Lundi 22 Avril 2019  
 

N°124 - Quatrième trimestre 2018

La lettre diplometque
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     Editorial
 
  M. Philippe Douste-Blazy

Répondre aux défis d’un monde en profonde mutation

Par M. Philippe Douste-Blazy, Ministre des Affaires étrangères

 Le temps est aux évolutions rapides et profondes. Un nouveau monde est en train de naître, où les défis, les craintes mais aussi les espoirs sont immenses, à la mesure de notre interdépendance. Car si la mondialisation a bouleversé toutes les certitudes, elle a aussi ouvert de nouvelles opportunités pour l’ensemble de la  communauté internationale. C’est cet esprit de responsabilité collective que j’ai eu l’honneur d’exprimer, en septembre dernier, à New York, en présentant devant la 60ème Assemblée générale des Nations unies la vision portée par notre pays d’une mondialisation plus sûre et plus juste, une mondiali-sation plus humaine, car mieux maîtrisée. En matière de sécurité, de développement, de santé, d’environnement, nous le savons, les enjeux sont tels que la seule voie réside dans l’action collective, dans l’exercice de notre solidarité qui passe avant tout par le respect du droit et l’adoption de règles communes.    C’est forte de ces convictions, et confiante dans l’affirmation d’un dialogue multilatéral plus efficace, que la France continuera cette année de se mobiliser sur la scène internationale, défendant les valeurs universelles auxquelles elle croit, s’attachant à prévenir les crises et à répondre aux défis d’un monde en profonde mutation. D’ores et déjà, des étapes importantes ont été franchies. En Irak, l’objectif est à présent de parvenir à un consensus entre toutes les communautés, condition indispensable de l’unité et de la stabilité du pays. Nous continuerons d’apporter tout notre soutien aux autorités irakiennes dans cette étape décisive vers la construction d’un Irak libre, démocratique et pleinement souverain. Au Proche-Orient, le désengagement réussi de Gaza est une victoire importante pour la paix dans cette région du monde. Le moment est venu de reconstruire la confiance, et d’abord en partant de la réalité du terrain. C’est dans cette direction que la France et l’Union européenne ont choisi de s’engager, pour soutenir le développement d’une économie de la paix, pour renforcer aussi le contrôle des capacités palestiniennes à la frontière de Rafah et la restructuration de la police palestinienne. A présent, un processus politique doit s’engager rapidement entre les parties si l’on veut éviter le risque de détérioration qui menace en permanence. Les conditions de la paix, définies par la feuille de route, sont claires. Nous en connaissons les principaux paramètres que la négociation doit permettre d’ajuster, qu’il s’agisse de la frontière, des colonies, des réfugiés, du statut de Jérusalem. Aujourd’hui, c’est aux Israéliens et aux Palestiniens qu’il revient de saisir l’occasion qu’ils ont su se donner de vivre durablement côte à côte, en paix et en sécurité.    Au Liban, l’évolution du contexte politique montre ce qu’il est possible d’accomplir grâce à une mobilisation internationale résolue, appuyée sur la volonté courageuse d’un peuple. Le départ de l’essentiel des forces syriennes a ouvert la voie aux premières élections libres depuis plus de trente ans. La France restera mobilisée aux côtés du gouvernement et du peuple libanais pour consolider ces premiers progrès et permettre à leur pays de recouvrer sa pleine indépendance. Nous continuerons aussi d’appuyer les travaux de la commission d’enquête internationale, afin que face aux odieux assassinats, justice soit rendue, et tous les coupables punis. Par-delà les crises régionales, les défis auxquels nous sommes confrontés exigent toujours davantage de coopération et de solidarité. C’est d’autant plus vrai que dans le monde ouvert qui est le nôtre, les grandes menaces sont intimement liées entre elles. Le terrorisme et la violence organisée prospèrent sur les conflits non résolus et la pauvreté. Les risques pandémiques sont favorisés par le sous-développement et les lacunes des systèmes de santé publique. Renforcer la sécurité, consolider la paix et prévenir les crises, tout cela passe avant tout, du point de vue de la France, par l’ambition renouvelée d’une vraie solidarité entre le Nord et le Sud. Notre pays a montré l’exemple, en décidant d’augmenter son aide publique au développement à 0,5% de sa richesse nationale en 2007, pour atteindre ensuite   0,7% en 2012. Mais au-delà de l’aide, il nous revient aussi de conforter les facteurs d’une croissance économique durable du continent africain. C’est pourquoi nous continuerons d’agir, en particulier dans le cadre du cycle de Doha, pour que l’ouverture des échanges bénéficie réellement et en priorité aux pays