Lundi 22 Avril 2019  
 

N°124 - Quatrième trimestre 2018

La lettre diplometque
  Éditorial
Entretien exclusif
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La lettre diplometque
La lettre diplomatique Haut
     Etats-Unis
 
  S.E.M. / H.E. Craig Roberts Stapleton

Une puissance sur tous les fronts

 

Engagés en Irak et en Afghanistan au nom de la lutte pour la démocratie et la liberté dans le monde, les Etats-Unis sont également en première ligne de la lutte contre la prolifération nucléaire et ont redoublé leur soutien aux pays en voie de développement. Au lendemain des élections de mi-mandat du 7 novembre dernier, S.E.M. Craig Roberts Stapleton, Ambassadeur des Etats-Unis en France, nous rappelle les grands axes de la politique étrangère américaine.

 

 

La Lettre Diplomatique : Cinq ans après les attentats terroristes du 11 septembre aux Etats-Unis, comment qualifieriez-vous l’impact de cet événement sur la société et ce qui a été fait depuis pour rendre le monde plus sûr ?

 

S.E.M. Craig Roberts Stapleton : Le cinquième anniversaire du 11 septembre fut l’occasion pour la communauté internationale de réaffirmer sa condamnation sans équivoque de tout acte terroriste. Les victimes du 11 septembre étaient originaires de plus de 90 pays différents et adhéraient à plusieurs religions, parmi lesquelles le christianisme, le judaïsme et l’islam. Le terrorisme nous affecte tous. Il nous a apporté la tragédie, la destruction, la mort et une peine immense pour de nombreux innocents à travers le monde, de l’Indonésie au Maroc, à l’Espagne, la Jordanie, l’Angleterre, l’Inde et l’Egypte.

Les actes terroristes contre les Etats-Unis et nos amis et alliés ont commencé bien avant que l’on ne renverse le régime des Talibans, qui abritait Al-Qaida en Afghanistan, ou que l’on mette fin au régime brutal de Saddam Hussein en Irak.

Les terroristes, comme les responsables du 11 septembre et ceux qui pourraient être derrière le récent complot de faire exploser des avions en partance de Londres, ont depuis longtemps pris pour cible des personnes innocentes. Leur but est d’imposer un régime tyrannique, qui ressemble à celui des Talibans, aux nombreuses nations souveraines du monde islamique, et ils n’ont que de l’intolérance pour tout ceux qui ne partagent pas leurs croyances extrémistes. Ils ont constamment montré leur mépris pour la vie humaine, quelles que soient   la race, l’origine ethnique ou la religion. Nous avons vu le genre de société qu’ils cherchent à imposer sous le règne des Talibans en Afghanistan : les filles ne pouvaient aller à l’école, les femmes n’avaient pas le droit de travailler, la musique était bannie, et les monuments culturels et historiques détruits.

La lutte contre le terrorisme est une lutte pour maintenir les valeurs et les principes universels. En tant que citoyens du monde, ce qui nous réunit est de loin supérieur à ce qui nous sépare. Au-delà des frontières, nous partageons une humanité commune. Bien que la couleur de notre peau, la langue que nous parlons ou nos lieux de culte soient différents, partout dans le monde les gens souhaitent pouvoir dire ce qu’ils pensent,   participer dans leur société, vivre librement leur religion, se sentir en sécurité, et avoir accès à l’éducation, à un emploi et à de meilleures opportunités pour leurs familles. En tant que communauté internationale, nous devons favoriser les débats, encourager l’éducation et mettre à disposition l’information, car nous croyons que la plupart des personnes, partout dans le monde, quelle que soit leur croyance, choisiront la liberté plutôt que la tyrannie et la tolérance plutôt que l’intolérance.

Malgré les tentatives répétées d’Al Qaida pour présenter le monde comme étant en plein choc de civilisations, le fait est que la communauté internationale s’est unie comme jamais auparavant pour affronter les menaces communes et alléger la souffrance humaine de tous les peuples, y compris les musulmans. L’Amérique y contribue en travaillant en partenariat avec les pays du monde islamique, pour améliorer la vie de tous les musulmans. Les Etats-Unis représentent le plus grand donateur pour les Palestiniens, aux travers de l’ONU et de différentes organisations internationales. Les Américains furent aussi les plus grands donateurs auprès des musulmans affectés par le tsunami en Indonésie et le tremblement de terre au Pakistan. Nous donnons des fonds pour que les garçons et les filles musulmans puissent aller à l’école, pour que les femmes musulmanes puissent apprendre l’anglais, pour que les jeunes musulmans reçoivent des formations débouchant sur des emplois. Nous avons libéré le Kuwait de l’invasion et, au Kosovo et en Bosnie, protégé les minorités musulmanes oppressées par les chrétiens. En Afghanistan et en Irak, nous travaillons en partenariat avec les dirigeants musulmans élus démocratiquement afin d’assurer la liberté et la sécurité aux populations qui furent brutalement traitées sous les Talibans et Saddam Hussein.

Nous pensons au 11 septembre 2001, mais nous regardons aussi en avant. Nous travaillons en nous associant à des personnes et à des nations à travers le monde pour affronter cette idéologie de haine et encourager un climat d’espoir et d’opportunités. Nous ne sommes pas parfaits, néanmoins nous croyons que les idéaux de liberté et de justice qui nous guident sont justes et vrais pour tout le monde. Nous voulons travailler en partenariat avec des nations à travers le monde pour que le monde soit plus paisible et prospère ; comme l’a dit le Président Bush lors de son discours du 11 septembre 2006 : « L’une des armes les plus fortes de notre arsenal est le pouvoir de la liberté. Les terroristes craignent la liberté tout comme notre puissance de feu. Ils sont paniqués à la vue d’un vieil homme se rendant aux urnes, ou lorsque des filles s’inscrivent à l’école ou que des familles vénèrent leur Dieu selon leurs propres traditions. Ils savent que s’ils peuvent choisir, les gens choisiront la liberté et non leur idéologie extrémiste ».

