise de liquidité à l’échelle mondiale qui braque les projecteurs de l’actualité sur des méthodes de financement alternatifs comme ceux que prônent la finance islamique.
Loin toutefois de vouloir apparaître comme la pierre philosophale ou le nouvel Eldorado de la finance, nul ne peut prétendre que la crise financière occidentale n’a pas affecté dans la foulée l’industrie de la finance islamique en raison de l’onde de choc liée à la baisse du cours du pétrole, de la dépréciation abyssale des valeurs d’actifs et, bien entendu, de la crise de liquidité à tout le moins tentaculaire.
Ce au point d’estimer désormais que son taux de croissance prévisionnel tournerait dans les prochaines années autour de 2% à 3%, le temps de digérer la crise dite des actifs « toxiques ».
Il semble à ce stade être encore trop tôt pour mesurer l’impact exact du « tsunami » financier auquel nous venons d’être exposés sur la finance islamique et quantifier en conséquence le niveau des provisions et abandons de créances portés par les établissements bancaires islamiques.

Les principes de la finance islamique

C’est sur cette toile de fond que s’inscrit ici notre propos inspiré notamment par la conférence organisée le 11 mars 2009 par le cabinet d’avocats d’affaires Clifford Chance (implanté de longue date au Maghreb et au Moyen- Orient), sous l’égide du Medef International, sur le thème du « Mode d’emploi de la finance islamique comme nouvelle source de financement pour les entreprises ». Cette conférence n’a eu d’autre objet que d’évoquer les synergies possibles entre la finance conventionnelle et la finance islamique pour permettre aux opérateurs qui le souhaitent de progresser d’un pas plus sûr dans la voie de demain, comme en témoigne le schéma ci-dessous à la signature de Clifford Chance.
Les différents intervenants ont tenté d’apporter quelques éléments de réponse aux questions que tout le monde se pose aujourd’hui, comme : Quelles leçons pouvons-nous d’ores et déjà tirer des apports de la finance islamique dans le contexte actuel d’assèchement de liquidités qui est le nôtre et qui compromet l’efficacité de toute relance à court terme ? Et ce à un moment où la liste des pays qui souhaitent faire appel aux institutions financières multilatérales s’allonge ?
Pour le dire autrement, en quoi les règles de gouvernance de la finance islamique constitueraient-elles autant de lignes d’action dont devrait s’inspirer la finance conventionnelle ?
Pour comprendre ce qui se passe, il convient de revenir sur les fondamentaux sur lesquels prend appui la finance islamique qui se veut à la base plus que rassurante en promettant l’existence d’un système financier intrinsèquement stable et pérenne dont le potentiel de développement resterait devant nous tant il est vrai que la Chari’a, la loi islamique telle qu’extraite des sources sacrées du Coran et la Sunna, permettrait la création de nombreux produits d’épargne inconnus du droit commun grâce à des montages spécifiques.
Notons à cet égard, que la philosophie de la finance islamique repose sur quelques principes forts inspirés notamment de plusieurs notions capitales comme le « Ijtihad », qui littéralement renvoie aux notions d’effort, d’ascèse, de travail sur soi, de diligence ainsi que le « Amana ou amanah) qui signifie littéralement la confiance et l’honnêteté, et constitue une valeur clé au sein des sociétés musulmanes, en matière de relations économiques ou financières.
Ces principes sont les suivants :
– Dieu est le créateur et le propriétaire de toutes les richesses ici bas.
– L’homo-economicus est responsable du mode de création, de distribution et de dépense des richesses qu’il fabrique.
– La création de richesse est autorisée voire encouragée pour autant qu’elle s’inscrit à l’intérieur de certaines règles et exercée notamment dans le cadre d’activités professionnelles voire de transactions licites (Halal).
– Pas de financement virtuel ou synthétique sous quelque forme que ce soit, en revanche une participation à l’économie réelle par l’entremise du commerce et de l’entreprenariat.
– L’incontournable partage du risque et du profit assorti d’une distribution équitable de la richesse.
