La nouvelle menace nucléaire
Par M. Pascal Drouhaud, Spécialiste en relations internationales
Finalement, la question de l’équilibre des forces était bien plus simple à comprendre durant la guerre froide1 ! La paix mondiale reposait sur l’équilibre de la terreur entre les deux Grands qu’étaient alors les Etats-Unis d’Amérique et l’Union des Républiques soviétiques socialistes (URSS). Chacun pouvant détruire de façon irrémédiable son adversaire, tout l’art de la diplomatie et de la gestion des crises ou des guerres dites périphériques (parmi lesquelles le Vietnam ou l’Afghanistan) consistait à démontrer que si l’usage de la force nucléaire restait une option politiquement crédible (ce fut le cœur du bras de fer lors de la crise de Cuba2), il était militairement possible. Les risques d’un conflit nucléaire ayant été clairement identifiés pendant la crise des missiles à Cuba en octobre 1962, chacun des deux Grands s’était efforcé d’encadrer par des traités et des accords internationaux, l’usage possible de cette force. Les périodes dites de « détente », de « coexistence pacifique », de « dialogue critique », rythmaient les relations internationales pendant le demi-siècle qu’allait durer la guerre froide. Ces termes illustraient les phases différentes dans lesquelles s’inscrivaient les relations entre les Etats et, plus encore, leurs rapports des forces. Pendant les années 1950 et 1960, après les Etats-Unis, quatre Etats se dotaient progressivement et ouvertement de l’arme nucléaire : l’URSS, le Royaume-Uni, la Chine et la France. Dans des proportions inégalées par les trois autres membres de ce « club nucléaire », les Etats-Unis et l’URSS réglaient la température mondiale en matière de confrontation ou de paix. Ces Etats confirmaient ainsi leur statut de « grande puissance ». La détention d’un potentiel nucléaire permettait à la France et au Royaume-Uni de légitimer leur place au Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations unies alors même que la disparition de leur empire colonial aurait pu permettre à d’autres nations de contester cette situation. La France, le Royaume-Uni et dans une certaine mesure la Chine, entraient dans un rapport du « faible au fort ». Ne pouvant pas rivaliser avec les Etats-Unis et l’ex-URSS, ces pays devenaient de facto des puissances régionales, avec une influence sur le développement des évènements politiques dans leur continent ou dans leur environnement régional. La chute de l’URSS au début des années 1990 et la disparition du rapport Est-Ouest qui en découle, l’entrée fracassante de la Chine dans le monde de la consommation, l’émergence de l’Inde qui devient une puissance régionale, les bouleversements des frontières en Asie centrale constituent autant de facteurs caractéristiques des relations internationales contemporaines. Un rapport nouveau à une identité nationale en construction pour de nouveaux Etats est complété dans certains cas, par un fort « coefficient » religieux. L’éclatement de l’URSS, la stratégie régionale chinoise et indienne, la perception plus ou moins forte d’un risque d’embrasement général dans les pays occidentaux, ont accéléré la diffusion des matériels et de la technologie directement liés au nucléaire. Parallèlement, le développement technologique rend l’accès aux informations ou aux outils alors réservés aux Etats les plus puissants, plus facile. Une nouvelle concurrence mondiale Soudainement, le monde est apparu moins sûr. L’était-il auparavant alors même que l’épée de Damoclès que représentait l’apocalypse nucléaire était suspendue au-dessus de la planète ? L’organisation de la terreur était au centre du dispositif de l’Organisation des Nations unies et du concept de dissuasion qui, bon an, mal an, maintenait une cohérence internationale. Aujourd’hui, la donne a changé. Certes, les fondements de l’ère précédente restent : le Traité de non-prolifération nucléaire (TNP)3 signé le 1er Juillet 1968 et entré en vigueur le 5 mars 1970 constitue plus que jamais l’élément central d’une vigilance internationale en matière de lutte contre la prolifération nucléaire. Cependant, il n’a pas empêché des Etats d’acquérir un potentiel nucléaire militaire tout en n’étant pas signataires du TNP, tels l’Inde, Israël, le Pakistan. D’autres ont développé et