 

L.L.D. : Au niveau national, le désastre causé par l’Ouragan Katrina en 2005 continue d’avoir des répercussions. Comment expliquez-vous la façon dont cette catastrophe a été gérée par les autorités américaines ?

 

S.E.M. C.R.S : L’ouragan Katrina a été la catastrophe naturelle la plus grave qu’aient connue les Etats-Unis, faisant plus de 1 836 morts et 705 disparus, et occasionnant des milliards de dollars en pertes matérielles. Il a contraint des centaines de milliers d’Américains à se reloger, temporairement ou de façon permanente, dans d’autres Etats des Etats-Unis. Comme c’est souvent le cas lors de désastres de cette ampleur, nos amis se sont mobilisés de par le monde – y compris de pays eux-mêmes en pleine reconstruction, comme le Bangladesh, le Sri Lanka, l’Inde, l’Indonésie, la Thaïlande ou encore les Maldives –   offrant leur aide généreuse aux Etats-Unis. Les nations, les associations, les entreprises, les simples citoyens du monde entier ont envoyé des dons, s’élevant à plusieurs milliards d’euros afin de soulager la souffrance des personnes touchées et de les aider à reconstruire leurs vies et leurs quartiers. Les citoyens français à eux seuls ont donné plus de 500 000 euros au profit du Fonds pour les victimes de l’Ouragan Katrina. La formidable générosité de citoyens d’un pays ayant des liens historiques avec cette région des Etats-Unis est un vif exemple de l’humanité et de la compassion qui nous unissent tous en tant qu’êtres humains.

Nous avons accepté avec reconnaissance l’aide du Gouvernement français en matière de fourniture de matériel, d’envoi de plongeurs et de soutien logistique. Particuliers et associations de toute la France, ont fait parvenir à notre ambassade des centaines de messages de condoléances ainsi que d’offres d’assistance, qu’il s’agisse de propositions d’hébergement, de bourses pour les étudiants ou de contributions financières. Nous avons été particulièrement touchés par ces gestes de solidarité et d’amitié.

L’ampleur de l’ouragan Katrina a finalement servi de catalyseur pour des réformes ambitieuses. Immédiatement après le passage de l’ouragan, les autorités locales ont pris la mesure de la dévastation, mais en raison de la destruction de l’infrastructure et des moyens de réaction, elles ont été privées des capacités de communiquer entre elles et de coordonner leurs actions. Les autorités fédérales ont rassemblé tous leurs efforts pour accomplir les tâches généralement dévolues aux autorités locales, telles que le sauvetage des personnes bloquées par la montée des eaux, le maintien de l’ordre et l’évacuation des derniers habitants de la Nouvelle-Orléans, ceci sans l’avantage d’une action préparée et coordonnée par les autorités locales de gestion de crises.

Nous admettons que la réponse du Gouvernement fédéral à la situation d’urgence a été ralentie, mais les autorités locales sont les mieux à même de faire face aux incidents qui surviennent dans leur juridiction et elles continueront à jouer un grand rôle dans la gestion de ces catastrophes. Dans le même temps, les Américains sont en droit d’attendre du Gouvernement fédéral qu’il continue à jouer un rôle efficace face aux situations de crise.

A cette fin, nous nous basons sur les mesures adoptées après les attentats du 11 septembre en matière de sécurité intérieure pour élaborer un Plan national d’Alerte préventive. Ensemble, nous renforcerons notre capacité à nous préparer, à nous protéger, à réagir et à nous reconstruire en cas de catastrophes, qu’elles soient naturelles ou le fait de terroristes. Il n’y pas de mission plus grande et elle constituera notre hommage aux victimes de l’Ouragan Katrina.

 

L.L.D. : Comment expliquez-vous la situation en Irak et ce glissement apparent vers la guerre civile ? Quelles mesures sont adoptées pour assurer la sécurité, notamment celle des habitants de Bagdad où les attaques sont nombreuses ?

 

S.E.M.C.R.S. : La situation en Irak est très difficile car un ennemi s’y emploie pour bloquer la construction de cette nouvelle démocratie, de même qu’il y en a qui essaient d’entraver l’essor d’un Etat Palestinien et d’autres qui tentent de saper la démocratie au Liban. Nous n’avons aucun doute sur le fait que les terroristes et tous ceux qui s’opposent à la paix continueront à encourager la haine entre communautés et à prendre pour cibles des innocents dans leur tentative désespérée d’annihiler tout progrès vers un Irak libre et stable – raison de plus pour que la communauté internationale reste engagée et ne tourne pas le dos à l’Irak qui a tant besoin d’aide.

Avec près de 7 millions d’habitants, Bagdad attire toute l’attention dès que la ville est victime d’attaques terroristes. C’est la cible principale des terroristes, des groupes armés illégaux et de tous les extrémistes violents qui ne cherchent qu’à bafouer la nouvelle démocratie en Iraq et à entraver les progrès du gouvernement élu. C’est pourquoi l’initiative de sécurité de Bagdad, connue sous le nom de Amaliya Ma’an Ila al-Amam (ou Operation Together Forward, « Avançons Ensemble ») a été adoptée, non seulement pour réduire immédiatement la violence, mais aussi pour déraciner les causes de cette violence entre groupes religieux. Le plan du Premier ministre Maliki pour sécuriser Bagdad est étroitement lié à un programme plus large de réconciliation nationale qui cherche à promouvoir une entente politique entre les Sunnites, les Kurdes et les Chiites, y compris ceux qui contrôlent ou influencent les groupes illégalement armés impliqués dans le conflit entre groupes religieux.

Cet effort de réconciliation montre déjà des résultats. Dans le quartier Rachid de Bagdad, les dirigeants politiques Sunnites et Chiites, les dirigeants des tribus ainsi que les imams se sont réunis pour signer un accord par lequel ils s’engagent à renoncer à la violence. Les dirigeants des tribus sont allés encore plus loin en renonçant à protéger tout membre de leur tribu qui s’engage dans le conflit entre groupes religieux. Tout près de là, dans la province de Babil, une conférence de réconciliation prit fin avec la signature d’un serment par les cheiks des tribus s’engageant à travailler main dans la main avec les autres dirigeants de la province.