– La monnaie n’est pas un actif en soi mais un simple moyen d’échange.
Sont prohibés par la Chari’a :
– La notion d’intérêt et les taux d’intérêt (Riba), parfois assimilés à l’usure même si son interdiction entend distinguer les échanges licites des échanges illicites ou l’une des parties au contrat serait lésée au bénéfice de toute autre. En d’autres termes, la Riba entend condamner toutes les formes de clauses léonines et d’asymétries contractuelles, y compris l’enrichissement du seul fait de l’écoulement du temps, considéré comme n’étant pas la résultante d’un effort ou d’un travail.
– L’incertitude (Gharar) dans les termes d’un contrat ou d’une opération de vente, ou les biens objets de la transaction ne seraient pas disponibles ou existant avec un degré de certitude minimal au moment de la clôture du contrat. On notera, à cet égard, que le terme renvoie à l’ambiguïté qui peut prévaloir dans les termes contractuels qui rendait – de facto – le contrat nul et non avenu.
– La spéculation (Maysir ou maisir), c’est-à-dire l’acte illicite de parier ou de s’engager dans les jeux d’argent avec l’intention de réaliser un profit facile qui ne serait pas assorti de création nette de richesse par le labeur.
– L’exploitation d’une personne tant physique que morale qui serait en détresse.
– L’injustice, la manipulation des prix, la fraude, le mensonge ou le dol.
– Les activités illicites ou interdites (Haram) et par extension les contrats et transactions qui seraient explicitement prohibés par le Coran ou la Sunna, cette dernière étant la deuxième source, en importance, de la « Révélation islamique », après le Coran, autrement dit, « la Voie et la Tradition du Prophète Mohammed », y compris ses propos, ses approbations et désapprobations explicites ou implicites, tels que nous les rapportent les « Ahaadith ».
– Le négoce de dette.
On l’aura compris, la Chari’a qui régule au quotidien plusieurs aspects de la vie quotidienne telles la spiritualité, l’éthique et le comportement des individus, autant que les droits et devoirs individuels et collectifs, défini également le cadre de conformité des transactions qui s’impose aux investisseurs et institutions développant des activités empruntées à la finance islamique sous le contrôle attentif des services de régulation et de conformité.

Une source de financement alternative

A un moment crucial où les entreprises occidentales peinent à se financer ou se refinancer sur les places occidentales durement éprouvées par la crise de confiance, il apparaît que les banques islamiques ou « desks » islamiques des banques généralistes constituent des sources de financement alternatives pour les entreprises en quête de liquidités.
A cet égard, trois types de montages clés en finance islamique permettent d’apprécier le potentiel d’utilisation parmi les particuliers comme parmi les entreprises de pays occidentaux.
On citera ici, le moucharaka, le moudaraba et le sukuk.
Le moucharaka est un contrat par lequel une banque islamique procède à un apport de fonds, lesquels sont mis en commun par les apports monétaires d’une ou de plusieurs entreprises, pour le financement en fonds propres d’un projet ou d’une autre société.
Tous les apporteurs de fonds propres sont également éligibles à la gestion de l’activité financée, mais n’y sont pas nécessairement tenus. Les profits sont distribués aux différents apporteurs de capitaux selon des modalités prédéterminées par consentement mutuel. En revanche, les pertes sont à la charge de chacun des co-actionnaires en proportion de leur contribution respective. Aucune clé de répartition n’est contractuellement possible s’agissant de l’allocation des pertes.
La moudaraba est une forme de contrat par laquelle une partie (le rab-al-maal) procède à un apport en capital, tandis que l’autre partie (le moudarib) fait un apport en industrie. Les parts de chacune des parties aux bénéfices de l’entreprise sont déterminées par consentement mutuel. En revanche, les pertes sont à l’unique charge de l’apporteur en capital, sauf à démontrer qu’elles émanent de la négligence du moudarib ou de la violation des termes et conditions qui le lie au rab-al-maal.