poursuivent plus ou moins clandestinement, des programmes nucléaires militaires, malgré les contrôles de la communauté internationale tels l’Irak jusqu’au début des années 1990, la Corée du Nord, l’Iran. La Libye a annoncé la fin de son programme d’acquisition d’une bombe nucléaire à l’instar de l’Afrique du Sud, de l’Argentine ou du Brésil tandis que l’Ukraine, la Biélorussie et le Kazakhstan ont restitué aux Russes l’armement nucléaire qu’ils tenaient de l’ère soviétique. Malgré ces quelques bonnes nouvelles, la menace d’une prolifération nucléaire s’est transformée en fait majeur des relations internationales en ce début de XXIème siècle. Dans ce contexte nouveau, de nombreuses interrogations se font jour : l’équilibre mondial qui existait jusqu’à la fin des années 1990, n’est-il pas bousculé par la course à la technologie de pointe ? Les Etats-unis ont repris leurs travaux de défense anti-missile pour protéger leur pays, comme lors de la Guerre froide, mais cette défense n’est plus, comme ce fût le cas à cette époque, tournée vers un seul adversaire. Elle est « tous azimut » , la menace étant désormais répartie dans le monde. Le fossé technologique, ce fameux « gap » déjà dénoncé en 1960 par John Kennedy (à propos d’un retard supposé des Etats-Unis par rapport à l’URSS en matière de missiles balistiques), existant entre l’Europe, la Russie et les Etats-Unis ne risque t’il pas de s’approfondir et de contribuer au renforcement d’un déséquilibre mondial ? La Russie a perdu son statut de super-puissance à la suite de l’effondrement de l’ex-URSS. Elle n’en demeure pas moins une puissance nucléaire réelle, dotée de milliers d’armes. Ne court-elle pas le risque d’être ramenée au rang « d’Etat peu responsable » si le processus de modernisation de ses structures venait à échouer ? La Chine continue, pour sa part, à améliorer ses compétences dans le domaine spatial et sa rivalité avec les Etats-Unis d’Amérique croît aussi vite que sa coopération avec eux… L’établissement de « relations stratégiques » entre l’Inde et les USA annoncé en juillet 2005 par le Président Bush lors de la visite du Premier Ministre Manmohan Singh et confirmé en Mars 2006 à New Delhi par le président américain constitue une illustration des nouvelles relations internationales marquées par le pragmatisme. Alors même que les Etats-Unis avaient imposé des sanctions contre l’Inde qui avait procédé à plusieurs essais nucléaires en 1998, cette dernière se voit érigée au rang de partenaire stratégique des Etats-Unis en mettant l’accent « sur la coopération dans le domaine du nucléaire civil, de la technologie spatiale et des échanges de haute technologie ». Cet accord a bien sûr une portée politique forte : il s’agit d’adapter à l’Asie la fameuse logique du « containment », visant à contenir l’influence d’un pays considéré comme une menace pour la stabilité régionale. Cette politique vise en Asie, bien qu’actuellement apaisée, à retenir l’influence iranienne et le discours des leaders islamistes. Les « Etats-voyous » (qualifiés ainsi par le Président Georges W. Bush dès 2001, en raison de leur absence de respect des règles internationales) ne peuvent-ils pas être tentés, à terme, de menacer les intérêts vitaux des Etats nucléaires dits « responsables » ? Enfin, est-il possible que des organisations terroristes internationales comme Al Qaïda réussissent à s’emparer d’une arme nucléaire ? Dans une telle perspective, les attentats de septembre 2001 à New York, ceux de Bali en 2002, de Madrid en mars 2004 et de Londres en juillet 2005 prennent un aspect encore plus dramatique. Autant d’interrogations que la détérioration constatée depuis les années 1990, des mécanismes de lutte contre la prolifération et pour la maîtrise des armements, oblige à poser. Outre la signature des traités fondamentaux de désarmement durant les années 1970-1980, (traité sur les forces nucléaires intermédiaires, START 1, START 24), la lutte contre la prolifération nucléaire avait enregistré un certain nombre de succès à la fin des années 1980, en se dotant d’instruments juridiques et de contrôle. Aujourd’hui, c’est l’inquiétude qui prévaut ! La crise récurrente entre l’Inde et le Pakistan, la situation en Corée du Nord, la volonté de la Chine de peser sur le continent asiatique, l’évolution