Les dirigeants et le peuple Irakien ont tenu bon face aux horribles actes terroristes et à la violence entre groupes religieux ; quant aux Etats-Unis, ils ne les abandonneront pas dans leur lutte pour construire une nation libre. L’Amérique et ses partenaires de la coalition resteront aux côtés du gouvernement démocratique élu par les Irakiens. En accord avec les Nations unies et par le biais du Contrat international avec l’Irak, nous continuerons à nous assurer que le pays bénéficie de l’aide internationale et des investissements indispensables à la création d’emplois et de perspectives d’avenir.

Les Etats-Unis continueront aussi à former les Irakiens qui se sont portés volontaires pour combattre les ennemis de la liberté. Nous n’abandonnerons   pas le futur de l’Irak aux terroristes et aux extrémistes. En retour, les dirigeants Irakiens doivent se montrer à la hauteur des défis que doit relever leur pays et faire des choix difficiles pour assurer la sécurité et la prospérité. En travaillant ensemble, nous participerons au succès de la démocratie irakienne qui doit montrer la voie de l’espoir pour des millions d’hommes dans le monde musulman.

 

L.L.D. : Washington a dénoncé à maintes reprises le rôle joué par l’Iran en tant que facteur déstabilisant pour la région. Au-delà de son programme nucléaire, comment évaluez-vous l’importance du rôle de l’Iran au Moyen-Orient ?

 

S.E.M.C.R.S. : Les Etats-Unis et la France partagent les mêmes objectifs quant à l’interruption de la prolifération des armes nucléaires et des transferts de technologie nucléaire. L’Iran constitue une menace sérieuse sur la non-prolifération ainsi que sur la stabilité de cette région du monde, et nous lui demandons de se conformer à la requête du Conseil de Sécurité des Nations unies de suspendre ses activités nucléaires, en accord avec ses engagements envers l’Agence internationale de l’Energie atomique (AIEA). Notre engagement est de faire connaître à l’Iran qu’il n’est pas dans son intérêt de développer un programme nucléaire militaire et que l’aboutissement à un accord par la négociation est la meilleure voie.

La France, les Etats-Unis et leurs partenaires internationaux sont unis dans leur détermination à faire face aux implications du programme nucléaire iranien en terme de prolifération. Les Etats-Unis soutiennent énergiquement l’initiative des nations européennes en vue d’obtenir de l’Iran la garantie que son programme nucléaire restera uniquement civil. Durant la poursuite de ces négociations, nous exhortons l’Iran à se conformer strictement aux termes de l’Accord de Paris et de la Résolution du Conseil des Gouverneurs de l’AIEA de novembre 2004, y compris à la nécessité de suspendre – de façon complète et vérifiable – toutes ses activités d’enrichissement et de retraitement. L’Iran doit coopérer totalement avec l’AIEA en lui permettant l’accès aux informations demandées et les visites sur le terrain, se conformer aux exigences du Conseil de l’AIEA, résoudre toutes les questions relatives à son programme nucléaire, et ratifier sans délai le Protocole additionnel.

Les Etats-Unis, comme l’ensemble de la communauté internationale, ne peuvent pas tolérer que l’Iran soit doté de l’arme nucléaire. L’accès à l’arme nucléaire par Téhéran pourrait engendrer une nouvelle prolifération chez les pays menacés par l’Iran, remettant en question l’efficacité, voire même l’avenir du régime de non-prolifération nucléaire. L’Iran s’est engagé légalement en signant le Traité de Non-Prolifération (TNP) et l’accord requis par l’AIEA sur les garanties et les contrôles concernant les activités nucléaires.

 

L.L.D. : Que font concrètement les Etats-Unis afin de persuader l’Iran d’interrompre son programme nucléaire ? Les Etats-Unis envisagent-ils la possibilité d’un dialogue direct avec Téhéran ?

 

S.E.M.C.R.S. : Nous recherchons une solution diplomatique au problème et nous nous efforçons avec nos alliés d’encourager les réformes et de freiner les ambitions nucléaires de Téhéran. En mai dernier, les Etats-Unis et les membres du Conseil de Sécurité des Nations unies ont proposé à l’Iran un vaste ensemble de mesures incitatives en échange de l’interruption de son programme d’enrichissement d’uranium. Les Etats-Unis ont aussi accepté de se joindre au dialogue direct entre le groupe UE-3 (Allemagne, France, Grande-Bretagne) et l’Iran si ce dernier accepte les termes de ces mesures incitatives.

Lors de leur rencontre à New-York en septembre 2006, à l’occasion de la réunion de l’Assemblée Générale des Nations unies, le Président Bush et le Président Chirac se sont entretenus sur la nécessité d’empêcher l’Iran d’acquérir une capacité nucléaire militaire, et tous deux ont évoqué leur souhait de résoudre ce problème par la voie diplomatique. La Résolution 1696 des Nations unies est réellement à la base de nos discussions sur ce sujet. Si l’Iran suspend effectivement ses programmes d’enrichissement d’uranium, et si le Docteur El Baradei de l’AIEA est en mesure de confirmer ce fait, alors nous pourrons procéder aux négociations. La Secrétaire d’Etat, Condoleezza Rice, a réaffirmé que les Etats-Unis prendraient part à ces négociations et a dit qu’elle serait personnellement présente dans leur première phase. Toutefois, si l’Iran ne suspend pas ses programmes nucléaires, alors, en accord avec la Résolution 1696, nous appliquerons les sanctions prévues par l’Article 41 du Chapitre 7 de la Charte des Nations unies. Considérant la nature intransigeante du régime iranien, il n’est pas étonnant que les négociations aient été jusqu’à présent difficiles. Les dirigeants de l’Iran sont face à un choix décisif et il serait terriblement dommage que leur choix entraîne l’isolement de leur pays au sein de la communauté des nations.