les plus pauvres. Nous devons aussi travailler au retour des compétences et des capitaux africains dans leur pays d’origine : c’est toute la problématique du co-dévelop-pement sur laquelle j’entends conduire un effort déterminé. L’accès universel aux traitements est aussi un défi important, qui ne pourra se faire sans une augmentation de la production de médicaments dans les pays du Sud, et en particulier, sans l’accès aux traitements du VIH/Sida dits « de deuxième ligne ». La France entend faire des propositions dans ce domaine, notamment pour soutenir les capacités de production et l’accès aux génériques dans les pays du Sud. Après la facilité financière internationale appliquée à la vaccination, en place depuis septembre dernier, nous continuerons de défendre sur la scène internationale notre projet de prélèvement pilote sur les billets d’avion pour augmenter la quantité et la qualité de l’aide. Grâce à cette contribution de solidarité, un fonds d’achat de médicaments contre le sida, le paludisme et la tuberculose pourrait être créé. C’est pour faire avancer cette idée que la France accueillera en février 2006 une conférence internationale qui réunira l’ensemble des acteurs publics et privés intéressés. Bien d’autres défis, bien d’autres enjeux nous attendent. Dans le domaine culturel, l’adoption à l’UNESCO d’une Convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles a constitué une remarquable avancée. Il nous faut à présent ratifier ce texte pour qu’enfin, chaque pays se voie reconnaître le droit souverain d’adopter et de mettre en oeuvre les mesures qu’il jugera nécessaires afin d’assurer la promotion de ses œuvres et de ses créateurs. Autre défi, celui de l’environnement, enjeu écologique mais aussi enjeu de développement, qui concerne au plus près l’avenir de nos enfants. Notre responsabilité est historique face au changement global qui affecte notre planète. C’est pourquoi la France continuera de demander la ratification des protocoles internationaux, en particulier celui de Kyoto. Nous resterons aussi mobilisés autour de la création d’une Organisation des Nations unies pour l'Environnement. Car le dévelop-pement durable n’est pas un luxe, mais le prolongement de notre interdépendance et le choix ambitieux d’un avenir qui réconcilie croissance, innovation et responsabilité. L’Europe, enfin, demeure un enjeu crucial et une priorité. L’accord obtenu récemment sur le budget de l’Union européenne permet de relancer l’Europe, désormais capable d’assurer le financement de ses politiques communes et de son élargissement. Il nous revient à présent de lancer de nouvelles initiatives ambitieuses et concrètes au service d’une Europe politique, d’une Europe sociale, d’une gouvernance économique renforcée, bref, d’une Europe des projets, qui redonne confiance aux citoyens tout en satisfaisant aux impératifs de croissance et de compétitivité du monde d’aujourd’hui. Le lancement réussi du programme de navigation par satellite Galileo montre ce qu’il convient de faire. Sept mois après le 29 mai 2005, il témoigne avec éclat de ce que les Etats européens sont capables d’accomplir ensemble en termes d’emploi, de compétences et de savoir-faire pour répondre aux défis technologique, écologique et sanitaire du 21ème siècle. C’est sur ce chemin qu’il nous faut maintenant poursuivre, notamment dans ces trois domaines majeurs que sont les nano-, les info- et les biotechnologies. Celui d’une Europe forte, indépendante, mais dans le même temps capable de renforcer ses liens de coopération avec d’autres Etats. Celui aussi d’une Europe qui doit se montrer tout à la fois stratégique et concrète, porteuse d’une vision d’avenir pour les citoyens et résolument inscrite dans leur vie quotidienne. En conclusion, je souhaite rendre un hommage particulier aux membres des missions diplomatiques et consulaires et des organisations internationales œuvrant dans notre pays. Leur action vient compléter utilement celle du Ministère des Affaires étrangères, car pour agir et réussir dans un monde en constant changement, nos compatriotes à l’étranger doivent pouvoir compter sur le soutien de tous ceux capables de faciliter, sur place, leurs échanges, leurs investissements et leur mise en réseau.
Plus de deux millions de nos concitoyens vivent et travaillent actuellement hors de France. Leur dynamisme, leurs talents, leurs ressources, représentent une richesse incomparable qu’il revient partout de valoriser.
 A la place qui est la mienne, j’entends appuyer leur action, afin qu’avec le soutien de notre réseau diplo-matique, l’un des plus denses au monde, la grande communauté des Français à l’étranger puisse participer avec audace et créativité à une démarche d’influence qui est vitale pour notre pays.        
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