du Proche et Moyen-Orient, ne prêtent guère à la confiance ! Par ailleurs, le rejet par le Sénat américain du traité d’interdiction complète des essais nucléaires (TICE)5 et la décision des Etats-Unis de dénoncer le traité concernant la défense anti-missiles stratégiques (traité ABM)6 créent le sentiment d’une forme de « démantèlement » du système de non-prolifération mis sur pied dans les années 1980-1990. Au temps de la Guerre froide, les armes de destruction massive apparaissaient sous le contrôle exclusif des cinq puissances membres permanents du Conseil de sécurité. Désormais, elles sont également détenues par des puissances régionales qui ne sont pas membres de ce Conseil. Certains de ces nouveaux détenteurs de ce type d’armes, longtemps enfermés dans la catégorie de puissances « résiduelles », ont aujourd’hui, à l’exemple de l’Inde ou de l’Iran, une ambition légitime, d’influence régionale afin d’occuper un espace stratégique sur la scène mondiale. Perçue par les Etats-Unis, durant ces dernières années, comme une « nuisance », cette réalité s’est transformée en « menace immédiate ». La possibilité d’une attaque nucléaire provenant de mouvements terroristes ou « d’Etats-voyous » n’apparaît plus comme une invention de l’esprit. Cette nouvelle donne bouleverse le contenu de la notion de sécurité longtemps attachée au concept de la dissuasion nucléaire. Dans ce contexte, les principes de précaution et d’attaque préventive deviennent de plus en plus des lieux communs des relations internationales contemporaines. L’Irak est à ce titre, le meilleur exemple de l’application de ce nouveau principe. Le rôle souvent contraint, des opinions publiques Cette évolution générale s’est accompagnée d’une prise de conscience de plus en plus forte des opinions publiques. Ces dernières se sont manifestées bruyamment sur le terrain politique dans les pays occidentaux. Les attaques terroristes de septembre 2001, celles qui ont frappé le sol européen, en mars 2004 à Madrid, en juillet 2005 à Londres, se sont accompagnées de réactions puissantes parce que spontanées, des opinions publiques. Mais attention au risque d’instrumentalisation ! A ce titre, les évènements madrilènes donnent à réfléchir. L’ancien Chef du gouvernement espagnol, José Maria Aznar semblait assuré, quatre jours avant les élections générales du 14 mars 2005, de voir son parti remporter la majorité après huit années discontinues de gestion. Les attentats du 11 mars ont bouleversé la donne politique. Ce sont les socialistes qui, contre toute attente, remportaient les élections, et leur leader, M. José Luis Rodriguez Zapatéro, de devenir le nouveau chef du gouvernement. A ce résultat obtenu dans le sang (près de 200 personnes ont perdu la vie dans ces attaques), plusieurs explications : José Maria Aznar, en marquant son soutien au Président américain durant la dernière guerre en Irak, position concrétisée par la présence de troupes espagnoles sur le sol irakien, a rappelé la force de l’axe Madrid-Washington. Cette relation est ancienne. Membre de l’OTAN, l’Espagne compte des bases militaires américaines sur son sol. L’espace ibéro-américain désormais bien établi en Amérique latine et dans les Caraïbes, est un élément de coopération politique avec les Etats-Unis. Les évènements tragiques de mars 2004, ont cristallisé le désaccord des Espagnols avec leur gouvernement de l’époque. Le résultat des élections était dès lors inéluctable. Ces attaques ont démontré la capacité des organisations terroristes à vouloir peser sur le cours des évènements, Les cibles ont toutes un point commun : elles concentrent l’intérêt des médias. Les attentats bénéficient dès lors d’une caisse de résonance incroyablement puissante : l’Espagne à l’heure des élections générales, la Grande-Bretagne qui organisait le sommet du G-8 de Gleneagles en juillet 2005, tandis que Londres se voyait désignée comme ville olympique pour les jeux de 2012. N’oublions pas Charm Al-Cheikh, vitrine d’une Egypte moderne, touristique et engagée sur la scène mondiale. Cette ville est, en effet, le lieu où se tiennent les sommets de Chefs d’Etat ou membres de gouvernements placés sous la responsabilité de l’Egypte qui se présente comme une puissance régionale à l’heure où la donne israélo-palestinienne a