Les Etats-Unis admirent l’Iran pour la richesse de son histoire et pour ses nombreuses contributions à la civilisation. Les Iraniens méritent de pouvoir décider de leur propre avenir, de pouvoir développer une économie qui récompense leur intelligence et leurs talents, de pouvoir vivre dans une société qui leur permette de réaliser leur formidable potentiel. Le principal obstacle à cet horizon, c’est le choix qu’ont fait leurs dirigeants de leur refuser la liberté et d’utiliser les ressources nationales pour financer le terrorisme, alimenter l’extrémisme et chercher à obtenir l’arme nucléaire. En dépit de ce qu’a affirmé le régime, nous n’avons aucune objection à ce que l’Iran poursuive un programme nucléaire civil et pacifique.

Nous attendons avec impatience le jour où l’Amérique et l’Iran pourront être à nouveaux des alliés et des partenaires pour la paix. Alors que les images des otages de notre Ambassade sont encore marquées dans notre mémoire collective, il est facile d’oublier que nos pays ont joui par le passé de relations excellentes, et qu’il y a seulement une génération, 200 000 Iraniens étudiaient aux Etats-Unis. Nous avons l’intention de reprendre ces programmes d’échanges, qui sont un aspect important de nos relations diplomatiques et culturelles avec l’Iran.

 

L.L.D. : Le programme nucléaire iranien et le récent essai d’un missile nucléaire nord-coréen ont remis en question l’efficacité du Traité de Non-Prolifération de 1970. Comment les Etats-Unis peuvent-ils continuer à soutenir la nécessité du Traité de Non-Prolifération, tout en signant notamment des accords bilatéraux de coopération nucléaire avec des pays non signataires de ce traité tels que l’Inde ?

 

S.E.M.C.R.S. : Les Etats-Unis et leurs partenaires internationaux veulent une péninsule coréenne sans armes nucléaires, et nous sommes tous d’accord pour condamner les initiatives prises par la Corée du Nord qui exigent une réponse immédiate du Conseil de Sécurité des Nations unies.

Le régime nord-coréen reste l’un des principaux proliférateurs balistiques dans le monde en direction de l’Iran et de la Syrie. Les transferts d’armes et de matériel nucléaires nord-coréens vers des Etats ou d’autres entités, représentent une menace sérieuse pour les Etats-Unis et pour toute la communauté internationale et nous considérons la Corée du Nord comme totalement responsable des conséquences de ces actions.

Le Président Bush a insisté sur le fait que les Etats-Unis continuent à mettre l’accent sur la diplomatie et il a réaffirmé aux alliés des Etats-Unis dans la région, y compris la Corée du Sud et le Japon, que les Etats-Unis feront face à tous leurs engagements sur le plan de la sécurité et de la force de dissuasion. Le 19 octobre, lors d’un point de presse à Séoul en Corée du Sud, entre le Ministre des Affaires étrangères sud-coréen et futur Secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-Moon, la Secrétaire d’Etat Condoleezza Rice a souligné que « la porte n’est pas complètement fermée à une solution diplomatique et nous espérons que la Corée du Nord reviendra à la table des négociations mais cette fois avec la ferme intention de démanteler son programme d’armement ».

Ce ne sont pas les menaces qui prépareront au peuple nord-coréen un avenir plus radieux ; elles n’entraveront pas non plus la détermination des Etats-Unis et de ses alliés à parvenir à la dénucléarisation de la péninsule coréenne. Le droit aux essais nucléaires revendiqué par la Corée du Nord ne sert qu’à augmenter les tensions et à priver le peuple nord-coréen de son droit à une plus grande prospérité et à de meilleures relations avec le reste du monde que lui offrirait la mise en application de la déclaration conjointe des pourparlers à Six. Le peuple opprimé et appauvri de Corée du Nord mérite un avenir plus radieux.

Quant au Traité de Non-Prolifération, vu le nombre de cas de non-respect du traité, il fait face aujourd’hui au plus grand défi de son histoire. La plupart des Etats membres a respecté ses obligations de non-prolifération – ce qui constitue la contribution majeure du Traité de Non-Prolifération à la paix et à la sécurité internationales – mais d’autres ne l’ont pas fait.

La lutte contre le terrorisme et la prolifération des armes de destruction massive ajoutés au risque que de telles armes puissent tomber entre les mains de terroristes demeurent nos plus grands défis en terme de sécurité. Nous voulons renforcer et soutenir le rôle important que jouent les Nations unies dans la lutte menée par les Etats membres contre ces deux défis. Nous aiderons les autres pays du monde à renforcer leurs réglementations et la capacité de leurs institutions à lutter contre la prolifération. Nous veillerons aussi à mettre en place des mesures plus efficaces pour répondre aux menaces de prolifération et pour prévenir ou agir en cas de non-respect.

Quant à l’Initiative de coopération entre les Etats-Unis et l’Inde dans le domaine du nucléaire civil, nous sommes arrivés à la conclusion que nos politiques de non-prolifération vis à vis de l’Inde n’avaient pas atteint leur but et n’avaient eu aucun effet sur le développement de leurs armes nucléaires. Elles n’ont pas empêché non plus l’Inde et le Pakistan de tester leurs armes nucléaires en 1998. Elles ont peu contribué à diminuer les tensions dans la région qui ont souvent amené l’Inde et le Pakistan au bord de la guerre. Elles ont en fait rendu l’Inde dépendant du pétrole et du gaz de l’Iran et du Golfe persique et ont encouragé une rivalité déstabilisatrice sur les voies d’eau, sources d’énergie hydro-électrique. Elles ont isolé l’Inde des membres favorables à la non-prolifération nucléaire et ont causé beaucoup de ressentiment dans le pays qui a réagi en protégeant et en dissimulant son industrie nucléaire.