La moudaraba est typiquement utilisée par les banques islamiques ou les fonds islamiques, en tant que moudarib, dans leurs relations avec une certaine classe de pourvoyeurs de fonds à savoir les déposants en comptes de partage des profits et des pertes. Ces comptes de partage des profits et des pertes sont des dépôts ou comptes à terme dont les rendements servis par une banque islamique sont fonction de la profitabilité intrinsèque de ladite banque.
Le sukuk quant à lui représente des certificats d’investissement ou des titres de participation qui peuvent être cotés en bourse et, donc, faire l’objet d’une notation décernée par une agence de notation. Ils sont à la finance islamique ce que les obligations sont à la finance conventionnelle.
Les obligations islamiques dites sukuk sont des titres représentant pour leur titulaire un titre de créance ou un titre participatif dont la rémunération et le capital sont indexés sur la performance d’un ou plusieurs actifs détenus par l’émetteur, affectés au paiement de la rémunération et au remboursement des sukuk.
Le « pricing » s’effectue à taux fixe ou à taux flottant à la discrétion de l’émetteur. D’une grande flexibilité, les sukuk ont l’avantage de pouvoir être structurés au sein de différents types de contrats tels le murabaha (contrat de vente), le ijara (leasing ou crédit-bail), et le musharaka (partenariat).
Précisons ici que le murabaha constitue le contrat de vente d’un bien comprenant une marge clairement et explicitement déterminée au delà du coût d’acquisition de ce bien par l’intermédiaire. A cet égard, il existe deux versions possibles de vente sous forme de mourabaha. Dans la première, la banque islamique acquiert des biens et les met ensuite à disposition de ses clients acheteurs, sans pour autant avoir reçu, au préalable, la promesse des clients qu’ils achèteraient effectivement les bien précités. Dans ce cas de figure, l’on parle de « mourabaha spot » ou normale.
Les professionnels de la banque retrouvent dans le mode opératoire du « mourabaha spot » les principes du crédit « revolving », nonobstant qu’ici l’achat et la revente spot permet la mise à disposition des fonds et que le fait que le prix différé soit plus élevé que le prix « spot », permet au final à la banque de percevoir un rendement sur l’opération au demeurant parfaitement en phase avec les principes de la Chari’a.
La seconde version présuppose la promesse du client d’acquérir effectivement le bien auprès de la banque vendeuse. On parle dans ce cas de mourabaha assortie d’un ordre d’achat. Dans cette hypothèse, le prix de revente est prédéterminé, tout comme la marge qui y est incluse. La plupart du temps, un tel schéma implique que la banque islamique accorde à son client une facilité de crédit mourabaha dont le remboursement différé s’effectue en général par paliers périodiques.
Les sukuk peuvent également être structurés à l’intérieur de contrats de location vente ou ijara ou bien leasing en anglais. Dans ce type de contrat ijara, donc de location ou transfert de droit d’usage d’un bien ou d’un service, pour une durée déterminée, et pour un usage précis et licite, la banque islamique met en location ou crédit-bail un bien d’équipement ou un immeuble à son client, en contrepartie d’un loyer périodique prédéterminé contractuellement.
A noter que la finance islamique décline d’autres formes de contrats de leasing appelés « ijarah wa’qtina » ou « ijarah muntahia bittamlik », également largement utilisés par les institutions financières islamiques qui comportent la promesse du crédit bailleur de transférer l’entière propriété du bien loué à son locataire, soit au terme du contrat de crédit-bail, soit par paliers pendant la durée de vie du contrat. Enfin, les sukuk peuvent être structurés dans le cadre de contrats de moucharaka dont la technique a été précédemment définie.
S’agissant des paramètres clés à étudier pour s’assurer de l’adéquation du montage au regard des principes de la Chari’a, on retiendra notamment :
– L’existence d’actifs tangibles, préalablement validés au niveau de leur nature par la Chari’a et logés dans le bilan de l’entité désireuse de lever des fonds par le biais des sukuk.
– L’importance de ces actifs doit être en rapport avec la taille de l’émission visée.
– Le mode d’utilisation des actifs à travers la structure.
– L’approbation de la documentation juridique (fatwa) par des savants de la Chari’a faisant autorité.