beaucoup évolué. D’autre part, la prise d’otages en Irak, qu’ils soient français, italiens, japonais, philippins, algériens, égyptiens ou russes, a confirmé cette mobilisation populaire. Il s’agit là d’un fait nouveau que les Etats doivent désormais prendre en considération : les résultats électoraux en Espagne, le débat sur la réalité d’une présence des armes de destruction massive encouragée jusqu’à la fin de son régime par Saddam Hussein, témoignent de l’importance de ce facteur politique. Il peut avoir des conséquences insoupçonnées et déterminantes pour la sécurité : par exemple, le départ annoncé et effectif en juillet 2004, des troupes espagnoles du sol iraquien, a bouleversé la donne au sein de la coalition alliée. Cette prise de conscience politique couplée à la campagne présidentielle américaine a, sans nul doute, accéléré le processus de transfert des instruments de la souveraineté aux responsables iraquiens, le 28 juin 2004. Par ailleurs, le débat sur la prolifération des armements nucléaires a été placé au cœur de la campagne présidentielle américaine. Elle alimente la position de Washington dans sa volonté de voir l’Iran cesser son programme de conversion d’uranium, processus indispensable à l’enrichissement de l’uranium pouvant conduire à l’acquisition d’une bombe. Le nouveau Président iranien Mahmoud Ahmadinejad, élu le 24 juin 2005, fait de ce sujet un élément central de l’indépendance de son pays, n’hésitant plus à affirmer la légitimité de l’Iran de devenir, à terme, un Etat détenteur de l’armement nucléaire. La volonté de lutter contre ce nouveau risque international est un objectif clairement affiché par le Président George W. Bush depuis le début de son second mandat, en janvier 2005. Le Président américain a placé son nouveau mandat sous le signe de « la lutte pour la Liberté ». Son administration a désigné six Etats considérés comme les « postes avancés de la tyrannie » dans le monde. Certes, tous ne présentent pas un risque nucléaire. Cependant, aux yeux de Washington, chacun peut porter atteinte à leur conception de la liberté. L’Iran qui a repris ses activités de conversion de l’uranium et la Corée du Nord dont l’acquisition, désormais admise, d’un potentiel nucléaire militaire pourrait rompre l’équilibre stratégique en Asie, côtoient Cuba, le Bélarus, la Birmanie et le Zimbabwe qui n’ont pas la volonté de s’engager sur cette voie. Une indispensable adaptation de la dissuasion nucléaire Depuis les évènements du 11 septembre 2001, il apparaît évident que le concept de dissuasion nucléaire établi pendant la Guerre froide, ne répond plus totalement aux contours des menaces modernes. L’instabilité internationale laisse à penser que la posture passée qui affirmait que la dissuasion suffisait à elle seule à protéger le territoire contre toute menace majeure, ne tient plus. Le danger terroriste, qu’il soit le fait d’Etats ou d’organisations, surtout s’il est lié à la prolifération des armes de destruction massive (qui ne sont pas exclusivement nucléaires) constitue un aspect primordial de la réalité internationale. Alors même que le droit international définit un cadre juridique permettant un usage légal des armées pour se défendre contre ces menaces (le terrorisme constitue selon la résolution 1368 du Conseil de sécurité des Nations unies du 12 septembre 2001 une menace pour la paix et la sécurité internationale), les discussions en faveur de la lutte contre la prolifération nucléaire stagnent dans les enceintes internationales. Les réponses traditionnelles, parfaitement adaptées à un monde bipolaire, apparaissent aujourd’hui obsolètes. Cette inadéquation contribue à l’ancrage d’un sentiment d’insécurité, notamment dans les démocraties occidentales. Le défi que ces Etats devront relever sera de parvenir à établir dans les prochaines années, un cadre nouveau pour la maîtrise des armements et de définir les modalités de la « contre prolifération ». Les risques de la prolifération nucléaire constituent la base de la nouvelle guerre nucléaire dans laquelle est entré le monde depuis la disparition du système Est-Ouest. L’assurance d’une paix garantie par un système organisé de la terreur dont toute la crédibilité reposait sur l’idée d’une possibilité d’usage en extrême limite, n’est plus. Des