Au moment de son élection, le Président Bush considérait que nos relations avec l’Inde étaient essentielles au futur succès de la politique extérieure des Etats-Unis en général et dans le sud de l’Asie en particulier. Il décida alors de transformer radicalement notre relation et de construire un partenariat global avec la plus grande démocratie du monde -partenariat fondé sur des intérêts communs et des idéaux partagés. Les Etats-Unis et l’Inde ont le même respect de la liberté et du droit ; nos deux pays croient au contrôle civil des forces armées ; ils sont tous deux engagés sur la voie de la croissance et de la liberté économique.

De l’Initiative de coopération entre les Etats-Unis et l’Inde en matière de nucléaire civil, dont je vais exposer les points précis, dépendra dans une large mesure la construction de cette nouvelle relation stratégique.

Pour la première fois en trente ans, l’Inde s’est engagée à ouvrir tout son programme nucléaire civil aux inspecteurs internationaux et à prendre de nouveaux engagements sérieux de non-prolifération en échange d’une coopération totale avec la communauté internationale dans le domaine du nucléaire civil. Grâce à cette initiative, le monde espère que l’Inde va devenir un partenaire à part entière dans la non-prolifération nucléaire et l’Inde attend en retour une aide pour faire face à ses besoins énergétiques croissants.

Enfin, il est important de rappeler que l’Inde n’a jamais signé le Traité de Non-Prolifération et par conséquent ne l’a jamais violé contrairement à l’Iran et à la Corée du Nord qui ont tous deux signé le Traité et n’ont pas respecté leurs obligations. L’Inde n’a jamais failli à ses engagements de non-prolifération ; c’est une démocratie ; c’est un pays ami et un Etat pacifique et l’Initiative témoigne de toute la confiance que l’Amérique met en ce pays engagé dans la voie de la tolérance et de la liberté avec lequel elle souhaite construire un partenariat stratégique.

 

L.L.D. : Certains observateurs affirment que le projet du « Grand Moyen Orient » est dans l’impasse. Quelle est la stratégie actuelle des Etats-Unis au Moyen-Orient ?

 

S.E.M.C.R.S. : Les défis auxquels les Etats-Unis ont à faire face au Moyen-Orient sont   profonds et se posent depuis de nombreuses années, mais notre détermination à promouvoir une paix durable pour les Israéliens, les Palestiniens et leurs voisins est inébranlable.

Tous les objectifs de notre politique ont deux fondations sous-jacentes. La première est le développement de la liberté, de la justice et de la dignité humaine – l’abolition de la tyrannie, le soutien à l’établissement de régimes démocratiques et une plus grande prospérité par le commerce libre et équitable, et par des politiques de développement cohérentes. Le deuxième pilier de notre stratégie globale est de faire face aux défis de notre temps par la coopération avec une communauté grandissante de démocraties sur de nombreux problèmes qui se posent à nous et qui dépassent les frontières régionales et nationales – de la menace d’une pandémie à la prolifération des armes de destruction massive, au terrorisme, au trafic d’êtres humains, aux catastrophes naturelles.

Certains des changements qui s’accomplissent au Moyen-Orient sont graduels, mais ils sont bien réels. L’Algérie a tenu ses premières élections présidentielles libres, et les forces armées sont restées neutres. Les Emirats arabes unis ont récemment annoncé que la moitié des sièges de leur Conseil national fédéral fera l’objet d’une élection. Le Koweït a tenu pour la première fois des élections dans lesquelles les femmes ont eu le droit de voter et de se présenter. Les citoyens se sont exprimés lors d’élections municipales en Arabie saoudite, d’élections parlementaires en Jordanie et au Bahreïn et d’élections présidentielles multipartites au Yémen et en Egypte. Ce sont des mesures importantes, et les gouvernements devraient continuer dans cette voie, avec des réformes montrant qu’il ont confiance en leurs citoyens.

La communauté internationale doit soutenir ceux qui, dans la région, proposent un choix tourné vers l’espoir. Nous devons chercher à atteindre une véritable stabilité dans un Moyen-Orient libre et juste, où les extrémistes sont dissuadés par des millions de citoyens en charge de leur propre destin.

En même temps que nous tendons vers un changement concret qui se traduira par une vie meilleure pour tous dans la région, nous travaillons étroitement avec les gouvernements, avec la société civile et avec d’autres institutions sur un vaste ensemble de priorités. Nous respectons profondément l’Egypte, la Jordanie et l’Arabie saoudite, et nous cherchons à entretenir avec eux une relation privilégiée et profondément enracinée. Leurs progrès sur la voie de la réforme sont encourageants, mais il reste beaucoup à faire pour contrecarrer les idéologies extrémistes et pour promouvoir la modération et la tolérance.

L’ordre du jour imposé par ces questions est ardu et constitue un véritable défi. Certains de ces problèmes préoccupent les responsables politiques et les gouvernements depuis des décennies. Mais nous savons que les voix qui s’expriment en faveur des réformes, du changement positif et d’une gouvernance plus humaniste ne viennent pas de l’Ouest; elles sont le fait de figures emblématiques issues de la région, au sein ou non des gouvernements. Nous reconnaissons bien volontiers que la démocratie se développera au Moyen-Orient avec ses propres caractéristiques régionales et à son propre rythme. Nous apportons un soutien tangible aux réformateurs et aux artisans de la paix dans la région afin que les conflits diminuent, que la démocratie s’étende, que l’éducation se développe, que les économies soient florissantes et que les femmes obtiennent plus de droits. Les Etats-Unis s’appliquent à encourager tous ces changements dans un climat de respect mutuel et d’humilité, profondément conscients de la nécessité de respecter les traditions et la culture de cette région et d’écouter ses habitants, même lorsque leurs voix s’élèvent pour exprimer la colère ou la critique.

 

L.L.D. : Plus précisément, à la lumière des positions du Hamas dans le gouvernement palestinien, quelle est la vision des Etats-Unis sur le règlement pacifique du conflit israélo-palestinien?