A titre d’exemples d’émissions de sukuk depuis ces dernières années, sous l’égide ou avec le concours de la Kuwait Finance House, citons ici à la rubrique des sukuk al ijarah :
– en Allemagne par le territoire de Saxe-Anhalt, en 2004, pour 100 millions d’euros ;
– en Arabie saoudite par Dar Al-Arkan, en 2007, pour 1 milliard de dollars ;
– à Bahreïn, par la Banque Centrale de Bahreïn, en 2008, pour 350 millions de dollars ;
– aux Emirats arabes unis (UAE), par l’AED, en 2008, pour 3,75 milliards de dollars.
Citons également, et toujours à titre d’exemple, mais à la rubrique cette fois-ci des « sukuk al Musharaka » :
– aux Etats-Unis, par East Cameron Partners, en 2006, pour 165,7 millions de dollars ;
– à Bahreïn, par Diyaar Al Muharraq, en 2007, pour 200 millions de dollars ;
– aux Emirats arabes unis (UAE), par Jafzar, en 2007, pour 2 milliards de dollars ;
– à Bahreïn, par Residential South Real Estate Development (« Villamar »), en 2008, pour 190 millions de dollars.
En marge des activités financières par le biais de sukuk et de moucharaka, on a vu apparaître, depuis quelques années, des montages financiers mixtes assortis d’un haut niveau de sophistication dans le cadre notamment du financement de grands projets d’infrastructure.
Tel est l’exemple du projet Dolphin de coopération stratégique mis en place en 2005 conjointement par le Qatar, les Emirats arabes unis et Oman, à l’intérieur d’un partenariat triangulaire noué entre Mubadala pour 51%, TOTAL pour 24,5% et OXY pour 24,5%, destiné à produire et transporter du gaz naturel en provenance du Qatar et à destination des Emirats arabes unis et d’Oman. Soit, l’équivalent de 2 milliards de mètres cube par jour de gaz naturel et autres produits dérivés convoyés par le truchement d’un pipeline sous-marin construit pour les besoins de la cause. Ce projet représente un endettement global de 3,45 milliards de dollars dont 1 milliard de dollars de financement islamique levé par la Dubai Islamic Bank.
A bien des égards, le projet Dolphin permet de prendre la mesure – à la fois – des synergies possibles entre finance conventionnelle et finance islamique, et de la surprenante concordance d’intérêts entre deux courants de pensée assis sur des principes fondamentalement différents. Un mélange des « genres » qui, autrefois, serait apparu comme une alliance improbable.
Dans le domaine du capital investissement, la finance islamique fait également bon ménage avec le musharaka qui revendique le partage des profits et des pertes ainsi que l’investissement dans l’économie réelle avec l’utilisation d’actifs tangibles sous-jacents.
Pour conclure, la perception de la finance conventionnelle a changé. La modélisation financière extravagante et le « découplage » entre le financier et le réel ont joué un rôle fatal dans la transmission systémique de la crise. En se donnant une mission, celle de se tenir à l’écart de la spéculation, la finance islamique se démarque de celle que l’Occident a mise en œuvre depuis l’émergence de la finance de marché au détriment de la banque créatrice de valeur.
Elle s’octroie ainsi des marges de manœuvre stratégiques face à une situation internationale sur les marchés de capitaux plus que confuse. En réponse, l’Occident doit veiller d’abord à dessiner un ordre financier nouveau, dont les bases viennent d’être jetées à grands traits à l’occasion du G20 à Londres, car si le monde est confronté à une crise conjoncturelle de la finance, il n’est pas pour autant confronté comme d’aucuns ont cru le comprendre à une crise structurelle du capitalisme. 
Le marasme actuel ne saurait être imputable aux mécanismes du marché ni aux principes du libre-échange, mais aux excès de la finance de marché et au cortège de crédits dérivés et toxiques qui l’accompagne. 
Enfin, osons le dire, l’Occident doit aussi en réponse tenter de renouer, peut-être, avec la sagesse antique qui nous apprend que seule la modération rend possible la puissance !

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