instruments universaux comme le Traité de Non-Prolifération nucléaire, ou les protocoles additionnels de l’AIEA (Agence internationale pour l’énergie atomique), servent à renforcer un cadre contraignant mais accepté, visant à la non-diffusion de ce type d’armes en contrepartie de garanties sur la sécurité collective assumée par la communauté internationale et les Cinq membres du « Club nucléaire » reconnu par le TNP (USA, Russie, Chine, France et Royaume-Uni). Ce sentiment est parfaitement compréhensible : l’organisation internationale ancienne, Est-Ouest, était fondée sur l’image d’un « bel ordonnancement » dans lequel la recherche d’un équilibre entre les deux Grands ne laissait aucune place à « la dispersion » ou la diffusion, hors des Cinq membres du Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations unies, d’un potentiel nucléaire militaire. La disparition de ce système a pu avoir un effet « libérateur » d’énergies politiques. Pourtant, il est important de rappeler que les situations varient en fonction des régions et des logiques politiques qui peuvent expliquer la démarche vers le nucléaire, conduite par certains Etats. L’Inde et le Pakistan sont véritablement, dans le cadre d’un rapport classique de la dissuasion : le Pakistan s’inscrit dans la logique du faible au fort. Cette situation a un effet « stabilisateur » dans la relation parfois tendue, qui existe entre ces deux Etats. La Corée du Nord comme l’Iran posent aujourd’hui, problème. Le secret dans lequel baigne le programme nucléaire de ces pays, les liens à un moment donné, avec les réseaux du Docteur Khan7 notamment, contribuent à un durcissement des positions internationales, notamment par l’engagement du G-8 en juillet 2005 en matière de lutte contre la prolifération. En effet, la bombe nucléaire contient une dimension morale, philosophique essentielle. Celle-ci se traduit dans le concept de dissuasion qui vise à préserver la paix et ne peut être un instrument d’expansion territoriale et surtout, de guerre. Elle a pour fondement de « geler » une quelconque velléité pouvant conduire au conflit ultime. L’inquiétude prévaut car ces principes de garantie de paix ne semblent pas animer la volonté de certains Etats d’acquérir cette catégorie d’armements. D’instrument de paix par la terreur, l’arme nucléaire semble se transformer en « un outil de la terreur pour faire régner la terreur » d’où la responsabilité historique de la communauté internationale dans la gestion de cette menace. La menace terroriste sous toutes ses formes, les dangers de la prolifération d'armes de destruction massive qui est la deuxième forme de prolifération à laquelle la communauté internationale se heurte, constituent autant de facettes nouvelles de la réalité du monde qui exige vigilance et engagement pour assurer la sécurité collective. La nouvelle guerre nucléaire est encore de l’ordre politique. De la force de la réponse de la communauté internationale, de la légitimité de sa réaction dépendra l’évolution de cette menace : politique ou militaire ce qui signifierait la perte de contrôle par les instruments internationaux d’une situation qui a acquis une complexité évidente à l’image et à l’échelle de la mondialisation des échanges, de l’information, des technologies. Le conflit irakien s’est invité dans les foyers par le journal télévisé du 20 heures, les images du 11 septembre ont été vues partout dans le monde. La menace d’un déséquilibre assuré par la diffusion de la terreur s’est répandue dans toutes les capitales. Aux démocraties de savoir y mettre fin sous peine de voir l’insécurité devenir la règle instaurée par la force, par la nouvelle menace nucléaire.
1 – Le nom de Guerre froide a été donné à la confrontation idéologique, politique, économique et culturelle qui a opposé de 1947 à 1990, les USA à l’URSS.
2 – La crise des missiles de Cuba a éclaté en octobre 1962 lorsque les Etats-Unis y ont découvert les travaux d’installation de missiles de portée intermédiaire, pouvant atteindre leur sol. Le blocus de Cuba décidé par le Président Kennedy et la décision du numéro un soviétique, Nikita Krouchtchev, d’ordonner le retour des navires soviétiques en route vers Cuba, permirent de trouver une issue pacifique et politique à une crise majeure des relations Est-Ouest.