 

S.E.M.C.R.S. : Les Etats-Unis et l’Union européenne considèrent qu’un règlement juste et durable du conflit israélo-palestinien est vital pour la stabilité de la région et la réduction de la menace terroriste. Certains Européens pensent que l’administration Bush a travaillé plus activement à promouvoir la paix depuis le début de son second mandat et apprécient la reprise des consultations entre les Etats-Unis et l’Union européenne par le biais du Quartet (Etats-Unis, Union européenne, Russie, Nations unies). Les Européens ont perçu le rôle de la Secrétaire d’Etat Condoleezza Rice, qui a obtenu par l’accord de novembre 2005, des contrôles de sécurité sur le franchissement de la frontière de Gaza, comme extrêmement positif. Une partie de cet accord assigne à l’Union européenne le contrôle de la frontière de Rafah entre Gaza et l’Egypte. Tout comme les Etats-Unis, l’Union européenne a appelé le Hamas qui a gagné les élections législatives palestiniennes en janvier 2006, à renoncer à la violence et à reconnaître l’Etat d’Israël. L’Union européenne, le plus important fournisseur d’aide aux Palestiniens, a accepté que cette aide soit destinée au peuple palestinien et non pas distribuée par l’intermédiaire du gouvernement dirigé par le Hamas.

Le monde doit choisir entre le soutien aux modérés et aux réformateurs qui travaillent au changement du Moyen-Orient ou bien livrer l’avenir aux terroristes et aux extrémistes. L’Amérique a fait son choix : celui des modérés et des réformateurs. Ensemble, nous accompagnerons les rêves des gens de bonne foi qui travaillent à transformer une région en proie aux troubles – nous ferons ainsi avancer les grands idéaux sur lesquels furent fondées les Nations unies.

La vision du Président Bush de deux Etats pour les Israéliens et les Palestiniens vivant dans la paix, la stabilité, la prospérité et la dignité est la seule solution viable. Cette vision de deux Etats a été rejetée par le Hamas qui continue à refuser de reconnaître Israël. C’est la raison pour laquelle la communauté internationale, représentée par le Quartet fait pression sur le Hamas afin qu’il renonce au terrorisme, reconnaisse Israël et accepte tous les accords précédemment entrés en vigueur – tous étant des préalables à la paix durable que nous cherchons à instaurer. Le gouvernement français a été le premier à énoncer ces trois conditions dès la victoire du Hamas aux élections et nous apprécions la détermination française à refuser tout contact et toute   coopération avec un gouvernement palestinien qui ne se plie pas à ces conditions. Les Etats-Unis et l’Europe sont d’accord pour que toute assistance future à un nouveau gouvernement palestinien soit soumise au respect de ces trois principes ; c’est au Hamas de s’y conformer. Nous restons, en même temps, engagés à venir en aide au peuple palestinien qui doit pouvoir jouir d’une vie normale, dans la sécurité et le bien-être.

Trop de vies ont été perdues des deux côtés à cause de la violence et du terrorisme. Tout en reconnaissant et en respectant totalement le processus politique qui l’a porté au pouvoir, nous avons depuis longtemps de sérieux doutes sur le Hamas. N’importe quel gouvernement palestinien qui encourage ou tolère le terrorisme contre des innocents attise non seulement la violence contre les Israéliens mais portent également préjudice aux intérêts du peuple palestinien, renforçant davantage son isolement. Les Etats-Unis n’auront aucun contact avec un tel gouvernement et nous travaillons avec d’autres dans la région et dans le monde pour lui demander qu’il renonce à soutenir le terrorisme, qu’il reconnaisse le droit à l’existence d’Israël, et respecte les accords antérieurs.

 

L.L.D. : Comment décririez-vous la position américaine concernant la crise humanitaire et politique au Soudan ? Que font les Etats-Unis pour mettre fin aux souffrances du peuple soudanais ?

 

S.E.M.C.R.S. : Dès le début du conflit au Soudan, la priorité absolue de la communauté internationale fut de gérer l’urgence humanitaire. Les Etats-Unis ont été les premiers à y répondre en fournissant plus de 60% de l’aide alimentaire distribuée par le Fonds alimentaire des Nations unies et en consacrant plus de 1,3 milliard de dollars d’aide chaque année pour le Darfour et les peuples du Sud-Soudan.

Pour créer une paix durable au Darfour, il est cependant nécessaire de régler les problèmes politiques en plus des problèmes humanitaires. La sécurité au Darfour continue de se détériorer. Le gouvernement du Soudan et tous les groupes armés, y compris les rebelles qui n’ont pas signé l’Accord de paix du Darfour, doivent renoncer à la violence et chercher une solution pacifique à la crise. Les personnels humanitaires doivent également être protégés lorsqu’ils sauvent des vies en prodiguant aide et assistance.

La situation au Darfour est une crise humanitaire, à n’en pas douter – mais c’est plus que cela. C’est fondamentalement un problème politique ancré dans le défi historique que représente la gouvernance du Soudan. Pour voir un jour une paix réelle et durable au Darfour, nous devons contribuer à résoudre les problèmes politiques plus larges du Soudan.

L’Accord de paix entre le Nord et le Sud-Soudan (CPA) représente un schéma directeur pour la transformation démocratique du Soudan – un schéma qui tente de résoudre, pour la première fois, les problèmes politiques inhérents au pays. Le CPA crée une nouvelle structure politique – un gouvernement d’union nationale – au travers duquel le pouvoir passe du gouvernement central du Soudan aux provinces marginalisées du Sud, tout comme la distribution des richesses. Cela pourrait également servir de modèle pour les provinces de l’Ouest et de l’Est. Des ruines de la guerre, le CPA a créé un environnement de sécurité et de stabilité, soutenu par la présence de 10 000 soldats de l’ONU pour le maintien de la paix. Cette force contribue à créer l’espace politique nécessaire à la réconciliation du Soudan. C’est bien sûr un processus long et difficile mais il conduira à la liberté, à la paix et au développement de tous les peuples du Soudan.

Le CPA demeure la feuille de route vers le but commun que nous partageons tous, d’un Soudan unifié, pacifique et démocratique. Mais au moment où nous concluions le CPA, un autre conflit éclata – et cette fois au Darfour, dans l’Ouest du Soudan. Tout comme la longue guerre civile entre le Nord et le Sud, le conflit du Darfour est également de nature politique, résultant du fait que le gouvernement de Khartoum n’a jamais partagé ni la richesse ni le pouvoir équitablement avec le peuple du Darfour.

Les Etats-Unis insistent pour que le gouvernement soudanais accepte immédiatement et sans condition une force de maintien de la paix de l’ONU au Darfour. Si le gouvernement soudanais ne protège pas la vie de son propre peuple, alors les Nations unies doivent agir. Le gouvernement soudanais doit décider clairement entre la coopération et la confrontation. S’il décide de coopérer, il trouvera dans les Etats-Unis, un partenaire dévoué, désireux de travailler au but commun d’un Soudan unifié, pacifique et démocratique. Un déploiement des forces de l’ONU sécurisera la région, stabilisera le pays, profitera au peuple soudanais et servira, en fin de compte, les intérêts du gouvernement soudanais. Et, au cas où le gouvernement soudanais choisirait la confrontation, alors le régime de Khartoum serait tenu pour responsable et devra en subir seul les conséquences.

La reconstruction du Darfour dépend de l’arrivée des forces de maintien de la paix de l’ONU. Les Etats-Unis n’ont pas l’intention de porter atteinte à la souveraineté du Soudan, mais la souveraineté doit être ancrée dans la responsabilité pas seulement dans le contrôle. La décision du gouvernement soudanais devrait refléter le rôle que le Soudan entend jouer dans le monde. Si le gouvernement soudanais souhaite devenir un membre respecté de la communauté internationale, il doit agir comme tel et se comporter de manière responsable. Les troupes du maintien de la paix de l’ONU sont là pour promouvoir la paix au Darfour et nous nous réjouissons de l’intérêt que de nombreux pays portent à cet effort important.

Les Etats-Unis travaillent en étroite collaboration avec l’Union africaine, l’Union européenne, le Conseil de Sécurité des Nations unies et d’autres partenaires importants pour revoir nos options et continuer à faire pression sur le gouvernement soudanais afin qu’il reconnaisse qu’une force de maintien de la paix au Darfour est nécessaire.

 

L.L.D. : Comment définiriez-vous les priorités des Etats-Unis pour le continent africain ? Plus généralement, comment s’articule leur collaboration avec l’Europe pour promouvoir la croissance dans les pays en voie de développement ?

 

S.E.M.C.R.S. : Nos quatre priorités   en Afrique sont de :

– soutenir la propagation de la liberté politique à travers tout le continent

– favoriser l’extension de la croissance économique

– relever le défi majeur de la pandémie du SIDA

– renforcer les initiatives africaines pour mettre un terme aux conflits et combattre le terrorisme.

L’expansion économique sur le continent est à son plus haut niveau depuis huit ans. Vingt pays ont enregistré de la croissance sur les cinq dernières années. Six conflits majeurs ont pris fin ces six dernières années : en Angola, au Burundi, en République démocratique du Congo, au Libéria, en Sierra Leone ainsi que la guerre qui durait depuis vint-deux ans entre le Nord et le Sud du Soudan. Les Africains ont pris le contrôle de leur destin au travers d’institutions telle que l’Union africaine et son Nouveau Partenariat pour le Développement (NEPAD), programme qui contribue à une meilleure gouvernance et à renforcer les liens d’amitié entre les Etats. Nous avons réussi à ce que les pays africains prennent carrément leur place au sein de la communauté des démocraties qui contribuent à l’élaboration d’un système international basé sur nos valeurs communes que sont la paix et la prospérité.

Les Etats-Unis continueront à soutenir les institutions essentielles à la démocratie – la liberté de la presse, l’indépendance de la justice, un système financier sain et des partis politiques actifs. La priorité des deux prochaines années sera de renforcer l’infrastructure électorale puisque, dans de nombreux pays africains, les élections sont devenues des prétextes de conflit dans lesquels les perdants contestent fréquemment les résultats en reléguant les questions politiques au second rang, après les vols de bulletins de vote et les manifestations. La République démocratique du Congo a fait de grands progrès vers la démocratie en appliquant l’Accord global de 2002. La tenue d’élections libres et légales achèvera la transition de la guerre à la paix. En ce qui concerne la Côte d’Ivoire, on peut espérer que la résolution du Conseil de Sécurité sur la transition politique conduira à des élections et à la fin du mandat de la force de maintien de la paix dans l’année. Nous travaillons à la création de commissions électorales nationales et indépendantes en vue d’élections libres et transparentes qui favoriseront un climat de confiance. Les perspectives sont bonnes. Ces dix dernières années, plus des deux tiers des quarante-huit pays africains ont tenu des élections libres.

Notre alliance est déterminée pour promouvoir le développement et intégrer les pays en voie de développement dans l’économie mondiale. Notre réussite sera à la mesure des résultats obtenus et pas seulement des ressources engagées. Ensemble, nous avons créé le Consensus de Monterrey qui soumet toute aide nouvelle des pays développés au progrès des réformes dans les pays en voie de développement. C’est une stratégie qui marche. Dans le monde en développement où les gouvernements sont confrontés à la corruption, le respect de la loi est en train de prendre racine et les peuples jouissent de nouvelles libertés. Les nations développées ont répondu en augmentant d’un tiers leur aide.

Au travers du Compte du Millénaire, mon pays a augmenté l’aide aux pays en voie de développement qui gouvernent correctement, favorisent la liberté d’entreprendre et investissant dans l’éducation et la santé de leurs peuples. Même si nous fournissons toujours de l’aide humanitaire, les pays développés sont plus circonspects sur les autres formes d’aide. Au lieu de financer les échecs, nous devons récompenser le progrès et améliorer les conditions de vie.