3 – TNP (Traité sur la non prolifération des armes nucléaires) : Signé le 1er juillet 1968 et entré en vigueur le 5 mars 1970, il a été ratifié par 187 Etats, à l'exception de l'Inde, du Pakistan, d'Israël et de Cuba. Ce traité constitue l'ossature de la lutte contre la prolifération nucléaire. « Il a pour but d'empêcher la dissémination des armes nucléaires et de la technologie nucléaire, d'encourager l'utilisation à des fins pacifiques de l'énergie nucléaire et d'aboutir en cette matière à un désarmement général et complet ». L'AIEA a la responsabilité du système de garanties, « notamment [à travers] des missions d'inspections dans les pays signataires ». Son article I, dispose que « tout Etat doté d'armes nucléaires qui est partie au Traité s'engage à ne transférer à qui que ce soit […] des armes nucléaires ou autres dispositifs nucléaires explosifs […] ; à n'aider, n'encourager ni inciter d'aucune façon un Etat non doté d'armes nucléaires […] à fabriquer ou acquérir de quelque autre manière des armes nucléaires ou autres dispositifs nucléaires explosifs ou le contrôle de telles armes ou tels dispositifs explosifs ». L'article II dispose que « tout Etat non doté d'armes nucléaires qui est partie au Traité s'engage à n'accepter de qui que ce soit […] le transfert d'armes nucléaires ou autres dispositifs nucléaires explosifs ; à ne fabriquer ni acquérir de quelque autre manière des armes nucléaires ou autres dispositifs nucléaires explosifs ; à ne rechercher ni recevoir une aide quelconque pour la fabrication d'armes nucléaires ou d'autres dispositifs nucléaires explosifs ».
4 – START (Stratégic arms reductions talks) : START I a été signé en 1991 et START II en 1993, sur la réduction des vecteurs d'armes nucléaires stratégiques terrestres et sous-marines. START I prévoit la réduction d'un tiers des arsenaux d'armes nucléaires stratégiques soviétiques et américaines. Ratifié par le Sénat américain le 26 janvier 1996 et par la Douma russe le 14 avril 2000, START II prévoit l'élimination des missiles sol-sol dotés de têtes nucléaires, la réduction du nombre d'armes nucléaires stratégiques américaines à 3 500 et le nombres d'armes stratégiques russes à 3 000.
5- TICE (Traité d'interdiction complète des essais nucléaires) : Signé par 158 pays, il interdit toute explosion nucléaire, quelle que soit sa nature et tout encouragement et participation à la préparation d'un essai nucléaire à des fins militaires ou autres. Ce traité ne pourra entrer en vigueur qu'après sa ratification par 44 Etats dotés d'un potentiel nucléaire ou d'une capacité electronucléaire. A ce jour, ni la Corée du Nord, ni l'Inde et le Pakistan ne l'ont signé. La France et la Grande-Bretagne ont été, en 1998, les premiers Etats dotés de l'arme nucléaire à le ratifier.
6 – Traité ABM : Signé le 26 mai 1972 entre les Etats-Unis et l'URSS sur la limitation des systèmes de missiles antimissiles balistiques. Il est entré en vigueur le 3 octobre 1972.
7 – Considéré comme le fondateur du programme nucléaire de son pays, le professeur Abdul Qadeer Khan a fourni au Pakistan les technologies lui permettant d’entrer dans l’ère nucléaire. Mais, il lui est surtout reproché d’avoir participé sinon alimenté la vente de ces matériels à certains Etats considérés comme proliférants ou appartenant à l’axe du Mal défini par les Etats-Unis : la Corée du Nord, l’Irak en son temps, la Syrie pour les missiles, la Libye (qui depuis a signé les traités internationaux mettant fin à son programme d’acquisition des armements de destruction massive). Cette « privatisation » de l’industrie militaire nucléaire par les laboratoires de recherches du Dr Khan (KRL) a conduit le Président Musharraf a obtenir le départ du professeur de la direction des laboratoires qu’il contrôlait en 2004. Des enquêtes menées notamment par les services secrets américains et britanniques ont mis à jour l’importance du juteux et illégal, commerce du Dr Khan qui s’est vu contraint en février 2004, de reconnaître, en échange de sa liberté (certes surveillée mais réelle tout de même), l’exactitude des informations transmises au Président Musharraf par les capitales occidentales. Ce dernier lui a pardonné cette attitude (pourtant bien connue de tous au Pakistan depuis des années) en contrepartie de son retrait définitif du jeu et de la non diffusion des informations acquises au fil des années.
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