Les Etats-Unis et l’Europe sont décidés à encourager le commerce entre les nations puisque l’économie de marché crée des emplois, relève le niveau des revenus et attirent des nations entières vers la liberté d’entreprendre. Nous continuerons à favoriser le commerce, et ce faisant, nous parviendrons à résoudre nos contentieux commerciaux dans un esprit de coopération. C’est la raison pour laquelle nous continuons de faire avancer l’Agenda de Doha pour le Développement et à travailler à la conclusion des négociations commerciales.

La politique africaine des Etats-Unis a contribué à faire avancer la liberté, la paix et la prospérité en Afrique, en partenariat avec les Africains et à créer les institutions qui permettront au progrès d’avancer pour les générations futures. Les priorités de la politique africaine des Etats-Unis découlent directement de la responsabilité du Président Bush de rendre le monde meilleur et plus sûr et de l’orientation donnée par la Secrétaire d’Etat pour parvenir à ses objectifs au moyen de la « diplomatie transformationnelle ».

 

L.L.D. : Quelles sont les perspectives de progrès pour l’OMC et le Cycle de Doha?

 

S.E.M.C.R.S. : La promotion du libre-échange fait partie intégrante de la vision qu’a le Président Bush de la liberté d’entreprendre et de la prospérité à travers le monde. Depuis qu’ils ont présidé au lancement du Programme de Doha pour le Développement en 2001, les Etats-Unis travaillent depuis plus de quatre ans au travers des négociations du Cycle de Doha à un accord multilatéral complet qui permettra l’ouverture de nouveaux marchés dans les domaines de l’agriculture, des produits manufacturés et des services. Ainsi de nouvelles possibilités seront offertes au monde entier et les promesses de développement faites à Doha seront respectées.

Les facteurs économiques sont clairs : la libéralisation du commerce, accompagnée des réformes nationales en faveur du marché, renforce le potentiel de croissance économique des pays en voie de développement. Les Etats-Unis sont profondément engagés à aider tous les pays en voie de développement à évoluer vers une plus grande prospérité. Afin de catalyser la libéralisation du commerce à travers le Cycle de Doha, les Etats-Unis ont fait des propositions audacieuses en vue d’ouvrir des marchés, d’encourager la croissance économique et de soulager la pauvreté.

Les plus importants acteurs du commerce mondial doivent prendre la tête de ce processus pour faire avancer l’ouverture des marchés et faire disparaître les divisions fondamentales qui existent dans les négociations de Doha. Si l’on veut atteindre les objectifs ambitieux de Doha, il est urgent que des efforts importants soient consentis pour accéder réellement aux marchés de l’agriculture, des produits manufacturés et des services. Si tel n’était pas le cas à brève échéance, on laisserait passer la chance historique d’étendre la croissance économique mondiale et de soulager la pauvreté.

 

S.E.M.C.R.S. : Je dirais que c’est une relation saine et forte. Les Etats-Unis et l’Europe partagent une histoire riche et des destins communs. J’ai eu l’occasion d’observer l’Europe depuis la République Tchèque et maintenant depuis la France et je remarque que la sécurité des Etats-Unis et de l’Europe demeurent intimement liées. Il est essentiel de continuer le dialogue afin de renforcer notre compréhension mutuelle et notre détermination. Les Européens n’hésitent pas à faire connaître leur désaccord avec l’Amérique et les Américains n’hésitent pas à faire valoir leur point de vue non plus. Des amis et des alliés débattent et ne sont pas toujours d’accord, mais au bout du compte, nous nous rejoignons toujours pour poursuivre nos intérêts communs dans un respect mutuel.

Sur le plan économique, les Etats-Unis et l’Europe ont les plus importants échanges en terme de commerce et d’investissement. Les flux de biens, de services et d’investissements s’élèvent à plus d’un trillion de dollars par jour ! Les entreprises américaines et européennes sont également celles qui investissent le plus sur leurs marchés respectifs ; le montant total des investissements étrangers dans les deux pays s’élèvent à plus d’1,6 trillion de dollars. La plupart du temps, cette relation économique est harmonieuse même si des tensions persistent. Néanmoins, les deux parties sont déterminées à continuer les négociations pour honorer les conclusions du Programme de Doha pour le Développement jusqu’à fin 2006.

Nous coopérons dans la lutte contre le terrorisme et la prolifération des armes. On a pu voir récemment à la une des journaux que les Etats-Unis et l’Europe avaient collaboré pour empêcher l’Iran de développer des armes nucléaires, ce qui aurait menacé la région et le monde. Nous avons travaillé ensemble à promouvoir la stabilité dans les Balkans et en Afghanistan. Nos partenaires européens fournissent de l’aide au gouvernement démocratiquement élu du Premier ministre irakien Maliki en matière de sécurité et de développement.

Les Etats-Unis ont toujours été les fervents supporters d’une Union européenne forte. L’Amérique et l’Europe font partie d’un ensemble uni et démocratique et partagent les valeurs communes de la liberté, la démocratie, la liberté d’entreprendre, les droits de l’Homme et le respect de la loi. Le Président Bush et la Secrétaire d’Etat Condoleezza Rice travaillent en étroite collaboration avec leurs homologues européens pour que ce partenariat nous permettent de relever les défis de la globalisation. Récemment, certains en Europe comme aux Etats-Unis ont perçu l’Europe comme un contrepoids aux Etats-Unis, mais le Président Bush lui, croit qu’une Europe forte est un partenaire important pour faire avancer nos intérêts communs.

Le fait est que les Etats-Unis ont peu de partenaires de cette importance. Les partisans du rapprochement Etats-Unis-Europe invoquent que, ni les Etats-Unis ni l’Europe ne peuvent résoudre seuls tous les problèmes et que l’expérience prouve que nous sommes beaucoup plus efficaces lorsque nous travaillons ensemble.

Rien ne ferait plus plaisir aux ennemis de la liberté que de voir les Etats-Unis et l’Europe en désaccord car ils redoutent la force et la clairvoyance de la solidarité transatlantique. Les amis de la liberté qui ont besoin de notre soutien, l’ont et des deux côtés de l’Atlantique.

 

 

 

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